GAP: Faisons-nous confiance

Le Guichet d’accès à la première ligne (GAP) est une très bonne idée. Il marque le début d’un changement de culture opérationnelle et l’amorce d’une offre de services bonifiée et axée sur les besoins individuels. Mais il faut le faire croître tout de suite, sans attendre la mise en place de Santé Québec. Un changement de culture Glissons-nous dans la peau d’une personne sans médecin de famille. Elle éprouve depuis peu des symptômes qui l’alarment quelque peu, ou elle voit une ordonnance médicamenteuse arriver à échéance. Où aller? Qui consulter? Le réflexe premier le plus fréquent, et de loin, est souhaiter une consultation avec un médecin de famille. La personne recherche un moyen, une solution. Voici que, depuis le printemps 2022, cette personne peut contacter le GAP, si elle trouve les coordonnées dans le labyrinthe des guichets d’accès sur le web. En suivant les directives – notamment s’inscrire au GAMF avant de pouvoir s’inscrire au GAP! - une agente administrative ou, si besoin, une clinicienne analyse le besoin exprimé et suggère à cette personne de consulter la ressource qui lui semble la plus pertinente. Ce mode de fonctionnement s’inscrit toutefois dans une nouvelle culture opérationnelle d’organisation des services de santé qu’il est important de souligner: Un grand nombre de demandes de consultation ainsi traitées sont dirigées ailleurs que chez le médecin de famille – pharmacien, infirmière clinicienne et IPS, travailleur social, etc. La FMOQ parle de la moitié. On peut penser que ces personnes seraient allées à l’urgence ou à un SRV autrement. Des témoignages font mention que les personnes ainsi desservies ont le sentiment qu’elles ont reçu un meilleur service qu’une personne inscrite. Ce qui amène d’ailleurs la question de déterminer si ce guichet ne devrait pas être éventuellement élargi à toute la population. L’implantation récente du GAP, selon les régions, révèle plusieurs dysfonctionnements ou des lacunes déjà observées et décrites dans de nombreuses publications. Ce qui est intéressant ici, c’est que ces dysfonctionnements sont révélés à la lumière des besoins exprimés par la clientèle et de notre capacité d’y répondre. Une offre de services bonifiée Lors de l’assemblée générale annuelle de mon association (AMOQ) ce mois-ci, j’ai d’ailleurs beaucoup apprécié le discours du président de la FMOQ, le Dr Amyot, qui parlait de l’importance de s’entendre préalablement sur un modèle d’organisation des services avant de discuter des modes de rémunération. Le GAP va sûrement alimenter cette réflexion étant donné que sa première fonctionnalité consiste à analyser les besoins de la personne et à la diriger vers les ressources pertinentes. C’est aussi la première étape de toute trajectoire de soins digne de ce nom. Il nous informait également que la FMOQ a retenu les services du réputé professeur Jean-Louis Denis, rattaché à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, afin de se faire une idée solide sur les principes les plus porteurs pour proposer à haut niveau les contours du modèle d’organisation de soins et de services évoqué précédemment. Bravo! Cela renforce mon opinion quant à l’impact du GAP car une fois les principes convenus et mis en application, il faudra bien en arriver au modèle opérationnel. Le GAP va nous fournir des enseignements révélateurs à cette fin. Projetons-nous dans les prochaines années: Le GAP fonctionne de mieux en mieux. Les besoins sont bien répertoriés. L’offre de services appropriée est mieux connue: des problèmes ponctuels, d’autres nécessitant un suivi au plus long cours, d’autres qui nécessitent une approche interdisciplinaire, etc. La configuration de l’offre de services se précise: un épisode de soins pour un besoin ponctuel, une trajectoire de soins de durée déterminée pour appliquer protocoles, procédures, etc. Et enfin des trajectoires de soins au long cours, surtout pour les malades chroniques complexes. Les patients ont accès à leur information clinique et peuvent même la transmettre à un professionnel consulté, le cas échéant. Ils ont aussi accès à des outils d’autosoins numériques validés. Un consensus s’est établi pour standardiser l’élaboration de trajectoires de soins et un guide d’implantation et de gestion du changement est émis pour tenir compte des réalités locales et régionales. Un rêve impossible? Pourtant, de tels environnements existent dans les meilleurs systèmes de santé au monde: des besoins connus, les ressources humaines et matérielles nécessaires, des systèmes d’information performants et une rémunération de genre hybride en fonction du type de services et des objectifs à atteindre. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire de même. Accélérons les déploiements en milieu réel On le sait, il manque déjà de personnel. On ne sait pas ce qui arrêtera la gouvernance des systèmes d’information de tourner en rond. Santé Québec prendra son envol à la vitesse d’une oie géante. Pourtant: Les infirmières et les pharmaciens sont prêts à faire des prises ne charge et des suivis, sans qu’un médecin de famille soit nécessairement requis. Une bonne chose puisqu’il en manque 1 200 (selon le MSSS) à 1 500 (selon la FMOQ). Un système d’information robuste est déjà utilisé au Québec (pour du suivi virtuel). Et ce même système permet de coordonner les activités entre les professionnels dédiés à une trajectoire de soins pour un patient ainsi qu’un suivi presqu’en temps réel. De plus, cet environnement permet au patient de s’informer, d’acquérir des compétences et d’interagir avec son équipe soignante. La notion de trajectoire de soins depuis la première ligne est bien ancrée dans le réseau. En ciblant une population bien identifiée et desservie par une équipe en 1re ligne, les services spécialisés pourront mieux répondre aux besoins et à moindre coût.

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Derrière ce blogue:

Alain Larouche

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