Sédation palliative: les médecins de soins palliatifs adoptent de nouvelles lignes directrices québécoises

À quelques semaines de l’adoption du projet de loi 52 sur l’aide médicale à mourir par l’Assemblée nationale, les médecins de soins palliatifs ont pris le gouvernement de vitesse et adopté leurs propres recommandations en matière de sédation palliative continue. Des normes que devraient faire siennes le Collège des médecins l’automne prochain, souhaite la Société québécoise des médecins en soins palliatifs.L’adoption de ces lignes directrices s’imposait depuis un bon moment. La commission parlementaire consacrée au projet de loi 52 avait mis en lumière l’ambiguïté qui existait autour de la sédation palliative, même au sein du corps médical. Cette ambivalence existait tant autour de la terminologie (sédation terminale, sédation continue, sédation palliative, sédation palliative continue) que du geste lui-même. Certains voyaient dans la «sédation terminale», expression longtemps utilisée, un acte visant à accélérer ou à entraîner le décès du patient.La sédationLa sédation palliative continue consiste plutôt à plonger médicalement dans un sommeil prolongé une personne victime de grande souffrance, ou de détresse, et qui ne peut être soulagée par les médicaments qui sont généralement efficaces en pareils cas. Le recours à la sédation devient l’ultime recours pour les médecins en soins palliatifs opposés au projet d’aide médicale à mourir (euthanasie).Dans un article paru dans le numéro d’hiver 2014 du Bulletin du réseau de soins palliatifs et qui traite de la sédation palliative, la Maison Michel-Sarrasin explique la différence entre la sédation palliative continue et l’euthanasie.Cette dernière fait appel à des doses médicamenteuses d’emblée mortelles et qui ne sont pas réversibles. Lorsqu’une sédation palliative continue est appliquée avec justesse, la médication provoque un niveau d’inconscience suffisant pour assurer le confort du malade. Elle est administrée lorsque l’espérance de vie du patient est évaluée à moins de deux semaines.«La sédation palliative est généralement maintenue jusqu’au décès du patient, mais si son état de santé s’améliore, on peut décider, avec l’accord des personnes concernées, de renverser la sédation», explique la Dre Andréanne Côté, médecin en soins palliatifs.«La plupart des agents employés pour produire une sédation sont fréquemment utilisés dans la pratique palliative journalière», précise la Dre Côté dans un autre article du même bulletin. Ce qui distingue l’usage de ces médicaments dans le cadre d’une sédation palliative est l’intention derrière le choix, celle d’endormir profondément le patient, et la force des doses utilisées.Le recours à la sédation palliative demeure une avenue exceptionnelle. Le Dr Bernard Lapointe, qui pratique aussi en soins palliatifs, dit n’y recourir que quatre à cinq fois par année.Lignes directrices La réalisation des lignes directrices québécoises qui ont été adoptées lors du congrès du Réseau de soins palliatifs du Québec tenu en mai dans la Capitale a exigé un an de consultations et de rédaction. Près d’une vingtaine de médecins en soins palliatifs y ont contribué.L’exercice n’est pas simple, même si les médecins concernés s’entendent sur les objectifs. Il existe à travers le monde un grand nombre de guides de pratique, ce qui traduit la variation au sujet de cette pratique. Des études internationales ont conclu que l’application de normes nationales et internationales en matière de sédation palliative était inconsistante.En outre, la publication de ces lignes directrices ne semble pas avoir résolu les débats éthiques entourant deux aspects majeurs : l'utilisation de la sédation palliative chez des malades présentant une souffrance psychologique ou existentielle et le recours ou non à l’hydratation chez les patients qui reçoivent la sédation.Selon la Société québécoise des médecins en soins palliatifs, il était devenu nécessaire d’adopter des recommandations québécoises pour une multitude de raisons. D’abord, pour offrir aux médecins québécois des lignes directrices en français et qui seront recommandées dans tout le Québec. Ensuite, parce que l’adoption de la législation sur l’aide médicale à mourir est imminente, le nouveau gouvernement libéral ayant clairement fait connaître ses intentions à ce sujet. Enfin, parce qu’il était devenu urgent de clarifier les concepts, la terminologie et d’établir un consensus autour de la question.Pour bâtir les lignes directrices québécoises, les auteurs disent s’être inspirés des normes canadiennes et européennes et du travail accompli à la Maison Michel Sarrasin, à l’Hôpital Notre-Dame, et des membres de la Société qui sont confrontés à ce soin.Le guide québécois prévoit la pratique de la sédation dans trois milieux : dans un hôpital, à la maison, ce qui n’est pas sans soulever certains problèmes quand on sait que 32% des Québécois vivent seuls, et en CHSLD. Le guide prévoit plusieurs indications pour la sédation palliative, y compris la détresse psychologique ou existentielle réfractaire.Lors de son passage en commission parlementaire au sujet du projet de loi 52, le Collège des médecins avait mentionné son intention d’adopter des lignes directrices pour encadrer la pratique de la sédation palliative. La Société québécoise des médecins en soins palliatifs s’attend à retrouver ses recommandations dans les normes de pratique qui seront établies par le Collège au cours de l’année 2014.À lire aussi Après les cours de yoga en oncologie, verra-t-on le yoga en soins palliatifs?

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