Rapport de Burnoutville: La flexibilité transforme les équipes en famille

Dans la foulée de mon dernier blogue, j’ai décidé de ne plus prendre de garde en obstétrique. J’ai été très touchée par le soutien unanime de mon groupe de garde, qui a accepté que je ne prenne plus de gardes, mais que je vienne quand même accoucher mes propres patientes, et que je donne éventuellement un enseignement formel aux résidents et aux fellows. Cela me permet de continuer à travailler dans les cliniques où je soigne des femmes hassidiques et des réfugiés. Dans ces endroits, il y a aussi des hipsters, des musiciens, des cinéastes et des concepteurs de jeux vidéo qui sont en train d’embourgeoiser le quartier. Comme me l’a écrit l’un de mes amis: «C’est la beauté de notre groupe de gynéco-obstétriciens; nous sommes flexibles afin de satisfaire les besoins et les désirs de nos membres à chacune des étapes de leur cycle de vie médical.» C’est peut-être la raison pour laquelle nous sommes l’une des équipes d’omnipraticiens et de gynécologues-obstétriciens les plus étoffées et les plus performantes au pays et que nous avons l’un des taux de recrutement de résidents les plus élevés dans la pratique en gynécologie-obstétrique. Le secret de notre réussite réside dans cette flexibilité. Lorsque j’ai commencé dans ce groupe, au début des années 80 — avant la nuit des temps —, nous étions cinq cliniciens. Nous faisions à peine 100 accouchements par an et nous étions de garde pendant une semaine entière. J’étais la deuxième femme du groupe. Les années suivantes, nous avons renforcé nos effectifs et recruté quelques médecins supplémentaires. Lire aussi: Rapport de Burnoutville: Démissionner ou ne pas démissionner? Dès le départ, ou presque, nous avons accordé de l’importance et priorisé les besoins individuels de nos membres aux différentes étapes de leur vie. Au début, nous pensions que chacun devait, et voudrait accoucher ses propres patientes, mais nous avons vite compris que ce n’était pas fonctionnel pour certains d’entre nous. Au lieu de l’approche très rigide «taille unique» que la plupart des groupes de médecins appliquent aux situations difficiles — et qui, selon moi, revient souvent à une «taille unique pour personne» —, nous nous sommes accordé la flexibilité dont nous avions besoin pour pratiquer la gynécologie-obstétrique tout au long de nos carrières. Nous avons mis en place un système de «retrait sans culpabilité» qui nous a permis d’aller et venir auprès de nos patientes comme nous le pouvions, ce qui nous permet de faire de l’obstétrique sans mettre en péril notre santé mentale ou notre vie de famille. Lorsque mes enfants étaient jeunes, les accouchements au milieu de la nuit étaient commodes pour moi. J’ai souvent signé pour les «heures d’arsenic», de 5h à 9h du matin et de 17h à 21h, lorsque la tâche de lever et de préparer quatre enfants pour l’école, ou de les nourrir puis de les mettre au lit exigeait ma présence ainsi qu’un travail en équipe avec Saint-David, mon mari, qui en a longuement souffert, mais qui était très compétent. Je constate que ce schéma se poursuit avec la jeune génération, qui préfère souvent ne faire que des gardes de nuit, bien que la plupart d’entre eux accomplissent maintenant des gardes d’urgence et ne viennent que lorsqu’ils figurent au planning. Ceux qui n’ont pas d’enfants, ou qui ont des enfants plus âgés, préfèrent souvent faire des appels 24 heures sur 24, de sorte qu’ils sont moins souvent de garde et que leur vie est moins perturbée. Certains préfèrent ne faire que des journées, comme moi, maintenant que je suis en préretraite. Nous tenons compte de toutes ces préférences (merci à Barb d’avoir fait en sorte que cela soit possible en gérant notre planning démentiel). Comme l’a dit Barb lorsque nous en avons discuté, «sans cette flexibilité, j’aurais probablement abandonné le métier d’obstétricienne gynécologue le jour où j’ai eu mes enfants». Lire aussi: Recette pour une préretraite active J’entends certaines personnes s’écrier: «Mais ce n’est pas juste!» Si les gens viennent pour leurs propres accouchements, ils privent le groupe de revenus. Peut-être, mais cela permet à nos accros à la naissance de rester heureux. Ce sont souvent les personnes qui ont le plus grand nombre de patients. Donc, même s’ils en accouchent beaucoup, leur contribution est positive. Les jeunes mères peuvent continuer à faire de l’obstétrique à un rythme plus lent sans pour autant abandonner complètement leur pratique et peut-être ne jamais y revenir. Et maintenant, je suis capable de continuer à faire quelques accouchements et à enseigner sans me tuer au travail. Je me souviens d’une partie très importante de A Wrinkle in Time (Un raccourci dans le temps), le merveilleux livre de Madeleine L’Engle, qui, pour une raison quelconque, figure maintenant sur de nombreuses listes d’ouvrages interdits. Dans le livre, lorsque Meg Murry, l’héroïne, affronte Lui, le cerveau désincarné qui retient son père en prison, celui-ci soutient qu’il a créé une utopie sur la planète Camazotz, qui a succombé à la Chose noire, le mal qui se répand dans l’Univers. «Tout le monde est pareil», affirme-t-il. «Tout le monde est égal.» Envahie d’une juste colère, Meg se défend: «Égaux et identiques ne sont pas les mêmes choses!» Lire aussi: Réduire ma pratique n'a pas été une décision facile à prendre Pour faire écho à Meg et à l’auteure, je souhaite donc lancer un appel aux groupes de garde de toutes sortes, en particulier aux groupes de garde en médecine familiale et en obstétrique, pour qu’ils embrassent la diversité de leurs membres et remplacent l’uniformité par l’équité, et la similitude par une définition plus réaliste et plus humaine de l’équité. Alors que je suis assise sur mon canapé à regarder Daniel Tiger avec mon petit-fils, je pense que les valeurs de gentillesse, de reconnaissance des besoins et d’intelligence émotionnelle de M. Rogers sont notre force et j’espère qu’elles feront partie de mon héritage. Comme l’a dit un autre membre de notre groupe: «C’est un appel pour que les groupes de garde travaillent non seulement en équipe, mais aussi en famille, car dans les familles fonctionnelles, les besoins de chaque membre sont considérés et satisfaits.» Vous souhaitez vous aussi faire valoir votre point de vue sur un enjeu du système de santé? Apporter une réflexion vis-à-vis de votre profession? Envoyez-nous un texte d'opinion à titre de professionnel de la santé ou d'association en santé, afin qu'il soit relayé sur le site. Plus d'infos >

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