Pour connaître les volontés du patient (4e partie): l’effet des directives médicales anticipées

Dans cette dernière chronique portant sur les directives médicales anticipées, notons que ces dernières prennent effet dès lors que leur contenu est porté à la connaissance des médecins et des professionnels de la santé qui traitent les personnes.Ainsi, lorsque des directives médicales anticipées sont remises à un professionnel de la santé, celui-ci les verse au dossier de la personne concernée si elles ne l’ont pas déjà été. Si ces directives lui sont remises par leur auteur et que ce dernier est apte à consentir aux soins, le professionnel de la santé s’assure, au préalable, qu’elles sont toujours conformes à ses volontés.Lorsque le médecin constate un changement significatif de l’état de santé d’une personne apte à consentir aux soins, il doit, si des directives médicales anticipées ont été versées à son dossier, vérifier auprès d’elle si les volontés exprimées dans ses directives correspondent toujours à ses volontés.Si la personne est devenue inapte à consentir aux soins, le médecin doit consulter le registre des directives médicales anticipées. S’il s’y trouve des directives médicales anticipées concernant le patient, le médecin les verse au dossier de ce dernier.Les directives médicales anticipées prennent leur plein effet une fois que leur auteur est devenu inapte à consentir. Auparavant, c’est sa volonté exprimée en temps réel qui fait foi de son consentement.Lire aussi: Pour connaître les volontés du patient (1ere partie): les directives médicales anticipéesPour connaître les volontés du patient (2e partie): la confection des directives médicales anticipéesPour connaître les volontés du patient (3e partie): le registre des directives médicales anticipéesÀ cet effet, la loi prévoit que lorsqu’une personne est inapte à consentir aux soins, les volontés relatives aux soins, clairement exprimées dans des directives médicales anticipées qui ont été versées au registre des directives médicales anticipées ou au dossier de la personne ont, à l’égard des professionnels de la santé ayant accès à ce registre ou à ce dossier, la même valeur que des volontés exprimées par une personne apte à consentir aux soins.Cela signifie que le médecin n’a pas à mettre en doute les volontés exprimées dans les DMA. Il doit respecter les volontés émises par la personne. Les DMA ont donc une valeur contraignante certaine.De plus, l’article 59 de la loi énonce que l’auteur des DMA est présumé avoir obtenu l’information nécessaire pour lui permettre de prendre une décision éclairée au moment de leur signature.À l’égard des volontés exprimées dans les DMA, la personne habilitée à consentir pour l’auteur des DMA devenu inapte ne peut décider autrement que selon les volontés exprimées dans les DMA.C’est au représentant à s’assurer que des volontés exprimées dans les DMA seront respectées par le médecin et l’équipe traitante.La finalité du deuxième alinéa de l’article 11 du Code civil est très claire à cet effet :« Si l’intéressé est inapte à donner ou à refuser son consentement à des soins et qu’il n’a pas rédigé des directives médicales anticipées en application de la Loi concernant les soins de fin de vie (chap. 5-32.0001) et par lesquelles il exprime un tel consentement ou un tel refus, une personne autorisée par la loi ou par un mandat de protection peut le remplacer. »En pratique, les volontés exprimées par l’auteur des directives médicales anticipées lient son représentant pour fin de consentement et l’équipe médicale qui le traite. Le médecin n’a pas à reprendre avec le représentant le processus du consentement éclairé, parce que la volonté exprimée par l’auteur des DMA est éclairée suffisamment pour rendre le consentement préalable valide.Le médecin doit confirmer avec le représentant qu’il entend donner suite à l’expression des volontés contenues dans les directives médicales anticipées. C’est le rôle du représentant de recevoir cette information et de s’assurer que les interventions de l’équipe médicale respectent pleinement la volonté de l’auteur des DMA.La modification des DMAUne personne peut toujours modifier ses DMA tant qu’elle demeure apte à consentir. Pour ce faire, il faut soit demander à la Régie un nouveau formulaire, soit consulter un notaire pour en rédiger de nouvelles.Les DMA existantes ne peuvent être modifiées que par la rédaction de nouvelles DMA, sur le formulaire prescrit par le ministre, devant deux témoins. Les nouvelles directives remplacent les précédentes, sauf si le contenu de ces dernières peut coexister avec celui de la plus récente.Par exemple, l’auteur rédige ses DMA en limitant l’expression de ses volontés à l’égard de trois des cinq soins qui sont mentionnés sur le formulaire. Il en rédige une seconde un peu plus tard, qui exprime ses intentions seulement à l’égard des deux autres soins. Dans un tel cas, les deux DMA peuvent coexister et recevoir application.Toutefois, en cas d’urgence, s’il est encore apte à consentir et qu’il exprime verbalement des volontés différentes de celles contenues dans ses DMA, cela entraîne la révocation de celles-ci.Lorsque des directives médicales anticipées lui sont transmises, et que de telles directives ont déjà été versées au registre par leur auteur, la Régie retire les plus anciennes et les remplace par les plus récentes.Pour assurer leur respect, il faut aussi en aviser l’équipe traitante s’il y a lieu, et faire déposer dans son dossier les DMA modifiées, en prenant soin de s’assurer que les DMA précédentes sont retirées du dossier pour être remplacées par les nouvelles.La révocation des DMALes DMA peuvent être révoquées à tout moment par leur auteur sur la formule prescrite par la loi. Seul l’auteur des DMA peut les révoquer.Pour ce faire, il faut demander à la Régie le formulaire de Révocation des directives médicales anticipées, le compléter et le retourner à la Régie.Sur réception du formulaire de révocation, la Régie retire du registre les directives médicales anticipées.Il est essentiel de transmettre la révocation à la RAMQ afin qu’elle soit versée au registre des DMA. La consultation du Registre apprendra alors à celui qui le consulte qu’il n’y a pas de DMA valide pour le patient en question. Toutefois, la remise de la formule de révocation au médecin traitant entraîne dès ce moment la cessation de tout effet de telles directives.Toutefois, le moyen le plus simple de révoquer des DMA est simplement d’en rédiger de nouvelles. L’intérêt de demander une formule de révocation n’est justifié que si la personne n’entend pas faire d’autres DMA.Le recours au tribunalPlusieurs difficultés peuvent se poser dans l’application des directives médicales anticipées. Il sera nécessaire dans chaque cas, de recourir au tribunal, soit la Cour supérieure, en suivant la procédure prévue par l’article 16 du Code civil relativement aux autorisations judiciaires de soins.La première découle du refus catégorique d’une personne devenue inapte à consentir aux soins de recevoir des soins auxquels elle aurait préalablement consenti dans ses directives médicales anticipées. Dans ce cas, la procédure prévue par l’autorisation judiciaire des soins en cas de refus de traitement d’un majeur inapte s’applique.Si des difficultés surviennent quant au respect des directives médicales anticipées, le tribunal, soit la Cour supérieure, peut, à la demande du mandataire, du tuteur, du curateur ou de toute personne qui démontre un intérêt particulier pour l’auteur des directives médicales anticipées, ordonner le respect des volontés relatives aux soins exprimées dans ces directives.Le tribunal peut également, soit à la demande du mandataire, du tuteur, du curateur ou de toute personne qui démontre un intérêt particulier pour l’auteur des directives médicales anticipées, soit à la demande d’un médecin ou d’un établissement hospitalier, invalider en tout ou en partie des directives médicales anticipées s’il a des motifs raisonnables de croire que l’auteur de ces directives n’était pas apte à consentir aux soins au moment de leur signature ou que ces directives ne correspondent pas à la volonté de l’auteur dans une situation donnée.Le tribunal peut rendre toute ordonnance qu’il estime appropriée dans les circonstances.En cas de difficulté d’application des directives médicales anticipées, il peut toujours être utile de tenter de régler le problème par la procédure de plainte plutôt que par la judiciarisation, si cela est possible dans les circonstances.Quant à la coexistence des directives médicales anticipées avec d’autres formes d’expression écrite, la loi prévoit que les volontés relatives aux soins exprimées dans un mandat de protection d’une personne ne constituent pas des directives médicales anticipées au sens de la loi. Ces volontés demeurent régies par les articles 2166 et suivants du Code civil.En cas de conflit entre ces volontés et celles exprimées dans les directives médicales anticipées, ces dernières prévalent. Les mêmes règles s’appliquent à l’égard de toute autre forme d’expression écrite de volontés. Les directives médicales anticipées prévaudront en cas de conflit, même pour des écrits postérieurs aux DMA, quel que soit la nature ou le contenu des écrits.* Avocat, associé de l’étude Ménard, Martin, de Montréal. Me Ménard enseigne à la maîtrise en droit et politique de la santé la responsabilité médicale et la psychiatrie légale. Il enseigne également à la maîtrise en administration des services de santé à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal. Il est le principal instigateur du site www.vosdroitsensante.com

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