PL67: le CMQ ouvre le bal des auditions

L'Assemblée nationale accueillait ce mercredi 18 septembre la première journée d'auditions concernant le projet de loi 67 porté par la présidente du Conseil du Trésor, Sonia LeBel.Après la présentation du Conseil interprofessionnel est venu le tour du Collège des médecins du Québec (CMQ) – représenté par son président, le Dr Mauril Gaudreault, et sa directrice générale adjointe, la Dre Isabelle Tardif – de formuler ses recommandations, rassemblées dans un mémoire publié le même jour. Soulignant d'abord un « projet de loi indispensable pour faciliter l’accès aux soins», Mauril Gaudreault a réaffirmé que l’autonomie de certains professionnels en termes de santé mentale et l’élargissement du rôle des pharmaciens étaient un «gain pour le public», et s’est d’ailleurs dit favorable à la reconnaissance de la spécialité des pharmaciens titulaires d’une maîtrise en pharmacothérapie avancée. À lire aussi: Nouveaux pouvoirs aux professionnels de la santé: un pas de plus en faveur l’interdisciplinaritéLa mise en pratique de ces mesures réclame toutefois cinq conditions indispensables, a précisé Mauril Gaudreault: Des trajectoires de soins avec des corridors de services bien établis pour favoriser la collaboration interprofessionnelleUne harmonisation des règlements professionnels en matière de tenues de dossiers, d’ordonnances et de déontologieLe rehaussement technologique du réseau, notamment via la mise en place immédiate du Dossier Santé numérique (DNS) «et mettre, comme sur les yogourts, une date de péremption sur les fax!» Ouvrir la possibilité à tous les ordres de santé et de services sociaux de donner des avis au ministre et d’effectuer des enquêtesMettre en place des outils de communication à destination du publicÀ lire aussi: Coopératives de santé, quand les citoyens créent leur première ligneLa nécessité de rendre le réseau plus technologique a interpellé le député de l’opposition André Albert Morin (PLQ), quant à savoir si l’efficacité du PL67 pourrait être mise en péril sans un système numérique efficace et efficient. «Ce n’est pas parce que les professionnels ont plus d’autonomie qu’ils n’ont plus besoin de se parler, a répondu le président du CMQ. La pratique de la médecine est une pratique en équipe. [...] En cas d’interrogation sur un diagnostic, tout professionnel devrait pouvoir consulter un médecin spécialiste.»Plus de leviers pour encadrer les cliniques privéesLe Dr Gaudreault a ensuite insisté sur l’encadrement des sociétés privées fournissant des soins de santé, qui, n’étant pas inscrites au registre de du Collège, ne sont pas tenues de respecter les normes professionnelles, qu’il s’agisse d’environnement de travail, de publicité ou de facturation. Le président du CMQ a rappelé que ce dernier avait «dû entamer des procédures judiciaires pour avoir accès à des dossiers de patients contenus dans des dossiers médicaux électroniques, propriété de cliniques médicales détenues par des gens d’affaires.» Une situation de plus en plus fréquente à mesure que se développe la télémédecine, a précisé la Dre Isabelle Tardif. Le CMQ a formulé trois recommandations entourant cette pratique: Autoriser un professionnel à exercer au sein d’une personnes morales sans but lucratif (PMSBL) sans que son Ordre n’ait adopté un règlement à cette fin et sans qu’une condition de coût modique ne soit fixée pour les services rendusDonner la possibilité à chaque ordre d’encadrer la pratique des entités commerciales fournissant des services de santé par voie réglementaire, et d’avoir ainsi des leviers d’actions dans le cas du refus d’un administrateur de transmettre un dossier patientAjouter des mécanismes de surveillance et de contrôle à l’égard des sociétés offrant des services professionnels, de leurs administrateurs et de leurs dirigeants, au Code des professions.Après un échange avec la présidente du Conseil du Trésor Sonia LeBel, cette dernière et le CMQ ont admis que des discussions plus poussées seraient nécessaires afin de mieux encadrer l’exercice des sociétés de santé privées et de revenir sur la règle unique du coût modique au sein des PMSBL, qui pourrait freiner les organismes communautaires et les associations en région éloignée selon le Collège.Baliser la délivrance des nouveaux permisEnfin, le sujet de nouveaux permis d'exercice a fait l’objet de nombreuses questions, tant du côté des médecins que des députés. «L’ajout de ces deux nouveaux permis [le permis restrictif temporaire et le permis spécial, ndlr], au surplus avec des appellations existantes, sans une refonte des catégories de permis ni des mécanismes d’admission, ne fera qu’ajouter à la confusion qui existe depuis de nombreuses années.» Quid, par exemple, du cas d’un médecin détenant déjà un permis d'exercice et qui se verrait délivrer l’un de ces deux nouveaux permis? Le Collège recommande ainsi au gouvernement de:Délivrer un permis spécial pour l’exercice de certaines activités professionnelles seulement si la personne ne détient pas de permis permanentClarifier les modalités de délivrance d’un permis régulier à la personne titulaire d’un permis spécialPermettre à un ordre professionnel de moduler le permis existant au lieu d’en délivrer un nouveauDéfinir une situation d’urgenceSonia LeBel a rappelé que ces nouveaux permis avaient pour objectif de pouvoir accueillir des gens pleinement formés à l’étranger et de permettre le retour à la profession, elle a néanmoins reconnu qu’ils pourraient créer des «incongruités» dans un système déjà complexe, et a ouvert la voie à d’autres discussions avec le CMQ. L’autorisation donnée à des personnes sans compétences médicales d’exercer dans une situation d’urgence est «un chèque en blanc» pour Mauril Gaudreault. «Cela autorise des non-professionnels à poser des actes sans pouvoir les surveiller, puisqu’ils ne sont pas inscrits au tableau.» Sur cette notion, déjà soulevée un peu plus tôt par le Conseil Interprofessionnel lors de son audition, Sonia LeBel a indiqué vouloir mieux baliser la notion d’urgence afin de «rassurer» les ordres et de leur donner l’agilité nécessaire.

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