Loi 2: le PAMQ est «inondé» d’appels

C’est du jamais vu en 35 ans d’existence du Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ). Depuis que l’Assemblée nationale a adopté samedi la Loi 2 – qui veut entre autres lier la rémunération des médecins à des indicateurs de performance –, «on est inondé d’appels», témoigne sa codirectrice médicale, la Dre Sandra Roman. Une situation selon elle «inédite en volume et en intensité de détresse».Au cours des trois derniers jours, le nombre d’appels pris par les médecins-conseil du PAMQ a doublé par rapport à l’accoutumé, rapporte la Dre Roman. Elle avait déjà noté une augmentation sensible des demandes d’aide depuis la présentation en mai dernier du projet de loi 106 qui était, en quelque sorte, le prélude à la Loi 2. Mais là, «la hausse est subite et très considérable», observe-t-elle en indiquant que le Programme a dû renforcer ses équipes pour être en capacité d’offrir écoute et réconfort à tous les appelants.Cet article pourrait vous intéresser: «Consterné» par la loi 2, le CMFC dénonce des objectifs irréalistesLes omnipraticiens et les spécialistes qui contactent la ligne d’aide du PAMQ (au 514 397-0888 ou 1 800 387-4166) sont «sous le choc. Ils vivent une très grande détresse et sont extrêmement anxieux», relate la Dre Roman qui se dit «vraiment préoccupée» par le moral en berne de ses pairs. «La Loi 2 vient s’ajouter à une vague de fond, où se mêlent perte de sens et perte de repères, qui déferle dans un climat déjà propice à l’épuisement professionnel.»Dans ce contexte, les dispositions de la Loi 2 relative aux cibles de performance sont particulièrement sources d’inquiétudes. «Des médecins se demandent quels impacts ces cibles vont avoir sur leur travail, sur leur vie familiale, sur leurs finances et surtout s’ils vont être capables de faire de la bonne médecine. D’autres ne sont pas en mesure de travailler à un rythme soutenu, parce qu’ils ont des conditions de santé, sont proches aidants ou encore mères monoparentales. Ceux-là se demandent s’ils vont être assez performants pour atteindre les cibles. Certains craignent même de pénaliser leur équipe et que cela crée un malaise», détaille la codirectrice médicale du Programme. Elle signale également que la ligne d’aide reçoit de nombreux appels de la part de chefs d’équipe ou de département en quête d’outils pour apaiser les angoisses de leurs collègues et/ou pour exercer un leadership bienveillant. «Ces médecins sont dans une position inconfortable. Ils se retrouvent en porte-à-faux, coincé entre leur rôle de chef qui doit rassurer son équipe et leur propre désaveu des cibles de performance», explique la Dre Roman. À lire aussi: De Montréal à Ottawa: la décision difficile de la Dre Le VanGarder le bon capDans l’ensemble, les uns comme les autres sont «très blessés», constate par ailleurs la médecin-conseil. «Malgré leurs efforts quotidiens, malgré leur engagement auprès de leurs patients, les médecins ressentent un profond manque de reconnaissance et ils ont un sentiment d’injustice. Ils estiment prendre le blâme d’une situation (les failles du réseau de la santé, NDLR) qui est hors de leur contrôle.»À lire aussi: «100 médecins qui quittent, c'est une hécatombe», lance Pablo RodriguezDevant cette situation inédite qui confine à la morosité, la Dre Roman appelle les cliniciens à prendre soin de leur santé et d’être à l’écoute de soi-même. «La base, c’est le sommeil», ajoute-t-elle. L’autre conseil qu’elle donne, c’est d’être prudent avec les réseaux sociaux qui peuvent accroître l’anxiété. «Il faut savoir débrancher». Enfin, elle recommande de ne pas prendre de décisions intempestives. «Il faut y aller un jour à la fois, se concentrer sur l’essentiel et garder le cap afin de reprendre de l’énergie». À bon entendeur…

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