L'affaire de l'urgentologue et de ses lacunes en toilettes d'hôpital

En plus des nombreuses connaissances nécessaires à l'exercice de leur profession, les médecins devraient-ils aussi verser dans la conception architecturale des toilettes d'hôpital? Ne riez pas: dans l'affaire Paur contre Providence Health, 2015 (BCSC 1695), une urgentologue a été poursuivie pour ses lacunes en la matière.Cette sombre histoire a commencé en mai 2011, quand la police a amené un homme suicidaire en état d'ébriété à l'urgence de l'Hôpital St. Paul, à Vancouver. Après une dispute avec sa femme, celui-ci avait loué une chambre d'hôtel à un étage élevé. Il l'avait ensuite appelée pour lui faire ses adieux, avait jeté son téléphone du balcon, avant d'être appréhendé alors qu'il s'apprêtait à se jeter dans le vide. Le rapport de l'ambulance indiquait que l'homme avait consommé deux litres de boissons alcoolisées, deux verres de whisky et un milligramme de clonazépam.L'homme a été vu par une urgentologue dès son arrivée à l'hôpital. Cette dernière a réalisé que l'homme avait besoin d'une évaluation en santé mentale. Cependant, vu son état d'ébriété, elle a décidé qu'il devait passer la nuit à l'hôpital avant de pouvoir être évalué.Alors qu'on l'avait installé dans une salle d'attente, le patient s'est rendu aux toilettes, a enlevé les dalles du plafond et s'est pendu à la structure d'acier à l'aide de sa jaquette d'hôpital. Il a été secouru, mais pas assez vite pour lui éviter des lésions cérébrales graves.L'hôpital lui-même a été tenu responsable, essentiellement pour avoir une salle d'eau non sécuritaire, et a été condamné à payer près de 400 000 $ de dommages et intérêts.Certaines infirmières qui se trouvaient dans la salle d'attente ont également été accusées de négligence pour «avoir perdu la trace» du patient en plus de ne pas avoir su comment débarrer la porte des toilettes rapidement. Et bien que l'urgentologue pensait qu'elle était tirée d'affaire puisqu'elle s'était entendue avec le plaignant, les avocats de l'hôpital l'ont appelée comme tierce partie dans la défense afin de partager le blâme. Ils ont affirmé qu'elle avait omis d'insister auprès des infirmières sur le fait que le patient était très suicidaire, qu'elle n'avait pas demandé une surveillance accrue et n'avait pas été en mesure d'anticiper que la salle de bain n'était pas sécuritaire, puisque son plafond était constitué de dalles amovibles.Finalement, la Cour suprême de Colombie-Britannique a vu les choses autrement. Le juge a rejeté catégoriquement l'idée selon laquelle le médecin aurait dû savoir que les toilettes de l'hôpital ne permettaient pas de prévenir une tentative de pendaison, notant que d'autres médecins ayant témoigné lors du procès n'avaient pas non plus une idée claire de la conception des salles de bains dans les hôpitaux où ils ont travaillé.Cette décision devrait rassurer un peu les médecins, puisqu'elle leur enlève toute imputabilité concernant les problèmes de conception dans les hôpitaux. Il semblerait effectivement tout à fait injuste de blâmer un médecin si l'un de ses patients contractait, par exemple, la tuberculose parce que l'hôpital n'a pas de salle à pression négative.En fin de compte, comme l'a statué la Cour, les médecins sont des soignants, pas des gestionnaires d'immeubles.Bill Rogers est un avocat de Toronto et auteur couvrant les questions médicales et pharmaceutiques.

L'affaire de l'urgentologue et de ses lacunes en toilettes d'hôpital

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