Docteur, mon diagnostic de cancer met-il un terme à ma pratique d’activités physiques?

Le cancer est la première cause de mortalité au Québec : plus d’une personne sur trois risque d’en être atteint au cours de sa vie et l’on estime que d’ici quelques années ce ratio passera à un individu sur deux. Malgré le fait que la mortalité suite au diagnostic a diminué de façon significative1, il n’en demeure pas moins que la bataille n’est pas encore gagnée et que de plus amples recherches sont nécessaires pour optimiser les traitements actuels.En contrepartie, lorsqu’on sait que les recherches ont démontré qu’il était généralement possible de prévenir de 30 % à 35 % des cas de cancer par l’activité physique, la saine alimentation et le maintien d’un poids santé1, il est justifié de se demander si une proportion plus considérable des investissements placés dans la recherche curative ne pourraient pas être en partie orientée dans une approche de type préventif.Prévention primaire : lien entre l’activité physique et le cancerPlusieurs mécanismes ont été proposés pour relier l’activité physique au cancer, et il semblerait que les hypothèses les plus concluantes résultent de l’effet de l’activité physique sur la réduction du tissu adipeux. La perte de masse grasse diminuerait ainsi la production d’hormones sexuelles, d’insuline, de leptine, de marqueurs inflammatoires et, par ce fait, modulerait l’exposition à ces potentiels agents carcinogènes et réduirait donc le risque de cancer2.Par contre, en dépit du fait que l’activité physique pourrait réduire les risques de développer certains types de cancer, tel le cancer du côlon, de 50 %3, le diagnostic est parfois inévitable. Dans de tel cas, peut-on espérer que la pratique régulière d’activité physique puisse encore être bénéfique à ce stade et doit-on encourager les patients atteints de cancer à maintenir un mode de vie actif malgré les traitements et les inconvénients qui s’y rattachent ?Activité physique et survie postdiagnosticIl y a en effet plusieurs études qui ont rapporté une association positive entre l’augmentation du niveau d’activité physique suite à un diagnostic de cancer et le pronostic4; 5. Alors que le niveau d’activité physique précédant le diagnostic de cancer ne semble pas être relié au taux de survie, les individus qui ont eu un haut niveau d’activité physique postdiagnostic seraient quant à eux moins sujets à avoir une récurrence du cancer et auraient un taux de survie supérieur5. Ainsi, les individus atteints de cancer du côlon qui participeraient à une activité physique d’intensité modérée à raison de trois heures par semaine sembleraient avoir une diminution de 39 %-59 % du risque de décès par cancer5. Cliniquement, ce fait peut être grandement utile afin de démontrer aux patients qu’ils sont en mesure de poser des gestes pouvant avoir des répercussions tangibles sur leur guérison et qu’il n’est jamais trop tard pour effectuer un virage santé.En addition à cet effet plus que notable sur la survie, l’activité physique serait aussi bénéfique à plusieurs niveaux lors des traitements. Il est bien établi que la chirurgie, la chimiothérapie, la radiothérapie et la thérapie hormonale sont des modalités thérapeutiques qui ont des effets aigus et chroniques sur les systèmes physiologiques, tel le système musculaire. La maladie en tant que tel ainsi que les traitements qui s’y rattachent peuvent ainsi induire une dégradation de la masse musculaire, des anomalies dans le métabolisme du système cardiaque et du muscle squelettique entraînant une diminution de la force musculaire, de la mobilité... et compromettant ainsi la qualité de vie de ces patients6. Or, il a été démontré que la participation à un programme d’exercice était un moyen sécuritaire et efficace d’augmenter la fonction musculaire et la qualité de vie chez les individus ayant survécu à un cancer6. En plus de cet effet directement relié à la condition musculaire, la pratique régulière d’activité physique d’intensité modérée parallèlement aux traitements amènerait aussi plusieurs autres bienfaits d’ordre physique ou psychologique tels que l’augmentation de la reconstruction osseuse, le maintien du poids corporel, l’augmentation de l’humeur, l’augmentation de l’estime de soi, la diminution des effets secondaires et la diminution du degré de fatigue7;8.Perspectives d’avenirMalgré toute la littérature sur ce sujet, il est certain que de plus amples études sont nécessaires pour établir de manière plus affirmée la prescription d’exercices idéale et l’amplitude exacte des bienfaits de l’activité physique chez les survivants du cancer9. Il n’en demeure pas moins qu’avec l’envergure des résultats actuels, la prévention semble être l’avenue à préconiser dans la lutte contre le cancer et ainsi, il est plus que temps de mettre en application la prémisse « Vaut mieux prévenir que guérir... »1. Société canadienne du cancer. Statistiques générales sur le cancer 2009. 2009. Ref Type : Online Source.2. McTiernan, A. 2008. Mechanisms linking physical activity with cancer. Nat.Rev Cancer 8:205-11.3. Colditz, G. A., C. C. Cannuscio, and A. L. Frazier. 1997. Physical activity and reduced risk of colon cancer : implications for prevention. Cancer Causes Control 8:649- 667.4. Meyerhardt, J. A., D. Heseltine, D. Niedzwiecki, D. Hollis, L. B. Saltz, R. J. Mayer, J. Thomas, H. Nelson, R. Whittom, A. Hantel, et coll. 2006. Impact of physical activity on cancer recurrence and survival in patients with stage III colon cancer: findings from CALGB 89803. J Clin.Oncol. 24:3535-41.5. Meyerhardt, J. A., E. L. Giovannucci, M. D. Holmes, A. T. Chan, J. A. Chan, G. A. Colditz, and C. S. Fuchs. 2006. Physical activity and survival after colorectal cancer diagnosis. J Clin.Oncol. 24:3527-34.6. Schneider, C. M., C. C. Hsieh, L. K. Sprod, S. D. Carter, and R. Hayward. 2007. Cancer treatment-induced alterations in muscular fitness and quality of life: the role of exercise training. Ann.Oncol. 18:1957-62.7. Irwin, M. L. 2009. Physical activity interventions for cancer survivors. Br J Sports Med 43:32-38.8. Moore G. and Durstine 2003. Cancer. ACSM’s, Exercise Management for persons with chronic diseases and diabilities,Second ed. 169.9. Schmitz, K. H., J. Holtzman, K. S. Courneya, L. C. Masse, S. Duval, and R. Kane. 2005. Controlled physical activity trials in cancer survivors: a systematic review and metaanalysis. Cancer Epidemiol.Biomarkers Prev. 14:1588-95.

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