Watson: un superordinateur qui servira d’aide à la consultation et au diagnostic

Les médecins pourront-ils dans un proche avenir se tourner vers un robot pour les aider à poser leur diagnostic ? C’est en tout cas ce vers quoi tend IBM avec Watson, un superordinateur que ses concepteurs truffent actuellement de données médicales en vue de servir d’outil d’aide à la consultation et au diagnostic.Le Dr Martin Khon, ancien urgentologue travaillant maintenant au département de la recherche d’IBM aux États-Unis, a dressé de Watson un portrait très inspirant lors du congrès de l’Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS) consacré à l’informatisation qui a eu lieu à la mi-octobre. Le robot Watson, le superordinateur d’IBM qui a gagné à Jeopardy et fait actuellement l’objet d’un développement pour applications médicales. (Photo: Denis Méthot)Même si on parle d’un robot, Watson est en fait un ordinateur central extrêmement puissant auquel seraient reliés des terminaux que pourront utiliser les médecins depuis leur poste de travail. Il peut traiter l’équivalent d’un million de livres par seconde et on s’adressera à lui par la parole, en temps réel, ce qui simplifiera beaucoup le contact direct.Watson a fait ses preuves en 2011 en remportant un duel l’opposant aux deux meilleurs candidats du jeu télévisé américain Jeopardy. IBM travaille activement avec Nuance Communications, compagnie spécialisée en technologie de la parole et basée aux États-Unis, dans le but de mettre au point des applications permettant aux médecins et aux infirmières de traiter de gros volumes d’informations médicales.Watson a beaucoup de qualités, dit le Dr Khon. Il n’a pas de préjugés vis-à-vis des cas cliniques qui lui sont soumis, il ne se fatigue pas, il est capable de passer au crible de grandes quantités de données et de les analyser afin de répondre avec beaucoup de précision et d’assurance aux questions formulées en langage humain.Plus qu’un moteur de rechercheAujourd’hui, dit le Dr Khon, l’information dans le milieu de la santé augmente de 50 % par an. Un médecin manque de temps pour lire et traiter l’énorme volume de connaissances nouvelles qui déferle sans cesse. Dans leur pratique, les médecins pourront faire appel aux connaissances de Watson, qui disposera dans ses entrailles de millions de pages de publications et de dossiers médicaux électroniques, et dans lesquelles il ira plonger sur demande.Mais Watson sera beaucoup plus qu’un moteur de recherche. Ce sera un outil d’aide à la consultation et au diagnostic. Selon le Dr Khon, 20 % à 25 % de toutes les erreurs médicales sont des erreurs de diagnostic. Les difficultés de poser un diagnostic s’accroissent avec la complexité des cas et lorsqu’il y a plus d’un problème en cause. Watson pourra contribuer à éviter certaines de ces erreurs.Exemple : un patient vient consulter pour un type de douleurs à la poitrine. Le médecin lui pose des questions, l’examine, puis il fait le bilan à l’ordinateur afin d’obtenir son avis. Watson va fouiller dans toutes ses publications et dossiers médicaux électroniques, puis fournit un avis en quelques instants. Watson n’est toutefois pas un médecin et n’établit pas de diagnostic lui-même, précise le Dr Khon. Il émet des propositions et des suggestions. À partir de ses réponses, le médecin traitant posera son diagnostic.Ce qu'en pense un médecinLe Dr Gilles Hudon, de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), était présent au congrès afin de prendre le pouls de la progression de l’informatisation en médecine. Il a assisté avec intérêt à la description des aptitudes de Watson. Le Dr Gilles Hudon, en compagnie du Dr Martin Khon, ancien urgentologue américain qui participe au développement des applications médicales de Watson. (Photo: Denis Méthot)« Depuis que les ordinateurs sont arrivés au monde, certains médecins se demandent comment cette technologie pourrait les aider dans leur pratique. On essayait de le faire chez IBM il y a 40 ans, a commenté le Dr Hudon. Avec Watson, cette idée semble renaître. C’est un peu comme un collègue avec lequel on pourrait s’entretenir dans un hôpital pour obtenir son avis sur un patient. Watson vous dit : “Avez-vous pensé à cela ? Voici quelles seraient mes hypothèses.” »Aux États-Unis, Watson pourra notamment servir à l’orientation et à l’autorisation des traitements. Ce n’est pas le fruit du hasard si son premier client en vue est une compagnie d’assurances...Au Québec, Watson n’aura sans doute pas la même utilité. Le Dr Hudon ne croit pas qu’il sera utile pour chacun des patients que l’omnipraticien ou le spécialiste recevra dans son bureau. Il entrevoit l’application du robot pour des patients choisis et des cas problématiques. Selon lui, pour un médecin seul à l’urgence, Watson a probablement plus une valeur ajoutée que pour le cardiologue qui a 25 ans d’expérience et traite souvent les mêmes problèmes.IBM n’est pas encore en mesure de dire quand Watson sera prêt à soutenir les cliniciens dans leurs tâches, mais il y en a encore pour un certain temps avant que les médecins puissent compter sur cette nouvelle ressource. Mettre Watson en fonction dans le milieu médical n’est pas... élémentaire.Saviez-vous que...Le nom du robot Watson ne vient pas du célèbre assistant de Sherlock Holmes, le Dr John Henry Watson, comme on serait porté à le croire, mais du fondateur d’IBM lui-même, Thomas Watson.Le plus grand fait d’armes du robot Watson à ce jour a été sa participation et sa victoire au populaire jeu télévisé américain Jeopardy, en février dernier. Près de quatre ans de recherches auront été nécessaires aux équipes d’IBM pour le préparer. Au final, il a battu les deux meilleurs candidats au quiz, lors d’une historique confrontation entre humains et machine, qui a été décrite comme le match du siècle.Pour le jeu, Watson n’avait pas accès à Internet, mais il disposait d’une antisèche équivalant à 200 millions de pages... Plus de 2000 pièces de ce superordinateur grand comme une pièce de maison ont été conçues à l’usine d’IBM de Bromont, au Québec. Sa victoire à Jeopardy a valu 1 million $ à IBM, somme qui a été remise à des organismes de bienfaisance.Jeopardy n’était toutefois qu’une vitrine pour IBM visant à faire connaître les énormes possibilités de son robot. L’une des principales applications ciblées par son fabricant se situe dans le domaine médical.

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