Vaudrait-il mieux s’en tenir à la surveillance?

Le dossier des ordonnances collectives tarde à se régler et pendant ce temps les choses ne font que s’envenimer. Depuis la fin de 2008, les relations sont plutôt tendues entre l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ), le Collège des médecins et l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ). On se rappellera que les pharmaciens et les infirmières avaient signé un énoncé de position conjoint sur l’ajustement des médicaments et de la thérapie médicamenteuse. Comme à la fois les infirmières et les pharmaciens peuvent procéder à l’ajustement des médicaments, il revenait aux deux ordres d’établir des modalités de fonctionnement respectant les champs d’exercice de chaque professionnel. Cela respectait donc l’esprit de la loi 90 mise en place par le législateur.Les travaux entre les deux ordres ont eu lieu et ont donné naissance, en janvier 2007, à un énoncé de position commune dans lequel il était stipulé notamment que « l’ordonnance individuelle ou collective peut préciser que le pharmacien doit tenir compte de l’ajustement du médicament indiqué par l’infirmière » et que, si un ajustement est indiqué, l’infirmière doit en aviser le pharmacien par la transmission d’un formulaire de liaison. Ce formulaire devait permettre au pharmacien d’avoir en main l’information nécessaire pour évaluer l’ajustement et y donner suite. Dans le cas où le pharmacien aurait été en désaccord avec l’ajustement indiqué par l’infirmière, l’énoncé de position conjoint donnait toute latitude au pharmacien pour communiquer avec le médecin. Ce document important devait réduire les problèmes d’interprétation qui peuvent survenir lorsque des textes de loi ont des libellés similaires, comme cela est le cas dans la loi 90 pour ce qui concerne l’ajustement des médicaments pour les infirmières et les pharmaciens. L’énoncé conjoint devait aussi favoriser une plus grande collaboration entre les pharmaciens et les infirmières.Mais au fil de l’application de cette entente, il est apparu aux yeux de l’OIIQ que les exigences posées aux infirmières par certains pharmaciens remettaient pratiquement en question le pouvoir d’ajuster les médicaments selon une ordonnance collective qui leur avait été confié par la loi 90. La diffusion d’un communiqué de l’OPQ, stipulant que lorsqu’une ordonnance habilite deux professionnels pour des activités complémentaires le pharmacien demeure toujours responsable d’initier ou d’ajuster la thérapie médicamenteuse, a probablement conforté l’OIIQ dans le fait que, au bout du compte, les pharmaciens ne reconnaissaient pas aux infirmières le droit d’ajuster des médicaments.Comme on sait, l’OIIQ a donc fait machine arrière à la fin 2008 et a déclaré cet énoncé de position commune sur l’ajustement nul et non avenu. Ce qui a soulevé colère et indignation à l’Ordre des pharmaciens. Or, le fait est que l’OIIQ ne semble prête à aucun compromis sur la reconnaissance de la légalité pour les infirmières d’ajuster le traitement médicamenteux. Ajoutons à cela que les infirmières comptent maintenant sur l’appui massif des médecins. En effet, le Collège des médecins et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) considèrent que l’OPQ ralentit les projets de collaboration médecin-infirmière. Ceux-ci ont fait connaître leurs inquiétudes dans une lettre qu’ils ont adressée à l’OPQ. Quant au secrétaire du Collège des médecins, il ne mâche pas ses mots pour désapprouver la position de l’Ordre des pharmaciens sur le rôle des infirmières dans l’ajustement.Mais tout espoir n’est pas perdu. Les pharmaciens, comme les médecins et les infirmières, espèrent vivement qu’il sera possible de convenir rapidement d’une interprétation et d’une application acceptables pour toutes les parties concernées par l’ordonnance collective. On peut s’attendre à ce que la loi soit modifiée prochainement. Car, si elle perdurait, la situation actuelle pourrait refroidir les ardeurs des pharmaciens que le projet de développer des ordonnances collectives motive. Et ceux-ci pourraient finir par se dire : « Et si on s’en tenait à la surveillance... »

Vaudrait-il mieux s’en tenir à la surveillance?

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