Un pharmacien délivre par erreur du Suboxone à un patient âgé et l’envoie aux urgences

Le 1er avril 2023, le patient, âgé de 77 ans, se rend dans une pharmacie de Rivière-du-Loup pour renouveler son ordonnance de SublinoxMD 10 mg, un médicament qu’il prend au besoin pour l’aider à dormir. Le médicament est prêt, emballé la veille dans un sac transparent par l’assistante technique en pharmacie (ATP). Il ne reste plus au pharmacien salarié présent ce jour-là qu’à vérifier qu’il s’agit bien de la bonne plaquette. Mais ce dernier n’ouvre pas le sac en plastique pour procéder à la vérification contenant-contenu. Il lit simplement l’étiquette apposée sur le sac, qui indique bien «SublinoxMD 10 mg». Il ne s’est donc pas aperçu que le sac transparent contenait non pas le somnifère prescrit, mais du SuboxoneMD 12 mg, un médicament indiqué pour soigner la dépendance aux opioïdes.Pose d'un pacemaker à la suite de complicationsLe pharmacien en service, qui a pourtant 46 ans d'expérience, délivre alors le médicament au patient, qui le ramène chez lui. Ce n’est que trois mois plus tard, le 11 juillet 2023, que le patient prend un demi-comprimé de ce qu’il croit être son somnifère habituel, au coucher, vers 22h30. Le septuagénaire vient en réalité d’ingérer un demi-comprimé de Suboxone 12 mg, soit 6 mg du médicament, dont la dose initiale habituellement recommandée est de 2 à 4 mg.À lire aussi: Une pharmacienne n’assume pas son erreur de calcul«Le lendemain matin, soit le 12 juillet 2023, le patient se réveille et demande à son épouse de l’aider à se lever, il est alors incapable de marcher sans assistance. Il souffre de sudation accrue, de frissons, de tremblements, de nausées, de vomissements et de vision floue», indique la décision disciplinaire rendue à l'encontre du pharmacien. La femme du patient décide de retourner à la pharmacie qui lui a délivré son médicament au mois d’avril pour faire vérifier les médicaments de son époux. La pharmacienne de service l’informe qu’il ne s’agit pas de Sublinox, mais de Suboxone, et qu’il faut emmener d’urgence le patient à l’hôpital et contacter le Centre antipoison du Québec. De son côté, la pharmacienne remplit un rapport accident-incident. Le patient sera hospitalisé pendant 13 jours, et «des complications liées à cette hospitalisation mènent à la pose d’un stimulateur cardiaque (pacemaker)», rapporte la décision. Le pharmacien salarié, membre de l’Ordre depuis 1978, a reconnu les faits et a plaidé coupable, après s’être excusé auprès de la femme du patient. Il reconnaît ne pas avoir ouvert le sac transparent à glissière pour vérifier qu’il s’agissait bien de Sublinox. Le Suboxone désormais conservé dans une armoire sécuriséeLe pharmacien explique qu’à l’époque, le Sublinox et le Suboxone étaient placés l’un à côté de l’autre sur l’étagère. D’où la méprise de l’ATP. «Depuis, à la suite de son intervention auprès des propriétaires de la pharmacie, le Suboxone est conservé dans l’armoire à narcotiques», indique la décision. Le pharmacien salarié assure également avoir modifié sa pratique, et vérifie de manière plus poussée les médicaments dans les sacs transparents, sans se laisser interrompre.À lire aussi: Erreur de pilulier: une patiente reçoit un anticoagulant à la place de son antipsychotiqueAu final, les deux parties se sont entendues pour une recommandation conjointe de 4500$, qui a été acceptée par le conseil de discipline de l’Ordre des pharmaciens du Québec. Plusieurs facteurs aggravants ont été retenus :«La gravité objective de l’infraction, car celle-ci se situe au cœur de la profession. En effet, remettre le médicament prescrit constitue pour un pharmacien une obligation de résultat, toute erreur à cet égard entraîne une perte de confiance du public envers la profession;La longue expérience professionnelle de l’intimé de 45 ans au moment de l'événement;La grande vulnérabilité du patient et les conséquences sur sa santé.»Mais le conseil de discipline a également pris en considération les regrets sincères et l’absence d’antécédents du pharmacien salarié, ainsi que les mesures mises en place pour éviter qu’une telle négligence se reproduise à l’avenir.

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