Trouble d’attention et hyperactivité : Qu’en est-il du rôle du sucre et des colorants alimentaires?

En ce temps du retour en classe, plusieurs parents s’inquiètent de la capacité d’attention de leur enfant. Que le diagnostic d’hyperactivité ou de trouble de l’attention ait été posé ou non, plusieurs cognent à notre porte pour obtenir des moyens d’aider leur enfant à améliorer son degré d’attention, ou même des solutions de rechange aux stimulants. Ce sujet est plus que chaud et apporte avec lui toute une panoplie de charges émotionnelles et de controverses. Les parents nous font souvent part de leurs réactions qui vont du déni à « les professeurs font pression pour geler les enfants » en passant par « c’est chimique, je n’en veux pas pour mon enfant ». Toujours est-il qu’il est légitime de vouloir essayer autre chose avant de commencer la médication ou encore de complémenter le traitement pour en améliorer le résultat. Il faut toujours se rappeler que le but du traitement est l’amélioration de la qualité de vie et de la santé de l’enfant, pas la satisfaction d’un système. De plus, il ne faut pas minimiser la détresse des parents dans une situation comme celle-ci, car la prescription d’un stimulant pour l’enfant peut être perçue comme un échec par le parent.Avant d’aborder les outils disponibles pour les enfants et la validation qui en appuie l’usage, il faut mentionner que rien ne remplace le Ritalin. Aucun produit de santé naturel n’a le même effet pharmacologique ni la même puissance que les stimulants. En revanche, avec des mécanismes différents et des combinaisons d’ingrédients, on peut fort bien améliorer la qualité de vie de l’enfant. Lorsque le déficit d’attention est léger, il peut être possible d’éviter la prise d’un stimulant ou, chez l’enfant plus gravement atteint, de permettre un sevrage de la médication à long terme. Le premier aspect de cette démarche concerne, comme dans bien d’autres cas, l’alimentation.Allergies, sensibilités alimentaires et hyperactivitéAu début des années 1970, BF. Feingold démontre, à l’aide de 1200 cas témoins, un lien entre allergies, sensibilités alimentaires et hyperactivité. Selon le Dr Feingold, 50 % des enfants hyperactifs répondent à une diète d’exclusion. Ils seraient sensibles à des additifs alimentaires, des colorants, des saveurs et des agents de conservation de même qu’à des salicylates et des benzoates1,2. Le cas de la tartrazine, ce colorant alimentaire jaune, est bien documenté pour affecter l’attention et le comportement3. L’effet d’une diète rotation-exclusion est surtout évident chez des enfants qui souffrent d’atopie ou d’autres symptômes allergiques4.Tout récemment, une étude publiée dans Lancet a mesuré l’impact d’un cocktail contenant divers additifs et colorants alimentaires usuels sur l’attention et les symptômes d’hyperactivité. Au total, 153 enfants de 3 ans et 144 enfants de 8 et 9 ans ont suivi une diète exempte d’additifs et reçu en alternance soit un jus (placebo), soit le cocktail A (benzoate de sodium et les colorants jaune Sunset, rouge carmoisine, jaune tartrazine et rouge Ponceau 4R), soit le cocktail B (benzoate de sodium, les colorants jaune Sunset, rouge carmoisine, jaune quinolone et rouge Allura SC). Lorsque les enfants recevaient les cocktails A ou B, les chercheurs notaient une diminution de l’attention et une augmentation des symptômes d’hyperactivité par rapport à la diète sans additif5.Effet du sucreLes documents officiels et autres dépliants sur les troubles de l’attention mentionnent toujours que le sucre n’est pas impliqué dans les TDAH. Même si l’effet du sucre sur le comportement des enfants est connu de tous les parents, son effet sur les enfants hyperactifs est controversé. Plusieurs études rapportent un lien entre la quantité de sucre dans l’alimentation et les troubles de comportement. Déjà en 1980, une étude démontrait que le sucre augmente le comportement hyperactif, agressif et destructeur6.Dans une étude importante, Langseth et Dowd ont constaté que 74 % des hyperactifs (261 enfants) manifestent une réponse anormale à une hyperglycémie provoquée7. D’ailleurs, ces résultats vont de pair avec les constatations de Jane Jory, docteure en nutrition de Guelph, qui a observé une carence en chrome et une intolérance au glucose (hypoglycémie) chez les hyperactifs8. De plus, selon le Dr Jory, tous les enfants de sa cohorte qui avaient des symptômes de TDAH avaient des taux sanguins en deçà de la normale en fer, magnésium, chrome et zinc.Par contre, la plupart des sources qui nient l’effet du sucre citent l’étude de Wolraich et collaborateurs pour montrer que le taux de sucre de l’alimentation n’est pas en cause dans l’hyperactivité. Il faut savoir que, dans cette étude, la quantité de sucre ingérée par le groupe contrôle était de 5,3 cuillerées à thé par jour pour des enfants de 6 à 10 ans ! Qui plus est, dans leurs remerciements, les auteurs mentionnent une gratitude particulière envers General Mills, Coca-Cola, PepsiCo, et Royal Crown9. Il n’est pas difficile d’y déceler un certain biaisEffet du junk foodUn groupe de chercheurs a constaté que la consommation régulière d’aliments de mauvaise qualité (aliments préparés et raffinés) et de boissons gazeuses avait un impact majeur sur la santé de tous les jeunes enfants. Ce genre de diète, en bas âge, augmente de beaucoup le risque que l’enfant se retrouve dans le tiers supérieur de l’échelle de mesure des troubles de comportement et d’apprentissage. Dans leur conclusion, les auteurs mentionnent qu’ils ne peuvent pas faire de distinction entre l’effet de la mauvaise diète et le type d’éducation donnée par les parents (parenting), puisque la mauvaise diète est directement liée à un faible niveau socio-économique10.Ces quelques études démontrent que l’alimentation a clairement un lien avec le comportement. Donc, si l’enfant a un déjeuner type de Fruit Loops accompagné d’un verre de lait au chocolat, peut-être que de simples conseils nutritionnels conformes au guide alimentaire canadien (ou une référence à une nutritionniste) pourraient aider à corriger le problème. Dans le prochain article, je m’attarderai aux produits de santé naturels qui sont recommandés pour les symptômes du TDAH.Pour communiquer avec l’auteur : jean-yves.dionne@videotron.cawww.jydionne.caRéférencesFeingold BF. Introduction to Clinical Allergy. Springfield, IL: Charles C. Thomas; 1973.Feingold BF. Why Your Child is Hyperactive. New York, NY: Random House; 1975.Rowe KS, Rowe KJ: Synthetic food coloring and behavior: A dose response effect in a double-blind, placebo- controlled, repeated-measures study. J Pediatr 135:691-698, 1994Boris M, Mandel FS. Foods and additives are common causes of the attention deficit hyperactive disorder in children. Ann Allergy 1994;72:462-468.McCann D, Barrett A, Cooper A, et al. Food additives and hyperactive behaviour in 3-year-old and 8/9-year-old children in the community: a randomised, double-blinded, placebo-controlled trial. Lancet. 2007 Nov 3;370(9598):1560-7. Prinz RJ, Roberts WA, Hantman E, et al. Dietary correlates of hyperactive behavior in children. J Consult Clin Psychol 1980;48:760-769.Langseth L, Dowd J. Glucose tolerance and hyperkinesis. Fd Cosmet Toxicol 1978;16:129-133.Jory J. Thèse de doctorat en nutrition, Université de Guelph, Ontario, Canada, Communication personnelle.Wolraich M, Wilson D, White J. The effects of sugar on behavior and cognition in children: a meta-analysis. J Am Med Assoc 1995;274:1617-1621.Wiles NJ, Northstone K, Emmett P, Lewis G. ’Junk food’ diet and childhood behavioural problems: results from the ALSPAC cohort. Eur J Clin Nutr. 2009 Apr;63(4):491-8.

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