Transfert: la sécurité du patient d’abord

Transférer un patient vers un autre centre hospitalier est un geste courant pour les médecins qui exercent dans les petites salles d’urgence. Pourtant, la pratique continue de faire grimper leur stress en raison des complications bureaucratiques et des risques qu’elle présente pour le patient. C’est pourquoi les Drs François Paquet et Julien Poitras, urgentologues au CHA Hôtel-Dieu de Lévis, ont tenu à passer en revue les éléments d’un transfert réussi.Le mot d’ordre des deux conférenciers : la sécurité du patient d’abord. Transférer un patient comporte toujours des risques pour lui, surtout s’il est intubé. Parce qu’il est déplacé d’une civière à une autre, parfois plusieurs fois, et qu’on le confie à des équipes dont on ne connaît pas l’expérience. Mais aussi parce que plus le stress grimpe dans la salle d’urgence, plus on risque de ne pas voir les choses dangereuses pour le patient, comme de le laisser partir sans personne pour le ventiler, illustre le Dr François Paquet.Pas simple, les transfertsUne des façons de réduire le stress lié au transfert est d’établir des procédures et des ententes inter-établissements, soulignent les deux conférenciers. Idéalement, il devrait y avoir une procédure, connue de tous, précisant, par exemple, qui évalue la demande de transfert et comment s’organise la relève à la salle d’urgence si le médecin de l’urgence doit partir avec un patient.S’il n’existe pas de protocole à ce sujet, c’est à vous de demander au chef de département et au directeur des services professionnels d’en établir, indique le Dr Paquet.Les médecins d’urgence devraient aussi conserver à portée de main le guide d’exercice Complémentarité des services d’urgence : prise en charge des patients du Collège des médecins du Québec. « Ce n’est pas le réseau, ni les ententes, ni le confort du médecin qui accueillera votre patient qui doit régir les transferts, souligne le Dr Paquet. Mais c’est pourtant le sujet des discussions », déplore-t-il.Ces règles ou ententes visent à réduire les frictions lors des transferts inter-établissements et à diminuer les refus de patients. Pas question d’envoyer un patient qui n’a pas été accepté par un autre établissement. « Vous devez parler avec le médecin receveur, sinon la responsabilité vous incombe à 100 % », prévient le Dr Paquet. Et ce, même si vous estimez que le refus du médecin receveur n’est « pas correct », ajoute le Dr Poitras.Aux médecins confrontés à des refus répétés ou qui mettent en jeu la santé de leur patient, les deux urgentologues suggèrent de se tourner vers le cadre de garde ou le directeur des services professionnels. Ce dernier pourra alors téléphoner à son homologue pour trouver une solution. « Vous ne devriez pas mettre en danger le patient à cause de telles réponses », insiste le Dr Poitras. Un second appel au médecin qui a refusé le patient peut donner un résultat différent une demi-heure ou une heure plus tard.Une fois le patient accepté, il reste à déterminer le meilleur moyen de le déplacer, en fonction de son état : ambulance, avion ou les services de transfert inter-établissements. Pour y arriver, il faut connaître son milieu, ses règles et les ressources dont il dispose. Ainsi, un transfert non urgent vers un autre centre hospitalier pourrait être effectué par un service de transport pour éviter de monopoliser une ambulance sur un territoire où elles sont peu nombreuses.Les responsables médicaux des centres référant et receveur devraient être en communication pour que l’échange d’informations cliniques survienne avant le transfert, lorsque c’est possible. Un résumé doit aussi être transmis avec le patient pour éviter la perte d’information. Il est important de s’assurer que le patient est transféré avec le personnel et l’équipement de réanimation approprié à sa condition, souligne le Dr Paquet.Les critères de stabilisationLes patients dont la condition médico-chirurgicale est urgente et menaçante devraient être stabilisés avant d’être déplacés vers un autre établissement. La stabilisation inclut l’évaluation adéquate et le début du traitement pour que, selon une probabilité raisonnable, le transfert ne résulte par en un décès ou une perte ou une atteinte sérieuse des fonctions ou des organes, rappellent les Drs Paquet et Poitras. La stabilisation demande : le maintien de la perméabilité des voies aériennes, le contrôle d’hémorragie, l’immobilisation adéquate du malade ou du membre, un accès veineux pour l’administration de soluté ou de sang et la médication nécessaire.Accompagné ou non ?Une présence médicale au cours d’un transfert inter-établissements est nécessaire pout tout malade qui a présenté un arrêt cardiorespiratoire avant le transfert ou une instabilité des signes vitaux neurologiques (détresse respiratoire sévère, bradycardie symptomatique, hypotension artérielle, altération de l’état de conscience). Devraient être accompagnés tous les patients avec infarctus du myocarde aigu, intubés, à risque de complications par transport, avec une affection qui risque d’entraîner le décès ou une atteinte sérieuse des fonctions durant le transfert, ainsi que ceux de moins de 16 ans qui présentent un des critères précédents ou une instabilité des signes vitaux. Même chose pour les femmes sur le point d’accoucher. Dans de tels cas, le médecin devrait prévoir l’équipement nécessaire pour les soins à la mère et au bébé, soulignent les conférenciers, notamment un incubateur et un kit pour ventiler, du sang pour la mère, ainsi que les références et les protocoles de néonatalogie.

Transfert: la sécurité du patient d’abord

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes