Tragédie de Walkerton: Des facteurs génétiques accroissent les risques de maladies intestinales

Des chercheurs de l’Université McGill et de l’Université McMaster en Ontario ont découvert que la génétique avait une influence sur le développement des risques de certaines maladies intestinales chez les victimes de la tragédie de l’eau contaminée survenue à Walkerton, en Ontario, en 2000.Les chercheurs ont observé que des variations dans l’ADN de trois gènes chez cette population pouvaient accroître la susceptibilité de développer le syndrome du côlon irritable post-infectieux (SCI-PI). « Il reste beaucoup à faire pour comprendre les origines de la maladie. Par contre, nous savons maintenant que des facteurs génétiques se conjuguent aux facteurs environnementaux et qu’ensemble, ils jouent un rôle dans l’apparition du SCI-PI », explique Alexandra-Chloé Villani, étudiante au doctorat et associée de recherche en médecine expérimentale à l’Université McGill. La doctorante a mené ses travaux sous la direction des chercheurs John K. Marshall, de l’Université McMaster, et Denis Franchimont, anciennement associé à McGill, avec la collaboration de Stephen Collins, également de l’Université McMaster.Rappelons que l’Université McMaster a accompagné la population de Walkerton depuis le drame et elle travaille aujourd’hui de concert avec elle à établir des hypothèses, à déterminer des causes et éventuellement à trouver des solutions pour améliorer la santé de la petite communauté d’à peine 10 000 habitants affectée par les bactéries Escherichia coli et Campylobacter jejuni, présentes dans le réseau d’alimentation en eau potable. En 2000, sept personnes sont décédées des suites de la contamination et au moins 2300 personnes ont souffert de symptômes infectieux. De ce nombre, 36 % ont développé le SCI-PI, un pourcentage élevé, qui place Walkerton au rang des municipalités les plus affectées par cette maladie.Le SCI-PILe SCI-PI est un trouble intestinal d’apparition aiguë qui suit un épisode de gastroentérite. Les patients présentent alors des douleurs abdominales chroniques, un inconfort digestif, des ballonnements et des problèmes de défécation, a observé le Dr Marshall.« Les personnes affectées n’avaient aucun problème médical avant la contamination. Nous nous sommes donc demandé s’il y avait des antécédents génétiques. Notre découverte nous permet de comprendre que ces gènes ont des implications biologiques sur le développement de maladies », poursuit Mme Villani.La chercheure compte interroger l’ensemble du génome humain pour déterminer s’il y a d’autres gènes impliqués dans le développement de la maladie et ainsi mieux définir les mécanismes à son origine. Les recherches permettraient de déterminer si un patient est porteur de d’autres variations génétiques qui affaiblissent son système immunitaire et le rendent ainsi plus vulnérable face à divers facteurs de pollution environnementale. « Ces informations sont essentielles pour innover dans les processus thérapeutiques. En ajoutant des détails à la carte des gènes impliqués, cela améliorera la prise en charge des patients », espère-t-elle.Cette étude génétique, unique au monde selon Mme Villani, est conduite grâce à la collaboration bien généreuse de la population de Walkerton qui accepte de consacrer du temps pour participer à des études de toutes sortes. Cette communauté est devenue en quelque sorte un grand laboratoire de recherche pour de nombreuses équipes médicales et socio-environnementales canadiennes. Un comité de citoyens, le Walkerton Concerned Citizens, travaille également à diffuser plusieurs données dans la communauté, afin de soutenir les prises de décision politique qui, à la fois, pourraient améliorer la prévention en matière de santé publique et les choix de développement économique. En fait, la tragédie de Walkerton sert à rappeler que la négligence en matière de santé publique peut provoquer des incidences sanitaires pendant de très nombreuses années, pour ne pas dire pendant des générations.Les résultats de l’étude ont été publiés dans le numéro d’avril 2010 de la revue Gastroenterology (www.gastrojournal.org).

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