Ententes à partage de risque pour permettre l’accès à de nouveaux médicaments anticancéreux

Pour assurer un meilleur accès aux nouveaux médicaments oncologiques indiqués en fin de vie et jugés prometteurs mais ne satisfaisant pas aux critères de justesse du prix et d’efficacité, un comité de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) recommande que le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) se dote de l’expertise qui lui permettrait de négocier des ententes de partage de risque avec les compagnies pharmaceutiques.À la suite des vives critiques qui avaient suivi son refus d’inscrire certains antinéoplasiques aux Listes de médicaments, à la fin de 2011, parce qu’ils ne satisfaisaient pas aux critères économique et pharmaco-économique, le Dr Yves Bolduc, alors ministre de la Santé et des Services sociaux, et le président-directeur général de l’INESSS, le Dr Juan Roberto Iglesias, s’étaient entendus pour que l’INESSS mette en place un comité pour réfléchir à l’évaluation de ce type de médicaments aux fins d’inscription sur les listes. Ce comité a rendu son rapport public l’automne dernier.« Ce comité visait à trouver de nouveaux mécanismes pour gérer l’innovation médicamenteuse au Québec [dans le domaine de l’oncologie en fin de vie], une réalité qui existe partout dans le monde », indique à L’actualité pharmaceutique le Dr Stéphane P. Ahern, président du Comité d’évaluation des innovations – volet cancer en fin de vie et président du Comité scientifique permanent de l’évaluation des médicaments aux fins d’inscription (CSEMI) de l’INESSS.Formé d’experts issus d’horizons divers (dont le milieu de la pharmacie), ce comité était composé d’oncologues membres du Comité de l’évolution des pratiques en oncologie (CEPO) du MSSS, de citoyens, d’éthiciens, de représentants des patients, d’experts du réseau de la santé, de scientifiques et de membres des comités scientifiques permanents de l’INESSS, précise le Comité dans son rapport.Neuf recommandationsRappelons que, selon la Loi sur l’INESSS, pour qu’un médicament soit inscrit sur les Listes de médicaments, il doit satisfaire d’abord le critère de la valeur thérapeutique du médicament, puis les quatre critères suivants : justesse du prix, rapport coût-efficacité, conséquences sur la santé de la population et sur les autres composantes du système de santé, et objet du régime général d’assurance médicaments. Or, dans le cas des nouveaux médicaments oncologiques administrés en fin de vie, ces critères ne conviennent pas.Prenant bonne note de son mandat, le Comité mis en place par Yves Bolduc et Juan Roberto Iglesias propose neuf recommandations qui s’adressent au MSSS, à l’INESSS et aux établissements de santé ayant une mission en oncologie. La plus importance des recommandation suggère « que le MSSS mette en place, en collaboration avec l’INESSS, les mécanismes nécessaires pour assurer un meilleur accès aux médicaments à caractère jugé prometteur, en se dotant d’une expertise dédiée à la négociation des ententes de partage de risque » avec les compagnies pharmaceutiques.« Après avoir examiné toute la problématique, on pense que c’est la voie pour permettre l’accès à ces médicaments, à un coût raisonnable pour nos concitoyens », explique à L’actualité pharmaceutique le Dr Gilles Pineau, coordonnateur de l’Unité d’évaluation en oncologie à l’INESSS. Ces ententes, signées entre un gouvernement et une compagnie pharmaceutique, visent à contenir l’ensemble du budget des médicaments.Le Dr Stéphane Ahern résume ainsi l’argumentaire du gouvernement : « Votre molécule, vous nous la vendez à tel prix, mais nous trouvons que nous assumons beaucoup de risques financiers dans cette démarche. Nous voulons l’offrir à nos patients, mais nous trouvons qu’elle nous coûte trop cher pour ce qu’elle apporte comme qualité de vie. Si nous investissons tout notre argent, il ne nous en restera plus pour traiter d’autres patients. »Ce genre d’ententes existe déjà en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique, ainsi que dans d’autres pays comme le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.Le Comité suggère aussi que l’INESSS maintienne à l’étude pour un maximum de six mois un médicament jugé prometteur dans un contexte de fin de vie en oncologie. Durant cette période, l’INESSS, en collaboration avec les parties concernées, évaluera les moyens de développer la preuve et l’entente de partage de risque financier. L’INESSS fera ensuite part au ministre de ses recommandations quant à l’inscription du médicament.Il recommande aussi « que les établissements de santé ayant une mission en oncologie soient soutenus par le MSSS dans la mise en place de banques de données permettant de colliger de l’information (molécules, indications thérapeutiques, dosages, durées de la thérapie) pour favoriser l’usage optimal et le suivi systématique des médicaments ».L’INESSS a déjà mis en place certaines des recommandations du Comité, notamment la consultation et la participation de patients et de groupes de patients à ses travaux d’évaluation des médicaments.Aucune décision prise par le ministreLe ministre de la Santé Réjean Hébert n’a pas encore révélé s’il ira de l’avant avec les ententes de partage de risque. Il analyse toujours le rapport. Selon son attachée de presse, Ariane Lareau, deux principes le guideront : conserver une équité dans le régime d’assurance médicaments mixte (public-privé) et assurer une transparence du processus.Le rapport Nouveaux mécanismes permettant l’accès à des médicaments à caractère jugé prometteur en oncologie : innovation, accès, responsabilité, partage des risques et pérennité est disponible sur le site de l’INESSS (inesss.qc.ca).

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