« Si rien n’est fait, les services dont nous avons bénéficiés ne pourront pas être offerts à nos petits-enfants »

Les systèmes de santé ressemblant à celui du Canada risquent de s’écrouler financièrement et ne pourront plus remplir leur mandat de soigner la population si rien de majeur n’est fait pour corriger la situation.Ce constat — en apparence fataliste — est en fait un appel à la mobilisation lancé par le gestionnaire Robert J. Bell, chef de la direction de la Royal Brompton & Harefield NHS Foundation Trust, un hôpital de Londres spécialisé en cardiologie et en pneumologie.Robert J. Bell était l’un des invités du congrès annuel de l’Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS), qui se déroulait du 7 au 9 mai à Québec.« Les systèmes de santé comme les nôtres ne sont pas capable de s’autofinancer, a-t-il expliqué à Profession Santé lors d’un entretien réalisé avant la conférence qu’il prononçait. Nous sommes sur le point d’atteindre une limite où, si rien de majeur n’est fait, les services dont nous avons bénéficiés ne pourront pas être offerts à nos petits-enfants. »Pour montrer le sérieux de la situation, Robert J. Bell fait l’analogie avec un mur de verre. « Nous voyons ce qu’il y a de l’autre côté de ce mur pour continuer d’offrir des soins pour tous, mais il nous faut maintenant le briser pour continuer d’avancer », a-t-il souligné.Le gestionnaire rappelle que le Canada consacre environ 11 % de son produit intérieur brut à son système de santé, tandis que le Royaume-Uni y consacre 8 %, selon les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).Or, dans les deux cas, les dépenses en matière de santé ont tendance à croître d’environ 3 % par année, alors que l’augmentation en productivité est de l’ordre de 1 %. « Ce n’est pas un système pérenne », constate le gestionnaire.D’importants changements doivent se produire, prévient Robert J. Bell, si les États veulent continuer de respecter les valeurs à la base de leurs systèmes de santé, dont le caractère public de leur administration et l’universalité des soins.Ses solutionsPlusieurs solutions existent pour permettre de garantir la survie ce type de système de santé comme ceux développés au Canada et au Royaume-Uni, dans la foulée de la fin de la Deuxième Guerre mondiale.Premier remède, selon Robert J. Bell : favoriser la prévention et les saines habitudes de vie. « Ça paraît être une évidence pour la majorité d’entre nous. Sauf que personne n’investit réellement autant qu’il le devrait dans ce secteur. Par exemple, nous consacrons encore l’essentiel de nos énergies à traiter les maladies chroniques plutôt qu’à les prévenir. »Le second remède, à son avis, est plus controversé : reconnaître que l’État ne peut pas payer pour tous les services offerts, ce qui suppose qu’une contribution des patients est nécessaire.Robert J. Bell est cependant formel : recourir à des tickets modérateurs ou à l’augmentation des impôts ne sont pas de bonnes façons de faire. Comme dans le système de santé britannique, il privilégie plutôt une approche où les patients hospitalisés désirant une chambre seule ou de meilleurs repas peuvent payer un excédent.D’ailleurs, Robert J. Bell ajoute que ce mode de fonctionnement est largement employé dans les centres d’hébergement pour les personnes âgées et que cela ne soulève aucune controverse.« À l’époque, nos systèmes hospitaliers ont été conçus pour répondre à une masse importante de travailleurs. Or, le portrait a changé avec le vieillissement de la population et ce modèle n’est plus conforme à la réalité d’aujourd’hui. »Le troisième remède proposé par Robert J. Bell consiste à se concentrer davantage sur l’atteinte de résultats concrets pour la santé des citoyens plutôt que de se limiter à des considérations de nature financière.« Nos gestionnaires et nos politiciens se penchent sur les réformes de structures pour obtenir des gains d’efficacité. Or, obtient-on de meilleurs résultats sur l’espérance de vie avec ces mesures ? Cela devrait pourtant être la priorité de nos systèmes de santé. »

« Si rien n’est fait, les services dont nous avons bénéficiés ne pourront pas être offerts à nos petits-enfants »

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