Santé Québec: les patients partenaires, les grands oubliés?

La deuxième édition des Rendez-vous du Collège s’est tenue mardi en ligne devant les près de 1800 personnes inscrites à l’événement. Animée par Emmanuelle Latraverse, cette édition avait pour objectif de créer une plateforme d’échanges entre usagers, médecins, gestionnaires, universitaires et analystes à propos de la création de Santé Québec. Plusieurs se sont entendus pour dire que la réforme proposée par le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, est davantage une réforme de structure qu’une réforme «humaine». «La réforme aurait davantage dû être basée sur le besoin des gens», croit Sylvie Tremblay, directrice générale du Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU). Claudia Houle, patiente partenaire experte et membre du comité sur la collaboration en santé et du groupe de travail sur la télésanté du Collège des médecins, a abondé dans le même sens. «Je n’ai pas vu les patients partenaires particulièrement impliqués et reconnus dans le projet de loi 15. On parle beaucoup d’efficacité et de performance dans le réseau. C’est presque épeurant de lire cela. Est-ce que ça veut dire qu’on va passer les patients plus rapidement?», s’interroge-t-elle. Elle ajoute également que la vision des patients partenaires est un peu comme celle des systèmes d’évitement de collisions des voitures. «Nous voyons les angles morts de ce qui ne fonctionne pas dans le réseau», indique Mme Houle. «Nous sommes là, sur le terrain. Nous vous demandons d’être là avec vous pour améliorer le système de santé», a renchéri Sylvie Tremblay. Un peu plus tard lors des échanges, David Levine, ancien président-directeur général de l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal et ex-ministre délégué à la Santé, a également été invité à commenter le projet de loi. «Les patients sont la seule voix politique pour influencer le gouvernement qui est noble, car ils n’ont pas d’intérêts syndicalistes ou corporatifs. Ils doivent être une voix forte», a-t-il affirmé. Responsabilité populationnelle et accessibilité Ce dernier s’est par ailleurs avoué être assez pessimiste en ce qui a trait à la possibilité que le projet de loi améliore réellement l’accès aux soins. «On ne voit pas encore les détails dans le projet de loi qui vont réellement faire des changements», croit-il. Avec son projet de loi, Christian Dubé souhaite en effet améliorer l’accessibilité aux soins en indiquant que les médecins doivent avoir une «responsabilité populationnelle», en ce qui a trait entre autres aux services offerts aux patients en régions plus éloignées, par exemple. Le Collège des médecins a toutefois rapidement répondu que la responsabilité sociale collective doit être assumée par les médecins, mais aussi par les autres professionnels de la santé. «Il y a une ouverture de la part de la communauté médicale pour faire en sorte que nous soyons plus responsables pour répondre aux communautés que l’on doit desservir, mais cette responsabilité sociale est pour tous les professionnels de la santé et pas seulement pour les médecins», a réitéré le Dr Mauril Gaudreau, président du CMQ. «Le projet de loi 15 est axé sur les hôpitaux, mais il faut aussi sortir des hôpitaux pour offrir des soins de proximité et rendre l’accès à la première ligne plus facile», a-t-il ajouté. À lire aussi: Projet de loi 15: le CMQ préoccupé Le Dr Martin Beaumont, président-directeur général du CHU de Québec, croit au contraire que le projet de loi permettra d’augmenter l’accessibilité aux soins et accueille le projet de loi favorablement. «Avec ou sans le projet de loi, l’accès demeure notre obsession première», dit-il, en ajoutant que le projet de loi permettra de servir de levier pour accentuer la collaboration entre le public et le privé, et qu’il donnera davantage de légitimité pour la couverture de certains territoires en favorisant la responsabilité sociale et collective. «La voix des patients demeure l’élément central de l’amélioration des services. Il faut continuer de faire entendre leurs voix», a-t-il reconnu. Et les facultés? Selon les Drs Patrick Cossette, doyen de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et Dominique Dorion, doyen de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke, les facultés de médecine ont également été un peu mise de côté dans l’élaboration de la loi et des discussions l’entourant. Selon le Dr Cossette, les facultés sont depuis plusieurs années bien impliquées dans le processus de responsabilisation sociale, et qu'il s’agit là d’une culture bien implantée. «Chaque université a au moins un campus délocalisé. Ces campus sont dans des endroits où il y a des pénuries de médecins, pour qu’il y ait plus de chances qu’ils s’établissent là par la suite ou dans une région similaire», a-t-il rappelé.

Santé Québec: les patients partenaires, les grands oubliés?

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes