Santé Canada veut faire porter la responsabilité de la marijuana médicale aux médecins, affirme l'AMC

L'Association médicale canadienne (AMC) dénonce les modifications que le gouvernement fédéral compte apporter à la réglementation du Programme fédéral d’accès à la marijuana à des fins médicales.D'après les propositions annoncées le 16 décembre par la ministre fédérale de la Santé, Leona Aglukkaq, à partir de mars 2014, Santé Canada pourrait ne plus administrer le programme et confier la production de marijuana thérapeutique au secteur privé.Pour se procurer de la marijuana légalement, les consommateurs autorisés doivent actuellement s'adresser à un seul producteur, qui a un contrat exclusif avec Santé Canada. Ils ont également le droit de faire pousser de la marijuana chez eux ou d'en confier la culture à un proche.Le nouveau système mettrait en place des permis autorisant la culture de la marijuana dans des lieux où les consommateurs pourraient acheter le produit s'il a été prescrit par un médecin.«Rédiger des ordonnances les yeux fermés»Selon l'AMC, ces changements auraient pour effet de dégager Santé Canada de son rôle actuel, qui est, notamment, de confirmer la sécurité et l’efficacité de la substance.L'Association estime aussi que cela rejetterait sur les médecins la tâche de gérer une substance pharmacologique à l’égard de laquelle il existe très peu de données cliniques.«Non seulement la prescription de drogues qui n’ont pas été soumises à des tests cliniques est-elle contraire à la formation et à l’éthique médicales, mais les avantages éventuels ou les effets secondaires de la marijuana n’ont pas été vérifiés par des tests rigoureux, a déclaré la Dre Anna Reid, présidente de l’AMC, qui précise que la marijuana provoque des psychoses chez certains adolescents.«La décision du gouvernement fédéral revient à demander aux médecins de rédiger des ordonnances les yeux fermés, a ajouté la Dre Reid. Nous avons communiqué nos préoccupations à Santé Canada au cours de ses consultations, mais il semble que nous n’ayons pas été bien entendus.»«Soyons clairs: la marijuana d’aujourd’hui n’est pas la même que celle du passé. Les variétés sont très puissantes et différentes variétés ont des effets différents, a expliqué la Dre Reid. Les patients ne voudraient pas que nous prescrivions des médicaments pour le cœur, contre le cancer ou pour soigner toute autre maladie sans avoir les preuves scientifiques à l’appui de l’utilisation de ces drogues. Pourquoi le gouvernement fédéral veut-il que nous le fassions pour la marijuana?»Le Collège des médecins québécois (CMQ) s'est aussi exprimé contre la réforme du Programme d’accès à la marijuana à des fins médicales et contre la responsabilité que cette dernière fait porter aux médecins (voir notre article).Vers une augmentation des prixLes changements proposés par le fédéral ont été accueillis plus favorablement par la Société pour l’accès au cannabis médical (SACM), basée à Montréal, selon qui ils témoignent de «la convergence d’un mouvement de justice sociale fleurissant avec un secteur commercial émergent».C'est pour le prix de la marijuana thérapeutique que la SACM a des inquiétudes. «La résiliation des licences de production personnelles est particulièrement coercitive en l’absence de couverture des coûts», a expliqué par voie de communiqué son président, Adam Greenblatt.Comme l'indique La Presse canadienne, le prix de la marijuana se situe en ce moment entre 1,80 $ et 5 $ le gramme.Il pourrait faire un bond et se vendre 8,80 $ le gramme quand la nouvelle réglementation entrera en vigueur et que le gouvernement cessera de subventionner le programme.Les Canadiens ont accès à la consommation de marijuana à des fins thérapeutiques depuis 1999. En 2002, 477 personnes se prévalaient de ce programme. Ce nombre était passé à 21 986 en août dernier.La plupart des consommateurs cultivent leur propre marijuana ou l'achètent auprès d'un fournisseur, pas auprès du gouvernement.Le gouvernement fédéral met en avant le coût du programme, indiquant qu'il a déboursé 16,8 millions $ entre 2010 et 2013, sans compter les taxes, pour offrir ce service. Une année supplémentaire coûterait 9,7 millions $.Le gouvernement a tiré un revenu de 1 686 600 $ en 2010-2011 pour la production et la vente.

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