Sanctionnée pour avoir servi un antipsychotique sans respecter les exigences

Pharmacienne depuis 30 ans, Manon St-Jean a servi, les 5 février et 15 mars 2020, de la clozapine à son patient qui l’utilisait pour contrôler sa schizophrénie. Cet antipsychotique de deuxième ligne «doit être réservé aux patients qui manifestent une résistance ou une intolérance aux médicaments antipsychotiques traditionnels». Les effets indésirables importants du médicament nécessitent des suivis plus fréquents et des analyses hématologiques régulières. Ainsi, le patient qui l’utilise doit être inscrit au réseau de suivi et surveillance Gen-Clozapine Accès-Réseau et faire des tests sanguins régulièrement. Or, ce n’était pas le cas pour le patient servi par la pharmacienne St-Jean. Selon le conseil de discipline de l’Ordre des pharmaciens du Québec, les infractions reprochées à l’intimée découlent de gestes qui sont les pierres angulaires de l’exercice de la profession de pharmacien. C’est-à-dire, «servir et exécuter l’ensemble des vérifications nécessaires en lien avec la thérapie médicamenteuse pour assurer sa santé et sécurité». Même si c’est le pharmacien salarié Quac Nguyen qui reçoit et signe l’ordonnance de la Dre Sophie Mourey le 4 février en fin d’après-midi, c’est Manon St-Jean qui inscrit au dossier patient le lendemain «Confirmer vérification en lot». Cette inscription, faite avant que le pharmacien Nguyen arrive au travail, est le signal électronique qui valide les ordonnances, selon la syndique adjointe. «Les faits révèlent donc que c’est l’intimée qui prend le panier préparé avec la clozapine, vérifie le contenu et la dose, ainsi que l’ordonnance initiale et finalise le tout», indique la décision disciplinaire. Tout ça, sans que le patient de 59 ans ne soit inscrit au réseau GenCAR et sans que la pharmacienne propriétaire, qui pratique sous la bannière Jean Coutu, n'ait reçu les résultats des tests sanguins. Pas de simples exécutants La syndique adjointe a fait valoir que les pharmaciens ne sont pas de simples exécutants, mais des spécialistes du médicament, et qu’ils sont responsables de chacun des actes. «Ils ne peuvent pas, en défense, faire valoir que l’acte n’a pas été correctement exécuté par un tiers, car l’entière responsabilité leur incombe». Devant le conseil de discipline, la pharmacienne a affirmé qu’elle croyait que c’était le pharmacien Nguyen qui avait effectué toutes les vérifications nécessaires pour l’exécution d’une ordonnance de clozapine. Pour la syndique adjointe, l’intimée n’a pas utilisé son jugement professionnel en tenant pour acquis que l’évaluation de l’usage approprié de la clozapine et les vérifications requises avaient été faites par le pharmacien Nguyen. Une preuve non équivoque Selon le conseil de discipline, «la preuve démontre de manière non équivoque que c’est l’intimée qui a exécuté les ordonnances». Le Tribunal ajoute que même si certaines tâches sont exécutées par plusieurs employés au sein d’une pharmacie, le réflexe du pharmacien doit toujours être de vérifier et d’évaluer l’ordonnance, surtout en présence d’un médicament sous surveillance étroite. «Or, l’intimée n’a pas évalué la thérapie médicamenteuse ni vérifiée si son patient était inscrit au réseau GenCAR ou les résultats de son bilan sanguin à deux reprises contrairement à une norme bien établie de sa profession», indiquent les trois membres du conseil de discipline. Pour imposer la sentence, ceux-ci ont pris en considération notamment la nature objective très grave des infractions reprochées, la dangerosité élevée de la clozapine, le caractère répétitif du geste, la grande vulnérabilité du patient et le risque de récidive de la pharmacienne considéré comme étant modéré.

Sanctionnée pour avoir servi un antipsychotique sans respecter les exigences

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