Saint-Jean-sur-Richelieu - La pédiatrie sociale, pas à pas...

La Dre Sonia Péloquin n’en revient pas. Comme médecin, elle peut compter sur un appui concret plus solide, avec les bénévoles au quotidien, que celui qu’elle peut espérer en exerçant dans le réseau public. Et pour cause, dit-elle, car dans les CLSC ou ailleurs, on a trop coupé dans le personnel. « En pédiatrie sociale, nous sommes en plein essor, c’est prometteur et gage d’une plus grande efficacité. »La Dre Péloquin est PDG et directrice clinique de L’Étoile, centre de pédiatrie sociale en communauté du Haut-Richelieu. Au-delà de l’aide tangible des bénévoles, elle dit apprécier que tous – gens du communautaire, des établissements et du corporatif – parlent le même langage et poussent dans le même sens, soit le bien-être des enfants.Bâtir des pontsLe Centre a ouvert ses portes en mai 2010, dans un bâtiment cédé par la municipalité de Saint-Jean-sur-Richelieu. Il se trouve en plein centre-ville, dans un milieu social qui s’effrite, précise la médecin. Le Centre a su mobiliser l’énergie de près de 150 bénévoles, dont une centaine sont actifs sur une base régulière.La Dre Péloquin est « prêtée » pour la pédiatrie sociale par le CSSS Haut-Richelieu. « Souvent, le milieu médical, déjà en pénurie, s’étonne que nous accordions une telle importance au volet psychosocial. Cela va avec la conviction que les problèmes de santé sont autant psychosociaux que physiques. Pour notre part, nous avons choisi d’établir des ponts entre ces deux mondes. La pédiatrie sociale, en un sens, c’est de la médecine familiale à son meilleur. »Le fait qu’un médecin s’implique dans un milieu, poursuit la Dre Péloquin, et qu’il fasse partie d’une équipe professionnelle très serrée, donne plus de crédibilité à un projet qui repose sur la proximité des services. Pour le reste, « il s’agit de bien s’entourer et de savoir déléguer ».CheminementL’arrivée de ce médecin en pédiatrie sociale est le résultat d’une longue quête personnelle. La Dre Péloquin a exercé pendant 15 ans en CLSC et en CHSLD à Farnham, en Montérégie. Nombre de personnes âgées, dit-elle, souffraient alors d’un manque d’accompagnement, qu’aucune pharmacologie ne pouvait compenser. Après avoir vécu une série de deuils, ces gens âgés voulaient vivre paisiblement leur fin de vie, sans toujours trouver toutefois le climat propice.Au CLSC, elle souffrait par ailleurs de voir le personnel s’essouffler devant l’ampleur de la tâche à accomplir auprès des clientèles vulnérables : manque de suivi médical des enfants, difficulté à rejoindre les familles et d’aider réellement parfois aussi, au-delà du seul signalement des enfants en danger.La Dre Péloquin a également travaillé au comité d’allaitement de l’Hôpital Brome-Missisquoi-Perkins*, à Cowansville. Elle a pu y mesurer toute l’importance que revêt pour un enfant le fait d’être allaité, ou de ne pas l’être. « Tout ce décalage entre ce que la nature a prévu et ce qu’impose notre mode de vie, en bonne partie artificiel, fut pour moi une révélation. » Cette prise de conscience s’est révélée décisive pour la mener vers la pédiatrie sociale.Réponse du milieuAlors, elle a retroussé ses manches. « J’ai dû faire tout un travail administratif pour lequel je n’étais pas préparée. » Mais la réponse du milieu a été telle qu’elle s’est sentie pousser des ailes. « On a réussi à percer dans le milieu communautaire et on est allé chercher un mentorat d’affaires. » Surtout, dit-elle, la pédiatrie sociale est parvenue à mobiliser, pour sa mission directe, les forces vives de Saint-Jean-sur-Richelieu. « L’aide ponctuelle d’un voisin ou d’un bénévole par exemple suffit souvent à secourir une famille. Mais encore faut-il s’organiser pour la rendre disponible. »Et il ne s’agit pas forcément d’actions d’éclat. Ainsi, de petits commerçants collaborent à l’œuvre sociale. L’un d’entre eux fournit de la pâte à muffin et à biscuits que cuisent chaque semaine des enfants d’une école secondaire. La nourriture est ensuite distribuée aux enfants les plus nécessiteux. Le Centre a par ailleurs conclu une entente avec certaines écoles et organismes de justice alternative, pour que des jeunes y effectuent des travaux d’entretien.Convictions« La pédiatrie sociale réunit autant mes convictions scientifiques que personnelles, comme femme d’action. Tout cela converge vers des résultats, poursuit la Dre Péloquin. Quand je vois que tous – CSSS, commission scolaire, CLSC, DPJ, etc. –, nous arrivons le plus souvent à dépasser nos traditionnels clivages, je me dis qu’il faut continuer. Inlassablement, nous allons sur la place publique, pour parler au nom des enfants. »La pédiatrie sociale retisse des liens oubliés en cours de route, résume la Dre Péloquin. « Et surtout, elle a la vue d’ensemble. Du fait par exemple que des professeurs assistent parfois aux rencontres avec les familles, les enfants et l’équipe médicale, on se sent moins seuls dans la détresse. »Formidable laboratoire social, conclut la médecin, la pédiatrie sociale permet d’expérimenter les choses à petite échelle, en apprenant aux gens vulnérables, par exemple, à savoir formuler leurs besoins. « Et ça, ça contribue à rapprocher des services psychosociaux du réseau public ceux qui n’y iraient pas naturellement. »* Premier établissement au Canada à avoir reçu l’agrément « Ami des bébés » en 1998.Lire la suite du dossier «La pédiatrie sociale fait aussi sa place en région»

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