Résidents en détresse: appeler le PAMQ au moindre doute

Le Dr Claude Rajotte, médecin-conseil du Programme d'aide des médecins du Québec (PAMQ), espère que la mort d’Émilie Marchand aidera les médecins et les résidents à consulter s’ils ont besoin d’aide. Le simple fait qu’ils se sentent interpelés par ce qui a été écrit dans La Presse à ce sujet devrait être un motif suffisant d’appel.Selon lui, plusieurs résidents ou étudiants n’osent pas consulter parce qu’ils jugent que leur problème est mineur, pas important, qu’ils ne sont pas en situation de maladie sévère ou grave ou encore que leur problème est académique.«Si vous avez un doute, on est là pour vous aider, on est là pour vous écouter et, si besoin, pour vous aider à trouver les ressources adéquates», rappelle le médecin-conseil.Même si de plus en plus de résidents contactent le PAMQ, encore trop d’entre eux n’osent pas le faire par peur de stigmatisation ou par crainte d’un impact dans leurs évaluations. Pourtant, l’organisme a instauré une politique stricte de non-divulgation de renseignements à des tiers. Et il est entièrement autonome et indépendant des fédérations et organismes médicaux, du Collège des médecins et des facultés de médecine.«On fait un effort immense et de tous les instants pour s’assurer que la confidentialité soit sauvegardée», précise le Dr Rajotte. Au siège du PAMQ, il y a même deux salles d’attente, pour que ceux qui viennent y chercher de l’aide ne se croisent pas les uns les autres.Certaines personnes appellent aussi pour dire qu’un de leurs collègues a un problème et qu’elles ne savent pas comment réagir. Les médecins-conseils peuvent alors donner certaines pistes d’approche ou d’amorce pour les aider à inciter leur collègue à consulter.Le Dr Rajotte recommande ainsi de «mentionner votre inquiétude, mentionner que vous ne le trouvez plus comme avant, de mentionner aussi que le programme d’aide est un service complètement confidentiel».Aussi, quand le PAMQ propose des ressources, il s'assure que les personnes concernées ne travaillent pas dans le milieu académique. L’organisation fait ainsi appel à des médecins dans la communauté et non pas à des médecins des milieux universitaires. Pas de risque donc pour un résident de se retrouver lors d’un futur stage avec un médecin qu’il a consulté.Il faut aussi parfois rappeler à un résident qu’à la clé de son épuisement ou de sa détresse, il peut y avoir des conséquences pour les patients.«Ne pas donner le bon traitement ou faire une erreur médicale, c’est difficile pour tout le monde, mais en début de carrière, ça l’est encore plus et parfois nous conseillons à une personne qui nous appelle pour un collègue d’utiliser cet argument en espérant qu’elle va être capable de trouver les bons mots pour convaincre l’autre de consulter», explique le médecin-conseil.Peur de ne plus avoir d’assurancesSur Twitter, le Dr David Lussier, expliquait par ailleurs que les médecins résidents ne consultaient pas pour leurs problèmes psychologiques parce qu’ils risquent de perdre leur couverture pour assurance invalidité s’ils consultent pour problèmes psychologiques.Une information que confirme le Dr Rajotte. «C’est effectivement un des gros problèmes avec lesquels on se bat.»Cette information est donnée au début des études en médecine, mais trop peu en tiennent compte. «Comme toujours en matière d’assurances, la couverture est toujours plus grande et toujours moins cher quand on est jeune et en bonne santé et qu’on n’a pas de problème», déclare le Dr Rajotte.Si des problèmes de santé se sont déclenchés pendant la résidence, les médecins sont obligés d’en faire mention au moment de prendre une nouvelle assurance après qu’ils soient diplômés. Pendant la résidence, ils sont protégés par une assurance collective invalidité, mais ce n’est plus le cas une fois qu’ils sont travailleurs autonomes.«Avant même que les stages cliniques débutent, il faudrait dire aux étudiants que c’est important de prendre une assurance invalidité car quand ils auront gradué, ils seront travailleurs autonomes. Et aussi bien la contracter toute suite, parce que s'ils ont un problème plus tard, au moins ils auront déjà leur police d’assurance», explique le médecin-conseil.C’est donc avant même d’entrer en résidence que les étudiants en médecine devraient se soucier de cette question.Car, veut, veut pas, c’est souvent pendant leurs études que se déclenchent les problèmes. Un magnifique texte d’une médecin américaine, la Dre Pamela Wible, en fait mention: les jeunes médecins ou étudiants en médecine qui se sont suicidés étaient tous en santé quand ils ont commencé leurs études.Selon elle, le simple fait de remettre en cause la façon dont on sélectionne les étudiants en médecine est en quelque sorte une façon de mettre le blâme sur les victimes, au lieu de regarder du côté des facultés de médecine, de la résidence, des cliniques, des hôpitaux et du système de santé. Elle propose d’ailleurs toutes sortes de solutions qui commencent avec la volonté de se poser des questions sur ces suicides, en tant que société, médecin et non-médecin, et toutes sortes de mesures de prévention, comme l’utilisation de la communication non-violente, la mise en place de groupes de discussion professionnels, etc.Le PAMQ vient de refaire son site, c'est l’occasion d’aller le visiter et d’y consulter sa documentation. À lire notamment: Lors d’une situation de crise en milieu de travail, peut-on ne pas avoir de réactions? Un document rédigé par la Dre Anne Magnan, directrice du Programme d’aide aux médecins du Québec, et Hélène Bélanger, psychologue.Et si vous en ressentez le besoin, les numéros de téléphone du PAMQ sont les 514 397-0888 et 1 800 387-4166.

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