Régimes de retraite individuels: Coup de circuit ou beaucoup de bruit pour rien ?

« Le travailleur autonome doit organiser son plan de retraite et d’assurance s’il ne veut pas se retrouver à la fin devant pas grand-chose », rappelle Julie Gauthier, planificatrice financière chez Gestion financière MD, une entreprise qui offre des services de planification financière aux médecins et à leur famille. Comme leur entrée sur le marché du travail est tardive, plusieurs médecins commencent à parler de retraite avec leur planificateur financier dès le début de leur carrière. Or, il n’est pas facile de s’y retrouver parmi les différentes possibilités de régimes qui s’offrent à eux, surtout que « les généralités en matière de retraite s’appliquent très peu aux médecins », souligne Julie Gauthier. Autre particularité propre aux médecins : les diplômés commencent à travailler en traînant une lourde dette, même si les revenus annuels sont par la suite élevés. Différentes options « Le rôle du planificateur financier est d’aviser le médecin des différentes solutions qui s’offrent à lui pour mettre en place un plan de retraite », explique Julie Gauthier. Les médecins en début de pratique se tournent souvent vers des mécanismes relativement simples, comme les CELI et les REER. Les médecins peuvent aussi faire l’acquisition d’une assurance vie qui leur fournira une rente viagère. Au fil de sa carrière, le médecin pourra éventuellement décider de se constituer en société (s’incorporer). « C’est un autre mécanisme à ajouter à sa structure financière », assure la planificatrice. Les sociétés sont imposables à plus faible taux, et elles permettent ainsi l’accumulation de sommes plus importantes que les placements personnels. « Tout cela se fait graduellement », précise-t-elle. La mise sur pied d’une société permet également de constituer un régime de retraite individuel (RRI). Les RRI sont l’équivalent d’un régime de pension agréé d’une entreprise, mais avec un seul bénéficiaire et contributeur. C’est donc la société qui cotise au RRI, et non l’individu, comme dans le cas d’un REER ou d’un CELI. « Le RRI arrive habituellement plus tard dans la pratique », fait remarquer Julie Gauthier. Une des conditions de base pour la constitution d’un RRI est en effet d’avoir été à l’emploi de la société pendant plusieurs années. Il faut par ailleurs s’être rémunéré avec un salaire, et non en dividendes, et être âgé de 40 ans et plus. Les RRI permettent de faire des placements additionnels et présentent certains avantages fiscaux : croissance du régime à l’abri de l’impôt, rachat des années passées, insaisissabilité en cas de faillite. Le plafond de cotisation à un RRI est légèrement plus élevé que celui des REER, et il augmente en fonction de l’âge. Il est surtout avantageux lorsque la société déclare des revenus supérieurs à 500 000 $ puisque cela donne droit à plus de déductions, ce qui n’est pas le cas pour la plupart des sociétés médicales professionnelles. Le RRI, est-ce pour vous ? Le RRI offre certains avantages fiscaux, mais il est impossible de faire une recommandation générale pour tous. « C’est important de respecter le profil de chacun », souligne Julie Gauthier. « Les RRI sont destinés à des clientèles assez ciblées », ajoute Daniel Laverdière, actuaire et expert-conseil à la Banque Nationale. La mise sur pied d’un RRI est aussi plus complexe. « Il faut s’enregistrer auprès de Revenu Canada. Il y a une complexité financière autour de tout cela », avertit Julie Gauthier. Comme tout bon régime de pension agréé, le RRI est assujetti aux mêmes exigences réglementaires. Une société d’actuariat devra être retenue pour faire l’évaluation des cotisations ainsi qu’une révision actuarielle tous les trois ans. Les frais d’administration sont également beaucoup plus élevés que pour un REER ou un CELI et peuvent s’élever jusqu’à 3500 $ par année pour certains régimes combinés. « Oui, ils sont déductibles, mais à 15 %. Et une dépense, ça reste une dépense », rappelle Daniel Laverdière. À la retraite, le RRI peut permettre d’émettre directement une pension mensuelle, mais sous certaines conditions. Le régime (et donc la société du médecin) doit continuer d’exister (si elle est vendue, l’acheteur doit prendre en charge la gestion du régime), par exemple dans le cas d’une entreprise familiale. Un cas de figure plutôt rare dans les sociétés de médecins. « La plupart des RRI roulent et retournent, à la fin, dans un REER », constate Daniel Laverdière. Retour, donc, à la case départ.

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