Quel a été l'impact de la COVID-19 sur la pratique en pharmacie d’établissement?

Si la pandémie de COVID-19 a mis de l'avant la compétence des pharmaciens d'établissement, ces derniers ne se sentent pas prêts à faire face à une autre pandémie, révèle un sondage pancanadien. Les résultats préliminaires du Sondage sur les pharmacies hospitalières canadiennes de 2020/21 de la Société canadienne des pharmacies d’hôpitaux (SCPH) ont été présentés lors d’un symposium organisé conjointement avec l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES) ayant eu lieu à Gatineau en octobre dernier. Cette 22e édition du sondage a été envoyée aux chefs des différents départements de pharmacie du Canada, et tous les territoires et provinces ont participé, sauf l’Alberta. Pour la première fois cette année, le sondage présentait une section complète de questions sur la COVID-19; il a donc été possible de mesurer l’impact de la pandémie sur la pratique. Médicaments et pénuries Réalisé entre la 3e et la 4e vague de COVID-19, le sondage a révélé que 90% des hôpitaux ont dû augmenter leurs stocks de médicaments. Aussi, 72% des départements de pharmacies ont eu besoin de plus d’espace de stockage pour les médicaments. «On a remarqué que les pharmaciens avaient peur des pénuries et qu’ils ont commandé plus de médicaments pour avoir de l’équipement pour environ trois mois. Cela a participé à l’augmentation du nombre de pénuries», a expliqué le pharmacien Régis Vaillancourt qui a participé à la rédaction du rapport. En pratique… Lors du symposium, de nombreux experts ont partagé leur expérience avec l’administration des médicaments et les changements constants des indications de traitements. C’est le cas notamment de Souzi Badr, pharmacienne aux soins intensifs du Toronto General Hospital. «Il fallait émettre un avis d’expert, alors que nous ne comprenions même pas la maladie nous-même», se souvient-elle. Elle ajoute qu’elle a également perçu un changement de culture lors de la pandémie, dû entre autres à l’urgence d’agir. «Les études sur les traitements étaient faites en accéléré et nous nous basions sur des études préliminaires non révisées par les pairs. Avant la COVID, jamais je n’aurais même pensé recommander une thérapie basée sur ce qui était écrit dans un article de journal ou les médias sociaux», explique la pharmacienne. Celle-ci donne en exemple l’étude Colcorona qui semblait suggérer lors des résultats préliminaires que la chloroquine était efficace pour prévenir les complications liées à la COVID-19. Or, il a été annoncé deux semaines plus tard que les résultats de l’étude n’étaient pas statistiquement significatifs. Cette dernière rappelle que la pandémie lui a appris à faire confiance à son opinion d’experte et à traiter chaque patient sur une base individuelle. Vaccination et planification Au total, plus du deux tiers des départements ayant répondu au sondage ont indiqué avoir participé à la planification régionale de vaccination et à la campagne de vaccination. Pourtant, seulement 22,3% ont participé à l’administration du vaccin. «Ce n’est pas que les pharmaciens d’établissement n’ont pas voulu administrer le vaccin. C’est qu’ils n’avaient pas le temps», précise Régis Vaillancourt. Néanmoins, 76% des répondants au participé au stockage des vaccins et 67,6% à la distribution de ces derniers. M. Vaillancourt ajoute que pour le futur, les départements de pharmacie en établissement doivent être prêts à jouer un rôle important dans les efforts de vaccination de masse car, cette fois-ci, personne ne l’était réellement. Vers de la télépharmacie? Au total, 64,7% des répondants ont affirmé avoir pu envoyer leurs employés travailler à la maison. Parmi les activités principales ayant pu se faire à la maison, les principales citées étaient les tâches de gestion, ainsi que de la télépharmacie dans les centres ayant des dossiers médicaux électroniques. «Les établissements doivent continuer à développer leur technologie pour prendre en charge les soins à distance dans le futur», a affirmé Régis Vaillancourt. Se préparer à une future pandémie Une majorité des hôpitaux du pays ont dû faire face à la pandémie, puisque 76% d’entre eux ont admis des patients atteints de la COVID-19. Par ailleurs, plus du deux tiers d’entre eux ont dû augmenter le nombre de lits qu’ils avaient. «Cela démontre qu’un plan de lutte contre une pandémie doit inclure des augmentations prédéfinies de la capacité en lits et des besoins en personnel pharmaceutique préétablis pour soutenir la prestation des soins liés aux nouveaux lits», a affirmé Régis Vaillancourt. Toutefois, malgré tous ces changements effectués rapidement dans les départements de pharmacie, une proportion importante des gestionnaires a estimé que leur pharmacie n’est pas prête à faire face aux défis associés à une autre pandémie. «Cette observation souligne la nécessité d’une planification accrue pour s’assurer que les services de pharmacie dans les hôpitaux canadiens soient prêts à faire face à une autre pandémie», a conclu M. Vaillancourt. Le rapport accompagnant le sondage et les résultats finaux seront publiés plus tard cette année.

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