Projet de loi sur l’aide médicale à mourir: l’APES veut plus de ressources

Dans le cadre de l’étude du nouveau projet de loi visant à élargir l’aide médicale à mourir (AMM), déposé mi-février par la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger, l’Association des pharmaciens d’établissement du Québec (APES) se positionne. «Afin de pallier la hausse attendue du nombre de demandes d’AMM, l’APES considère comme essentiel de prévoir des ressources supplémentaires dans les départements de pharmacie, sans quoi ce sont des patients vulnérables d’autres secteurs cliniques qui écoperont des choix déchirants qui devront malheureusement être faits par les chefs de département de pharmacie», affirme notamment sa présidente, la pharmacienne Julie Racicot. En 2021-2022, 3663 personnes ont reçu l’AMM, soit 5,1% des décès enregistrés au Québec, trois fois plus qu’en 2017-2018. Ce soin de fin de vie a été prodigué en centre hospitalier (54%), à domicile (33%), en CHSLD (8%) et en maison de soins palliatifs (5%). Dans tous les cas, les pharmaciens d’établissement sont intervenus. Ces derniers ont en effet la responsabilité de valider l’ordonnance, de préparer la trousse de médicaments et d’assurer le suivi étroit de son utilisation. Depuis l’entrée en application de la Loi concernant les soins de fin de vie, en 2015, «ils ont pris ce rôle à cœur et se sont investis afin d’appuyer les équipes médicales pour qui, parfois, les médicaments utilisés ne faisaient pas partie de la pratique courante», signale le mémoire que l’APES vient de déposer à l’Assemblée nationale. Revers de la médaille, ce nouveau rôle a engendré un surplus de travail notable, effectué parfois au détriment d’autres soins pharmaceutiques, notamment ceux offerts en soins palliatifs. De plus, l’admission dans les hôpitaux de la moitié des Québécoises et Québécois qui demandent l’aide à mourir contribue à leur engorgement, ces patients-là occupant généralement un lit de médecine ou de soins palliatifs afin d’obtenir leur soin. «Ne devrions-nous pas réfléchir à consacrer des ressources spécifiques à l’AMM dans nos établissements de santé ou nos maisons de soins palliatifs pour que les personnes qui choisissent l’AMM puissent y avoir accès au moment voulu sans devoir limiter l’accès aux soins palliatifs traditionnels?», interroge l’APES. Réduire le fardeau Au-delà de renforcer les équipes des pharmacies des centres hospitaliers, «sans quoi ce sont des patients vulnérables d’autres secteurs cliniques qui écoperont des coupes qui devront malheureusement être faites par le chef du département», l’APES propose d’alléger le fardeau administratif entourant la délivrance des trousses d’AMM. Plus de 7000 de ces dernières ont été remises aux médecins en 2021-2022, à raison généralement de deux trousses par patient, la première contenant des seringues préparées sous hotte stérile, la seconde étant composée de fioles en cas de problèmes avec la première. Lire aussi: Mourir au Québec, c’est souffrir «Tout ce processus comporte de multiples signatures, non requises lorsque ces mêmes médicaments sont employés dans d’autres circonstances», mentionne le mémoire de l’APES qui évalue que chaque cas d’AMM nécessite de deux à trois heures de travail. Les trois médicaments utilisés dans l’AMM — un hypnotique sédatif, un anesthésique général, et un bloqueur neuromusculaire — sont employés au quotidien pour d’autres indications et ils «ne font pas l’objet d’une surveillance aussi étroite. Il faut faire confiance aux professionnels de la santé déjà formés pour exercer une surveillance et assurer la sécurité des soins dispensés, afin de réduire le fardeau administratif au strict minimum», affirme l’association professionnelle. Inclusion des pharmaciens communautaires Dans le même ordre d’idées, «nous suggérons aussi la mise en place de corridors de services qui permettront aux équipes de première ligne ainsi qu'aux pharmaciens communautaires de consulter un pharmacien expert en soins de fin de vie pour la prise en charge de ces soins à domicile», indique la directrice générale de l'APES, Linda Vaillant. Elle souhaite ainsi que les pharmaciens privés s'occupent des processus de validation des ordonnances d’AMM, préparent et distribuent les trousses pour les patients qui choisissent de recevoir ce soin à domicile. «D’abord, ces pharmaciens sont les mieux placés pour évaluer le dossier de patients qu’ils connaissent déjà. De plus, ils détiennent les compétences requises et pourront être soutenus, au départ, par leurs collègues du secteur hospitalier au besoin», argumente le mémoire de 26 pages (disponible en pied de page). En plus d’autres aménagements au texte du projet de loi 11, l’APES tient à rappeler que d’autres options associées à la fin de vie sont accessibles pour les patients - les soins palliatifs traditionnels et la sédation palliative continue - et que celles-ci ne devraient pas être négligées «afin que l’AMM ne soit pas perçue comme la seule issue pour un patient souffrant».

Projet de loi sur l’aide médicale à mourir: l’APES veut plus de ressources

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