Prévention de la conjonctivite néonatale: L’obligation d’appliquer un antibiotique dans les yeux d’un nouveau-né sera abolie

La Société canadienne de pédiatrie a publié en mars 2015 un document de principes qui remet en question l’obligation légale d’appliquer un antibiotique dans les yeux d’un nouveau-né à sa naissance pour prévenir la conjonctivite néonatale causée par Neisseria gonorrhoeae ou Chlamydia trachomatis1.« De nos jours, la conjonctivite gonococcique du nouveau-né est rare au Canada, mais la prophylaxie oculaire demeure obligatoire dans certaines provinces [dont le Québec] et certains territoires, indique la Société canadienne de pédiatrie dans le résumé de son document de principes. Les gouttes de nitrate d’argent ne sont plus en marché, tandis que l’efficacité de l’érythromycine [0,5 %], le seul onguent antibiotique actuellement offert pour les nouveau-nés, est douteuse. La prophylaxie oculaire ne prévient pas la conjonctivite à Chlamydia avec efficacité. L’application de médicaments dans les yeux des nouveau-nés peut provoquer une irritation oculaire bénigne. Pour certains parents, cette pratique nuit à l’attachement entre la mère et son nourrisson. »La Société canadienne de pédiatrie recommande donc aux médecins s’occupant de nouveau-nés « de plaider pour la suppression des lois qui obligent la prophylaxie oculaire ». Elle suggère plutôt « le dépistage de la gonorrhée et de Chlamydia chez toutes les femmes enceintes et le traitement et le suivi de celles qui sont infectées ». Elle est également d’avis que « les femmes qui n’ont pas été soumises au dépistage devraient l’être à l’accouchement ».« Les nourrissons de mères chez qui on décèle, à l’accouchement, une gonococcie non traitée devraient recevoir de la ceftriaxone. Ceux exposés à Chlamydia lors de l’accouchement devraient faire l’objet d’un suivi étroit pour déceler tout signe d’infection », recommande-t-elle aussi.Position du MSSSLe ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a réagi au document de principes de la Société canadienne de pédiatrie dans une lettre envoyée en juillet par courrier électronique aux autorités du réseau de la santé, aux autorités de santé publique et aux organismes concernés.Dans leur lettre, le directeur national de santé publique et sous-ministre adjoint à la Santé publique, le Dr Horacio Arruda, et le sous-ministre adjoint aux Services de santé et médecine universitaire, le Dr Louis Couture, affirment que le MSSS reconnaît :la nécessité d’avoir des recommandations pour prévenir la conjonctivite néonatale qui soient appuyées sur des données scientifiques et adaptées à l’épidémiologie et à l’organisation des services de santé au Québec;que la prévention de la conjonctivite néonatale ne nécessite pas d’être encadrée par un article de loi spécifique. Il s’agit plutôt de définir les bonnes pratiques et de mettre en œuvre les conditions nécessaires pour qu’elles soient appliquées;que l’application des recommandations actuelles du Guide québécois de dépistage des ITSS doit être optimale.Par conséquent, les auteurs de la lettre annoncent l’abrogation prochaine de l’article 68 du Règlement d’application de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes et des tissus et la disposition des cadavres.Cet article stipule que « tout médecin ou toute sage-femme pratiquant un accouchement doit appliquer dans les yeux du nouveau-né, immédiatement après la naissance, un médicament efficace pour la prévention de l’ophtalmie purulente ».« Mais entre-temps, les dispositions de cet article sont toujours en vigueur », a précisé à Profession Santé Noémie Vanheuverzwijn, relationniste au MSSS.Les Drs Arruda et Couture indiquent aussi que « le MSSS confiera [cet automne] à un groupe d’experts des différents domaines concernés le mandat de produire des recommandations concernant la prévention de la conjonctivite néonatale causée par Neisseria gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis et les moyens à mettre en place pour en favoriser l’application. »Ils précisent que « cette démarche permettra le développement d’une norme de pratique ralliant les différents domaines d’expertise ».En attendant la publication des recommandations du groupe d’experts, ils demandent notamment aux autorités du réseau de la santé, aux autorités de santé publique, de même qu’aux organisations concernées de réitérer aux professionnels de la santé qui suivent des femmes enceintes ou voulant le devenir « l’importance d’une offre systématique de dépistage du VIH et des autres ITSS selon les recommandations du Guide québécois de dépistage des ITSS2 ».1. La prévention de la conjonctivite néonatale, (document de principes), Société canadienne de pédiatrie (www.cps.ca/fr/).2. Guide québécois de dépistage des ITSS, ministère de la Santé et des Services sociaux (publications.msss.gouv.qc.ca/msss/document-000090/)

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