Présence controversée du ministre Barrette au congrès annuel de l’APES à la mi-avril

L’annonce de la présence du ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, au congrès annuel de l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES), qui se déroulera à Trois-Rivières du 13 au 15 avril, a suscité la grogne sur Facebook.L’APES a partagé le 2 avril sur sa page Facebook un lien vers son communiqué annonçant que le ministre Barrette avait accepté son invitation pour participer à la remise des six prix d’excellence APES lors de sa soirée Tapis rouge du 14 avril.Outre la remise du Prix d’excellence Roger-Leblanc (reconnaissance de l’excellence de l’ensemble de la pratique d’un pharmacien au cours de sa carrière en établissement de santé), il est prévu que le ministre s’adresse aux congressistes pour la première fois depuis qu’il occupe son poste, le 23 avril 2014.Il n’en fallait pas plus pour susciter de vives réactions chez des pharmaciens dans le contexte des compressions gouvernementales de 399 millions $ sur trois ans pour l'ensemble des pharmaciens propriétaires sans que le Conseil des ministres ait mis en vigueur le règlement abolissant le plafond de 15 % s’appliquant à leurs allocations professionnelles.« Serait-ce une occasion d’expliquer à M. Barrette que lorsqu’on porte atteinte à une portion d’une profession, on affaiblit l’ensemble [au] complet ? Un pharmacien est un pharmacien, et le lieu qu’il choisit pour exercer sa pratique contribue positivement à ajouter de la valeur dans le grand réseau de santé québécois. […] », a commenté sur la page Facebook de l’APES une pharmacienne propriétaire qui a pratiqué pendant 15 ans en milieu hospitalier.« Je n’y comprends rien…, inviter cet homme..., expliquez-moi SVP… J’ai mal à mon association », a réagi une pharmacienne d’établissement.« On est en mal d’invités… Il a toujours ri de nous à pleines dents » a renchéri une autre pharmacienne.« Mon conjoint est pharmacien propriétaire, je suis pharmacienne en établissement. Je comprends la déception et la frustration vis-à-vis cette invitation. Connaissant bien les deux côtés de la pharmacie, je trouve que c’est manquer de solidarité envers les pharmaciens communautaires », a déploré une autre pharmacienne.Une autre pharmacienne approuve la décision de l’APES « pour faire comprendre au ministre la place du pharmacien d’établissement dans cette transformation ». Elle croit qu’« il faut faire preuve de collaboration et de détermination dans nos positions ».Mise au point de l’APESSurprise des réactions de plusieurs de ses membres et d’internautes, l’APES a apporté certaines précisions dans un autre communiqué daté du 4 avril qu’elle a partagé également sur sa page Facebook.La directrice générale de l’APES, Linda Vaillant, a précisé à ProfessionSanté.ca que la majorité des commentaires qu’elle a lus provenait de pharmaciens communautaires du groupe fermé de 4406 membres Pharmaciens et pharmaciennes du Québec (membres OPQ).« Des commentaires attaquaient un peu notre manque de solidarité. Certains avaient même l’impression que c’était un geste un peu arrogant à l’endroit des pharmaciens de pratique privée. »« À chaque congrès annuel, l’APES invite des personnes occupant des fonctions significatives dans des organisations liées au réseau de la santé, ainsi que les élus concernés par les dossiers de santé du Québec, explique-t-elle dans le second communiqué. Dans ce contexte, le ministre de la Santé et des Services sociaux est bien entendu invité, tout comme les porte-parole en matière de santé des partis d’opposition. »Elle mentionne que « c’est un honneur pour l’APES de recevoir le ministre ». Elle a précisé à ProfessionSanté.ca que les porte-parole en matière de santé des oppositions officielles (Parti Québécois et Coalition Avenir Québec) ont décliné l’invitation de l’APES.Elle fait valoir dans sa lettre que le ministre Barrette a maintenu les primes consenties aux pharmaciens d’établissements « qui visaient à rehausser leur salaire de manière significative ». « Nos démarches ont permis à l’APES de signer une entente de travail satisfaisante avant toutes les grandes centrales syndicales, un fait unique dans notre histoire », fait-elle remarquer.À ProfessionSanté.ca, elle a souligné que l’APES n’avait pas eu l’appui des pharmaciens communautaires lorsque les pharmaciens d’établissements avaient des salaires « tout maigres ».Elle fait aussi valoir dans sa lettre que l’APES ne peut pas se servir de la population comme levier dans ses stratégies d’intervention puisqu’elle n’est pas connue de cette dernière.Elle précise que « [cette invitation] ne vise pas à agir avec arrogance envers le reste de la profession ». À preuve, écrit-elle, « l’APES a toujours fait des interventions favorables envers les pharmaciens de pratique privée lorsque l’occasion lui était donnée [p. ex., lors des commissions parlementaires] ».Elle signale aussi que les pharmaciens d’établissements ne sont pas épargnés avec la réorganisation majeure du réseau québécois de la santé.Maintenir le dialogue avec le ministreDurant sa rencontre avec le ministre Barrette, l’APES en profitera pour s’entretenir avec lui de l’importance d’une continuité des soins et de la collaboration requise entre les pharmaciens des deux milieux de pratique.« L’APES croit donc utile de maintenir le dialogue avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, tout comme avec les élus des partis d’opposition, d’autant plus que cela lui a été salutaire jusqu'à présent », conclut dans sa lettre Linda Vaillant.Elle a précisé en entrevue à ProfessionSanté.ca que l’APES avait besoin de son appui pour certaines de ses préoccupations en lien avec la réorganisation en cours du réseau de la santé.Elle a communiqué avec l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) pour lui expliquer la position de l’APES afin d’éviter de créer un conflit. Au terme des discussions, elle s’est dite rassurée.Appelée à commenter cette controverse, l’AQPP n’a pas voulu s’immiscer dans ce débat.

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