PREM et AMP: un pas dans la bonne direction, à concrétiser sur le terrain

«On faisait cette demande depuis des années, alors on est plutôt satisfait. Ça va donner plus de latitude et de prévisibilité aux résidents en médecine de famille», observe le président de la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ), le Dr Cédric Lacombe, en réaction à l’annonce du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) de vendredi dernier. Dans un communiqué indiquant qu’un «ajout de 449 nouveaux médecins de famille est prévu» l’an prochain, le MSSS informe que «ces nouveaux PREM [plans régionaux d’effectifs médicaux, NDLR] feront pour la première fois l’objet d’allègements, afin de valoriser la médecine familiale et d’attirer davantage de nouveaux médecins en région. Jusqu’à présent, les résidents devaient arrêter leur choix sur une région, où ils pouvaient cibler jusqu’à deux sous-territoires. L’attribution des PREM se déroulait ensuite en deux rondes, ceux n’ayant pas été sélectionnés au premier tour pouvant alors se positionner sur les PREM restants. Dès le 15 octobre, les candidats pourront postuler dans deux régions et deux sous-régions où ils souhaitent travailler. «Ils auront accès à quatre RLS [réseau local de santé], donc à plus de postes. Ça double les possibles», indique le Dr Lacombe qui ajoute que la fin du processus à deux tours devrait également limiter les incertitudes. Autre nouveauté: les résidents pourront «indiquer leurs préférences d’activités médicales particulières (AMP) dès l’envoi de leur candidature. Ils pourront ensuite discuter des AMP disponibles dans les sous-régions où ils auront postulé lors de leurs entrevues» avec les directions régionales de médecine générale (DRMG), mentionne le MSSS. Autrement dit, «c’est un genre de “package deal”. Le choix des AMP, dont la liste sera affichée par territoire, sera associé au choix du RLS», explique le président de la FMRQ estimant qu’il s’agit de «quelque chose de plus sain». Jusque-là, le choix final des AMP incombait au chef de la DRMG et «il était officialisé à la dernière minute, souvent après le début de la pratique». Le Ministère signale aussi qu’un nouveau site web a été mis en ligne «afin de faciliter les démarches des médecins pour choisir leur lieu de pratique». Ces derniers y trouveront les postes disponibles par région et sous-région, ce qui devrait leur permettre «de mieux identifier leur lieu de travail et de faciliter la conciliation travail et vie personnelle». Sur le papier, «c’est une belle annonce. Mais on n’a pas encore expérimenté le processus. On fera le post mortem après le 20 décembre, une fois que tous les résidents en médecine de famille auront reçu leurs réponses des DRMG», indique le Dr Lacombe. La prudence est aussi de mise à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ). «Sur le fond, c’est un pas dans la bonne direction. On donne plus d’informations et de transparence aux résidents afin qu’ils fassent leur choix. Sur la forme, il reste à voir comment ça va se dérouler concrètement cet automne. C’est délicat de porter un jugement a priori», estime le conseiller stratégique aux affaires publiques de la Fédération, Jean-Pierre Dion. À lire aussi: Médecine familiale: la moitié des résidents choisiraient une autre spécialité si leur formation était prolongée Dans l’absolu, il considère cependant que «c’est un assouplissement dans une montagne de contraintes», mais que cela ne règlera pas le problème de la pénurie d’effectifs. «Selon les chiffres du Ministère, l’écart au besoin sera de 1160 médecins de famille l’an prochain, et cette année, 68 PREM en médecine familiale n’ont pas été comblés», souligne M. Dion. «On gère la pauvreté et on s’organise avec les moyens du bord pour éviter les découvertures», ajoute-t-il en précisant que l’enjeu, «c’est d’avoir suffisamment de résidents qui postulent». À ce sujet, le communiqué du MSSS rapporte que «le ministre de la Santé et la ministre de l’Enseignement supérieur ont annoncé cet été qu’ils augmenteront les admissions en médecine de 404 places au cours des trois prochaines années, afin de former 660 médecins supplémentaires sur quatre ans en 2026-2027». Mais encore faut-il qu’ils s’orientent en médecine de famille, nuance le conseiller de la FMOQ. «Un jeu de dominos incroyable» Dernière modification annoncée vendredi par le Ministère: les DRMG, «responsables de l’application du PREM, ont maintenant une pleine autonomie dans la répartition des places». Par le passé, cette répartition était imposée par Québec dans plusieurs régions, «mais pas en Estrie», signale sa cheffe de la DRMG, la Dre Stéphanie Boilard. «On se faisait un devoir de challenger les postes imposés dans le but d’avoir une répartition qui faisait du sens au regard de notre évaluation des besoins dans chacun des RLS», explique-t-elle en notant qu’il y a «moins d’ingérence» du MSSS depuis deux ou trois ans. En 2023, l’Estrie avait obtenu 28 PREM. En 2024, 36 viennent d’être attribués à la région. Soit 42 de moins que les besoins évalués par la DRMG, auxquels vont s’ajouter 17 départs à la retraite prévus l’année prochaine. «36 PREM, c’est clairement insuffisant. L’écart au besoin se creuse, d’autant plus que les PREM ne sont pas comblés à 100%», souligne la Dre Boilard. S’agissant des AMP, l’omnipraticienne responsable du GMF du Haut Saint-François, à Cookshire, estime que leur affichage à l’automne, dès le début du processus, va faciliter la planification des effectifs. En revanche, sa perception des quatre choix offerts aux résidents est plutôt négative. «Ça va complexifier la tâche des DRMG, car on aura le double d’entrevues à faire passer.» Quant à l’impératif de donner une réponse à tous les résidents à la date du 20 décembre, la médecin est sceptique: «Ça risque de compliquer les choses et d’allonger la période d’incertitude en créant un jeu de dominos incroyable» pour satisfaire les demandes des uns et des autres en fonction des besoins locaux. Affaire à suivre, donc.

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