Pharmacie: un premier congrès dédié à la santé des femmes prévu cet automne

Alors que seulement une Canadienne sur deux se dit satisfaite de la prise en charge de sa santé et des soins qu’elle reçoit, il était temps d’aborder cet enjeu dans la pratique pharmaceutique. En effet, les pharmaciens et pharmaciennes sont souvent les premiers interlocuteurs pour de nombreux enjeux touchant à la santé des femmes – pas seulement la santé sexuelle et reproductive, mais aussi la gestion de la douleur ou encore certaines problématiques de santé mentale. Pourtant, nombre d’entre eux se sentent encore mal outillés, voire gênés, d’aborder ces sujets avec leurs patientes. C’est en écoutant les observations et préoccupations des pharmaciens de la province que Rouguietta Touré, gestionnaire principale des programmes nationaux chez Pharmascience et directrice des services professionnels Pharmasupport, a eu l’idée de lancer un événement dédié à la santé des femmes. «Beaucoup de pharmaciens et pharmaciennes nous ont indiqué qu’ils aimeraient mettre à jour leurs connaissances sur ces sujets, et être tenus au courant des études récentes. Cela découle des nombreuses questions de plus en plus posées par les patientes», explique-t-elle. À lire aussi: Ressources pour vos patientes contre la mésinformation sur la santé des femmesElle en parle alors avec Marie-Eve Bertrand, pharmacienne communautaire formée en santé publique, et les astres s’alignent. «Nous avons tous et toutes déjà entendu des témoignages, dans notre entourage, de femmes ayant vécu une expérience plus ou moins plaisante dans le réseau de la santé, confie-t-elle. Ayant déjà participé à plusieurs initiatives, conférences et projets de recherche touchant à la santé de la femme, j’étais au fait des enjeux et des lacunes qui pouvaient exister, et je cherchais une manière de pouvoir m’impliquer davantage. » D’autant que la pharmacienne est elle-même confrontée à ces enjeux dans sa pratique quotidienne. «Quand je fais face à une patiente atteinte d’endométriose, un cas typique, j’essaie de lui trouver de l’information mais c’est très difficile, car ce sont des références auxquelles j’ai difficilement accès.» Au fil du temps, Marie-Eve Bertrand s’est aussi rendue compte du sexisme médical auquel certaines patientes pouvaient être confrontées. «Certains professionnels ont des biais concernant la gestion de la douleur chez les femmes, ont une réticence à traiter ou manquent tout simplement d’outils pour le faire», reconnaît-elle. «On va apprendre à nommer les choses sans être gênés de le faire»Face à ces constats, et à des sujets de plus en plus discutés parmi la population, les deux expertes ont décidé de lancer le premier Sommet sur la santé de la femme, qui aura lieu les 9 et 10 octobre prochain dans les Laurentides, et dont Marie-Eve Bertrand est la présidente du Comité organisateur et sera la maîtresse de cérémonie. Un comité d’ailleurs mixte, tient à souligner Rouguietta Touré. «Nous avons voulu inclure des pharmaciens hommes car il est important de sensibiliser toute la profession à ces enjeux, et peut-être encore plus les pharmaciens.»Les sensibiliser, et les rassurer, ajoute Marie-Eve Bertrand. «Certains pharmaciens hommes se demandent s’ils sont légitimes à parler de santé à leurs patientes femmes, surtout s’il s’agit de santé sexuelle. Ils peuvent se sentir intimidés ou avoir peur d’être mal perçus. C’est souvent dû à une méconnaissance, et je pense qu’on pourrait y remédier par la formation», affirme la pharmacienne.À lire aussi: Les trois quarts des femmes minimisent leurs problèmes de santé, indique un sondageMais si le comité directeur est mixte, la programmation, elle, est entièrement féminine – à dessein. Cinq cliniciennes expertes en santé de la femme se succèderont ainsi sur scène pour présenter leurs conférences, auxquelles viendront s’ajouter les témoignages de plusieurs patientes partenaires. «Nous nous sommes assurées qu’elles occupent la première place à ce congrès, explique Marie-Eve Bertrand. On veut amener les pharmaciens et les pharmaciennes à comprendre qu’il s’agit d’un enjeu sociétal, et que les patientes ont parfois du mal à aborder certains sujets avec nous.» Avec, en ligne de mire, un meilleur partenariat pharmacien/patiente.Au programme des conférences, un sujet incontournable et massivement cité par les professionnels: la ménopause. «Ça concerne énormément de patientes, et on en parle de plus en plus dans la société», observe Rouguietta Touré. «Mais les pharmaciens ne se sentaient pas bien outillés pour s’en emparer.» D’autres sujets comme la santé cardiovasculaire, l’allaitement ou encore les infections génitales courantes, vont également être abordés. «On va apprendre à nommer les choses avec les bons termes, sans être gênés de le faire», résume Marie-Eve Bertrand.L’actualité liée à l’entrée en vigueur imminente du PL67 a aussi influé sur le choix du programme, révèle Marie-Eve Bertrand. «Avec ce projet de loi, les pharmaciens seront d’autant plus attendus comme des experts de première ligne pour aider au triage des patients, et faire de premières évaluations», estime-t-elle, en prenant les exemples des risques cardiovasculaires et des infections génitales courantes. «Nous avons voulu saisir cette opportunité de changement législatif pour qu’il soit le plus utile possible aux pharmaciens.»Mais une journée et demie de formation, c’est court. «Il a fallu faire des choix», concède la pharmacienne. Des thèmes comme l’endométriose et la santé mentale, bien que cruciaux, sont d’ores et déjà au programme de la prochaine édition. «On sait par exemple que le TDAH est sous diagnostiqué chez les femmes», illustre Marie-Eve Bertrand. D’autant que, si l’on se fie à l’engouement suscité par cette première édition, les suivantes devraient également faire le plein – le comité d’organisation réfléchit d’ailleurs à un lieu plus grand que le Manoir Stone Haven pour l’année prochaine.

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