Opill, la première pilule contraceptive en vente libre aux États-Unis

La nouvelle a sûrement soulagé de nombreuses Américaines. Depuis fin mars, la première pilule contraceptive sans ordonnance aux États-Unis, Opill, est commercialisée sans restriction dans les pharmacies de détail comme Rite Aid, CVS Health, Walgreens et Walmart, au prix 19,99$ pour un mois et 49,99$ pour trois mois. Certains régimes d’assurance santé, comme celui de CVS Health, ont même d’ores et déjà annoncé qu’ils allaient la prendre en charge gratuitement. La mise sur le marché de ce contraceptif du laboratoire Perrigo avait été approuvée par la FDA à l’été 2023. «C’est la première fois qu'un contraceptif oral à prise quotidienne sera disponible en vente pour des millions de personnes aux États-Unis, s’était alors réjouie la Dre Patrizia Cavazzoni, directrice du Centre d'évaluation et de recherche sur les médicaments de la FDA, dans un communiqué de l’agence américaine. Lorsqu'elle est utilisée conformément aux instructions, la contraception orale quotidienne est sûre et est plus efficace que les méthodes contraceptives en vente libre actuellement disponibles pour prévenir les grossesses non désirées.»À lire aussi: Contraception et avortement médicamenteux: une nouvelle boîte à outils pour les pharmaciensLa Dre Marie-Ève Murray, obstétricienne et gynécologue au CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal et au CHUM, voit cela comme une excellente nouvelle pour les femmes américaines. «Tant mieux pour elles, les pilules à progestatif comme celle-ci présentent très peu de contre-indications. C’est très bien d’en avoir facilité l’accès en évitant de devoir consulter un médecin qui pourrait ne pas vouloir la prescrire.» En effet, Opill est à base de norgestrel. Ce progestatif synthétique «présente la même efficacité qu’un contraceptif combiné, mais [la pilule] doit être prise de manière plus régulière car elle ne contient pas d’œstrogènes», précise la Dre Marie-Ève Murray. Et si Opill était commercialisée ici?Bien que la situation concernant l’accès à la contraception et à l’avortement soit très différente des deux côtés de la frontière, l’Ordre des pharmaciens (OPQ) précise à Professionsanté.ca que «la question de la vente libre des anovulants reste importante et elle fera l'objet d'une discussion dans un comité interne. Nous verrons à cette occasion si une réflexion plus large doit être réalisée à ce sujet».Si la commercialisation de cette pilule en vente libre représente une avancée en termes d'accès à la contraception, le fait que les patientes n’ont plus besoin d'interagir avec un professionnel de la santé pour se la procurer, peut néanmoins susciter quelques inquiétudes. «Ce ne sont pas des produits sans risque, alors il est préférable qu’un professionnel de la santé soit impliqué», croit l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP), contactée par Professionsanté.ca. Cela dit, les conseils d’utilisation et les contre-indications sont indiquées clairement sur la boîte, observe la Dre Marie-Ève Murray. Celle-ci est par exemple déconseillée aux femmes ayant subi un cancer du sein. «Aujourd’hui, les patients peuvent aller acheter du Tylenol directement sur les tablettes en pharmacie sans savoir comment le prendre. Il faut lire les instructions, comme pour n’importe quel médicament, et le pharmacien devrait être en mesure de répondre aux questions.» À lire aussi: Contraception: le dispositif intra-utérin Mirena peut être gardé jusqu’à 8 ansEt même s’il y a un mauvais usage de la pilule, le bénéfice sera toujours plus grand que de ne pas la prendre, estime la gynécologue. «Les pharmaciens ont beaucoup de contrôle sur ce qui est disponible dans leur pharmacie, et les médecins pourraient trouver qu’il n’est pas sécuritaire de proposer une pilule contraceptive à la vente libre, mais si Opill arrivait au Canada, je ne pense pas qu’ils s’y opposeraient.» Pour l’instant, au Canada, les contraceptifs restent accessibles sur prescription d’un médecin, d'un pharmacien ou d'une infirmière. «Comme le pharmacien peut faire la prescription, l’accessibilité est déjà simplifiée pour les femmes», considère l’AQPP. Le Québec a par ailleurs accueilli beaucoup de nouveaux produits contraceptifs ces dernières années, reconnaît la Dre Marie-Ève Murray, qui exerce à la Clinique de santé des femmes de Montréal. «Il pourrait toujours y en avoir davantage, mais après plusieurs années sans solution, c’est bien.» L’accessibilité de la contraception d’urgence, enjeu réelSelon elle, le véritable enjeu auquel les gouvernements du Québec et du Canada doivent répondre en priorité n’est pas vraiment celui de la contraception régulière: «Opill serait un atout supplémentaire pour les Canadiennes, mais elle ne me semble pas nécessaire pour l’instant. Ma bataille serait plutôt sur la contraception d’urgence.» L’obtention de cette dernière requiert en effet une consultation préalable avec le pharmacien, alors qu’elle est déjà disponible en vente libre aux États-Unis, rappelle la gynécologue. À lire aussi: Astuces cliniques: comment conseiller les patientes sur la contraception réversible à longue durée d'action?«On n’en parle pas encore assez, donc les jeunes filles ne sont pas au courant qu’elles peuvent y avoir accès. Une fois à la pharmacie, il faut souvent attendre 30 minutes pour parler au pharmacien, puis planifier une consultation, voire revenir… Ce qui peut décourager les jeunes filles. Sans parler du jugement auquel elles peuvent faire face.» Bien que la plupart des jeunes femmes savent que les pilules du lendemain sont disponibles sans ordonnance en pharmacie, elles ne sont pas bien informées quant à la manière de l’utiliser, rapporte l’INSPQ dans sa dernière étude PIXEL.

Opill, la première pilule contraceptive en vente libre aux États-Unis

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