Nouvelles lignes directrices pour les troubles de l'alimentation de l'American Psychiatric Association

Les troubles de l'alimentation sont une constellation complexe d'affections médicales et psychiatriques, et une approche unique ne convient pas à tous, selon les lignes directrices sur les troubles de l'alimentation récemment mises à jour par l'American Psychiatric Association (APA). Ces lignes directrices mettent l'accent sur des soins individualisés centrés sur le patient, sur la prise en compte des contextes culturels, sur la prise en charge des comorbidités et sur une variété de modalités de traitement, allant des médicaments aux différents types de thérapie. Elles fournissent d'excellentes informations et, avec la section du DSM-5 sur les troubles de l'alimentation, constituent une bonne source d'information pour les médecins canadiens, a affirmé le Dr Robbie Campbell. Il est professeur émérite de médecine à la Western University et président de la Fondation canadienne des troubles de l'alimentation (EDFC). Il n'a pas participé à la rédaction des lignes directrices. Il est à noter que l'Association des psychiatres du Canada n'a pas de lignes directrices officielles sur le sujet. À lire aussi: Surmonter ses pensées négatives grâce à la méditation Le Dr Campbell a noté que les lignes directrices de l'APA mettent l'accent sur l'identification et la prise en charge des troubles comorbides. Il existe de nombreuses pathologies qui déclenchent, aggravent ou résultent des troubles de l'alimentation, telles que l'anxiété, la dépression, la toxicomanie, la dysrégulation de l'appétit, le syndrome de stress post-traumatique et d'autres types de traumatismes, les antécédents de maltraitance et d'autres pathologies qui peuvent être étroitement liées à un trouble de l'alimentation. Ignorer d'autres problèmes psychiatriques ou médicaux peut conduire à un succès moindre dans le traitement d'un trouble de l'alimentation. «Il faut considérer la personne dans son ensemble», a-t-il souligné en entrevue. En même temps, il faut une équipe pour aider les patients. «Le traitement d'un trouble de l'alimentation n'est pas l'affaire d'une seule personne.» En effet, les lignes directrices recommandent «que les patients souffrant d'un trouble de l'alimentation bénéficient d'un plan de traitement documenté, complet, culturellement approprié et centré sur la personne, qui intègre les éléments suivants: des compétences médicales, psychiatriques, psychologiques et nutritionnelles, généralement par l'intermédiaire d'une équipe multidisciplinaire coordonnée». Et que «l'évaluation psychiatrique initiale d'un patient présentant un éventuel trouble du comportement alimentaire permette d'identifier les affections concomitantes, y compris les troubles psychiatriques concomitants». Une équipe multidisciplinaire peut comprendre des psychologues, des ergothérapeutes, des thérapeutes en loisirs (pour encourager des formes d'exercice physique saines), des gestionnaires de cas, des travailleurs sociaux ainsi que des spécialistes médicaux si des troubles cardiovasculaires, endocriniens, gastro-intestinaux ou autres sont associés et nécessitent une attention particulière. À lire aussi: Méditation de pleine conscience: où commencer sérieusement? Les patients présentant un éventuel trouble du comportement alimentaire doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs «signes vitaux, y compris la température, la fréquence cardiaque au repos, la pression artérielle, le pouls orthostatique et la pression artérielle orthostatique; la taille, le poids et l'IMC (ou le pourcentage de l'IMC médian, le percentile de l'IMC ou le score Z de l'IMC pour les enfants et les adolescents); et l'apparence physique, y compris les signes de malnutrition ou les comportements de purge», précise les directives. Il convient également de procéder à des analyses de laboratoire portant sur des échantillons de sang et à un bilan métabolique comprenant des électrolytes, des enzymes hépatiques et des tests de la fonction rénale. Des électrocardiogrammes peuvent également s'avérer utiles chez certains patients. Les lignes directrices de 122 pages sont également accompagnées d'un résumé de cinq pages publié dans l'American Journal of Psychiatry. «Ce résumé reprend les points essentiels qui peuvent aider les médecins à poser un diagnostic et à mettre en place un plan de traitement», explique le Dr Campbell. Mais même l'existence de bonnes lignes directrices ne résout pas les vrais problèmes auxquels sont confrontés les médecins et les patients, à savoir les problèmes systémiques qui limitent la quantité de soins que les patients peuvent réellement recevoir. Des obstacles empêchent ces patients d'obtenir des soins en temps voulu. L'orientation d'un médecin généraliste peut prendre plusieurs mois, voire un an. Ensuite, l'obtention d'un rendez-vous et l'orientation vers d'autres spécialistes et services prennent encore plus de temps. Il peut s'écouler des années avant qu'un patient ne commence à recevoir le niveau de soins dont il a besoin, a regretté le Dr Campbell. En outre, la plupart des patients n'ont pas les moyens d'assumer les frais de leur poche, notamment les frais de consultation psychologique, d'ergothérapie ou d'autres services non couverts par les régimes provinciaux, qui peuvent s'élever jusqu’à 20 000$ par mois, selon le Dr Campbell. Le traitement de ces patients prend du temps. Si les personnes qui sont dans un état grave finissent par être hospitalisées, il y a un manque d'aide une fois qu'elles sortent de l'hôpital. Elles ne devraient pas être renvoyées chez elles, car elles risquent de rechuter rapidement. À lire aussi: Psychologie: le «coping», ou comment nous faisons face aux stress intenses «Ils ont besoin de soins de transition» pour les aider à adopter des habitudes alimentaires plus saines et pour continuer à s'attaquer aux causes sous-jacentes, a-t-il ajouté. Pour sa part, le Dr Campbell fait partie d'une équipe qui élabore un modèle de transition de soins pour les étudiants souffrant de troubles de l'alimentation, à l'Université Western. Une version préliminaire du programme devrait être lancée cet automne. Les médecins canadiens peuvent également s'inspirer de La Stratégie canadienne en matière de troubles de l’alimentation: 2019 à 2029, élaborée par l'Association des Troubles Alimentaires du Canada (ATAC), la Fondation canadienne des troubles de l'alimentation (EDFC), le Centre national d'information sur les troubles de l'alimentation (NEDIC) et l'Initiative nationale pour les troubles de l'alimentation (NIED). Elle décrit les approches en matière d'éducation du public, de prévention, de soutien aux soignants, aborde les types d'options de traitement disponibles dans tout le pays (certains plus que d'autres selon les provinces), les approches thérapeutiques et bien d'autres choses. Il présente également des suggestions pour améliorer l'accès aux traitements et la formation des prestataires de soins de santé. Elle montre également que le problème des troubles de l'alimentation n'est pas anodin, puisqu'environ un million de personnes au Canada répondent aux critères diagnostiques de ces troubles. Les troubles de l'alimentation sont «des maladies mentales graves, mais traitables, qui peuvent affecter n'importe qui, quels que soient le sexe, l'âge, l'identité raciale et ethnique, l'orientation sexuelle ou le milieu socio-économique», précise le document. Malheureusement, la plupart des patients ne cherchent pas à se faire soigner, n'y parviennent pas ou sont confrontés à des retards importants qui peuvent parfois être fatals. Elle indique également que «les coûts sociaux et économiques des troubles de l'alimentation non traités sont similaires à ceux de la dépression et de l'anxiété, avec des effets physiques et mentaux débilitants comparables à ceux de la psychose et de la schizophrénie». Les troubles de l'alimentation ont également le taux de mortalité global le plus élevé de toutes les maladies mentales, avec des estimations comprises entre 10 et 15%. Le suicide et les maladies cardiaques en sont les principales causes. Mais les décès peuvent être sous-estimés, car la cause du décès est souvent attribuée à un événement tel qu'une crise cardiaque, sans qu'il soit précisé que les problèmes cardiaques sont la conséquence d'un trouble de l'alimentation, d’après le Dr Campbell. Ou encore un décès dû à une complication diabétique résultant d'un trouble de l'alimentation. Lorsqu'ils ont affaire à des patients plus jeunes, les médecins peuvent également se référer aux «Recommandations canadiennes pour le traitement des enfants et des adolescents souffrant de troubles de l'alimentation», publiées dans le Journal of Eating Disorders en 2020 et élaborées par un groupe de chercheurs.

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