Médicaments biologiques et thérapie ciblée pour l'asthme réfractaire grave

Selon Asthme Canada, 3,8 millions de Canadiens souffrent de cette maladie inflammatoire chronique et environ 250 000 d'entre eux souffrent d'asthme grave. Chaque année, 250 personnes en meurent au Canada. Ce n'est qu'à la fin des années 1990 qu'il a été suggéré que l'asthme pouvait être divisé en deux sous-types en se basant sur les voies inflammatoires. Depuis, des voies inflammatoires plus spécifiques ont été identifiées et un certain nombre de médicaments biologiques les ciblant ont été mis au point. «Les biomédicaments ne conviennent pas à tous les patients, mais pour ceux chez qui ils sont indiqués, les changements dans la qualité de vie et dans la maîtrise de l'asthme sont souvent spectaculaires. Ils ont changé la donne d’une façon assez impressionnante pour les asthmatiques graves», a déclaré le Dr Harold Kim, chef de la division d'Immunologie clinique et d’allergologie à l'Université Western, en Ontario. Il a mené des recherches sur le sujet et a participé à une table ronde lors de la récente conférence annuelle virtuelle de la Société canadienne de thoracologie. «Pour ce qui est de la prise en charge, nous avons divisé (les types d'asthme) de manière relativement simple en deux grands groupes ou «phénotypes». Le premier est celui des asthmatiques de type 2 (T2), qui sont souvent (mais pas toujours) allergiques et qui peuvent avoir des polypes nasaux et de l'asthme», a-t-il déclaré dans une interview au Medical Post. Les asthmatiques de type T2 présentent un asthme éosinophilique allergique et non allergique. Les éosinophiles sont un type de globules blancs qui favorisent l'inflammation, mais les asthmatiques chroniques graves peuvent avoir d'autres types de cellules inflammatoires qui contribuent au processus ainsi qu'un nombre élevé d'éosinophiles. Le deuxième type d'asthme, non de type 2, n'est pas aussi bien étudié ou compris, et il y a encore un manque de traitements efficaces pour les patients appartenant à cette catégorie. La majorité des patients se situent dans la catégorie T2 et, parmi eux, de 5 à 10% souffrent d'un asthme difficile à maîtriser ou grave. Selon les directives de la Global Initiative for Asthma (GINA), l'asthme grave est un asthme «non maîtrisé malgré l'adhésion au traitement optimisé maximal et le traitement des facteurs contributifs, ou qui s'aggrave lorsque le traitement à haute dose est diminué». En d'autres mots, les inhalateurs combinés à haute dose ne suffisent pas. Il y a près de 10 ans, l'omalizumab a été le premier médicament biologique dont l'utilisation a été approuvée pour les asthmatiques modérés à graves. Depuis, quatre autres ont été approuvés, chacun ciblant des voies légèrement différentes. Par exemple, l'omalizumab est un anticorps neutralisant les IgE, tandis que le mépolizumab et le réslizumab sont des inhibiteurs de l'interleukine-5 (IL-5). Le benralizumab est un antagoniste des récepteurs de l'IL-5 et le dupilumab est un antagoniste de l'IL-4/13. À l'avenir, nous pourrions avoir des médicaments qui ciblent la lymphopoïétine thymique stromale (TSLP), l'IL-25, l'IL-33 ou d'autres cellules inflammatoires, selon une récente étude portant sur les médicaments. Selon le Dr Kim, il n'est pas toujours facile de décider quels patients devraient recevoir quel médicament biologique. Mais tester la fonction pulmonaire est essentiel pour confirmer qu'un patient est réellement asthmatique, car les symptômes respiratoires peuvent être causés par un reflux, une sinusite, des problèmes coronariens ou d'autres pathologies. Des études suggèrent que jusqu'à 30% des patients traités pour l'asthme n'en souffrent peut-être même pas, a-t-il ajouté. Des tests tels que la spirométrie, les tests de débit expiratoire maximal et parfois des tests de provocation à la méthacholine sont nécessaires. En même temps, il peut être difficile de déterminer qui présente des symptômes accrus en raison d'une mauvaise observance ou adhésion aux médicaments. Une étude qui a mesuré le manque d'observance chez des asthmatiques difficiles à contrôler et potentiellement éligibles à des médicaments biologiques, a révélé que près de la moitié d'entre eux ne respectaient pas les traitements préventifs. Elle a également constaté que le taux d'éosinophiles sériques était plus élevé chez les patients non adhérents. Diriger les patients qui résistent au traitement vers le bon intervenant Les patients qui ne répondent pas bien au traitement par inhalateur combiné à haute dose, quelle qu'en soit la raison, doivent être dirigés vers un spécialiste de l'asthme, indique le Dr Kim. Après avoir fait tester leur fonction pulmonaire, les patients peuvent alors subir un test phénotypique pour mesurer le nombre d'éosinophiles et les niveaux d'IgE, ainsi que des tests d'allergies cutanés et un bilan sanguin complet. La numération des éosinophiles permet de déterminer les médicaments biologiques auxquels un patient peut prétendre, car ils ont des seuils différents. Les médicaments biologiques ne sont pas bon marché et coûtent environ 30 000$ par an. «Pour obtenir ces médicaments, les patients doivent présenter certains niveaux d'éosinophiles et d'IgE afin d’être couverts par les régimes privés ou provinciaux», explique le Dr Kim. La plupart des médicaments biologiques sont administrés par injection sous-cutanée, à l'exception du réslizumab qui est administré par voie intraveineuse, ce qui explique pourquoi il est utilisé moins fréquemment que les autres. Les injectables sont administrés, selon le médicament, une fois toutes les deux semaines ou tous les deux mois. Les patients sous traitement biologique doivent être réévalués tous les trois à six mois. Si un médicament biologique fonctionne bien, les stéroïdes inhalés ou d'autres médicaments peuvent être diminués. Si un patient ne répond pas bien, il faut le réévaluer et peut-être essayer un produit biologique différent ou d'autres traitements. Les médicaments biologiques sont bien tolérés par la plupart des patients, a déclaré le Dr Kim. Il a noté que l'omalizumab présente un faible risque de réaction allergique, que le mépolizumab a été associé au zona dans de rares cas et que le dupilumab «présente un faible risque d'augmentation puis de diminution des éosinophiles. De plus, certains cas de conjonctivite ont été signalés avec le dupilumab lorsqu'il est utilisé chez des patients qui souffrent également d'eczéma.»

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