Médecins de famille: la région de Québec affectée par le vieillissement et les départs à la retraite

Naguère bien nantie en médecins de famille, la grande région de Québec, incluant Charlevoix et Portneuf, est maintenant affectée par le vieillissement des effectifs et les fins de carrière et se retrouve en déficit. Des milliers de patients risquent de se retrouver orphelins si elle ne se voit pas allouer davantage de postes. Le ministère de la Santé a finalement reconnu l’existence du problème et lui a attribué cette année huit nouveaux facturants, une première en douze ans.Bon an mal an, la région de Québec perd par attrition autour de 26 médecins d’expérience. Des cliniques médicales ne savent plus à quel saint se vouer pour recruter des candidats ou remplacer les départs causés par la maladie, la retraite ou les décès. Elles doivent rivaliser d’audace pour attirer l’attention. En janvier dernier, l'une d'entre elles, la Clinique médicale-GMF Loretteville, a mis en ligne une capsule web afin de se vendre auprès des jeunes (voir ci-dessous). Ce GMF a en effet besoin de six nouveaux médecins de famille pour continuer à desservir ses 15 000 patients. Le Dr Simon-Pierre Proulx, responsable du GMF, a indiqué que les résultats de cette opération seraient connus d'ici la fin du mois.Plusieurs cliniques peinent à recruterLe président de l’Association des médecins omnipraticiens de Québec (AMOQ), le Dr Jacques Bouchard, n’est pas étonné. Des cliniques médicales en pénurie d’effectifs, il en voit à travers tout son territoire: la couronne nord de Québec, incluant Neufchâtel, Val-Bélair et Loretteville, la Basse-ville, le vieux Beauport, Limoilou-Vanier, des secteurs de Charlesbourg, des UMF, des CHSLD, etc.«Bref, il en manque à peu près partout», résume le Dr Bouchard en entrevue à ProfessionSanté.ca. Cette pénurie, explique-t-il, est principalement causée par le départ de médecins qui cessent leur pratique et ferment leur bureau, et par les PREM qui ne permettaient pas de les remplacer et de combler les postes vacants. L’impact se ferait particulièrement sentir pour la prise en charge et les soins en CHLSD.Selon les chiffres du Dr Bouchard, la Capitale nationale compte près de 900 médecins de famille actifs, mais tous ne font pas du cabinet. Un certain nombre occupe des postes administratifs, près de 200 travaillent à temps plein en milieu hospitalier, d’autres ont un type de pratique qui n’amène pas de prise en charge, et d’autres encore font beaucoup d’enseignement, ce qui leur laisse moins de temps pour la clinique.En outre, les effectifs actuels vieillissent. La moyenne d’âge des médecins de famille dans la Capitale nationale s’établit à 56 ans, estime le Dr Bouchard. Dans certaines cliniques, elle atteindrait les 60 ans. Plusieurs de ces médecins âgés suivent encore 2 500 patients et plus. Certains étirent leur carrière de quelques années en attendant l’arrivée de renforts pour ne pas laisser leurs patients sans médecin, mais tôt ou tard, ils délaisseront leur sarrau. Le départ de ces omnipraticiens qui ont de grosses cohortes risque de créer des milliers de patients orphelins s’ils ne sont pas remplacés. Plusieurs régions à travers le Québec vivent déjà cette situation.Huit nouveaux facturantsDepuis longtemps, ajoute le Dr Bouchard, les besoins ressentis sur le terrain dans son territoire étaient supérieurs aux besoins perçus par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Ce dernier refusait de les reconnaître et restait sourd aux appels à l’aide lancés par des cliniques. Ces dernières années, les PREM ont favorisé des régions où les manques d’omnipraticiens étaient beaucoup plus criants qu’à Québec. Toutefois, à force de présenter ses arguments et un portrait de la situation, l’AMOQ a fini par convaincre le ministère; elle a obtenu d’un seul coup huit nouveaux facturants en 2017.«C’est du jamais vu en 12 ans à Québec! s’exclame le Dr Bouchard. Dans le passé, nous en obtenions un ou deux par année.» À ces nouveaux facturants s’ajoutent le remplacement des nombreux départs causés par l’attrition et un facturant additionnel.Où sont les priorités?Face aux besoins de sa région, le Dr Bouchard se questionne sur les priorités du MSSS.«Si c’est la prise en charge, alors on va sortir les médecins de famille des hôpitaux et les attribuer davantage à des postes qui amènent de la prise en charge, dit-il. On va moins en manquer dans les cabinets. Mais si le ministère veut maintenir des omnipraticiens en milieu hospitalier plutôt que de confier leurs tâches à des spécialistes, qui déplace-t-on?»Optimiste quand mêmeMalgré ce tableau inquiétant, le président de l’AMOQ demeure optimiste. Il parle de creux passager et compte sur l’arrivée de centaines de nouveaux médecins qui vont sortir des facultés pour combler les besoins. Il croit que les problèmes actuels pourraient être résorbés d’ici deux à trois ans.

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