Masque médical ou N95: lequel est le plus efficace en milieu de soins?

Alors que le variant Omicron se montre plus contagieux et que la question d’étendre l’usage des masques N95 à davantage de travailleurs, notamment aux enseignants, revient régulièrement lors des points presse du gouvernement, l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) a souhaité apporté des précisions. «Il s’agissait de mettre à jour notre précédente étude sur les équipements de protection individuelle, qui datait de septembre 2020, et ce qui nous inquiétait, c’est que l’on dise que les N95 sont meilleurs que les autres», indique le médecin-conseil en santé au travail à l’Institut, le Dr Stéphane Perron. Or, dans des contextes de travail réels, les masques N95 comme les masques médicaux sont «efficaces pour prévenir l’infection du SRAS-CoV-2 et les connaissances scientifiques ne permettent pas de démontrer que l’un est supérieur à l’autre», concluent les auteurs de cette revue de littérature publiée jeudi, mais qui est datée du 7 janvier dernier. Selon des données de tests expérimentaux en laboratoire, le masque N95 demeure plus efficace que le masque médical pour réduire l’exposition aux aérosols de petite taille, à la condition d’être bien porté et ajusté. «Toutefois, cette efficacité théorique est moins claire sur le terrain, peut-on lire dans la revue. Les données épidémiologiques disponibles, provenant de différents contextes de travail réels dans les milieux de soins, ne permettent pas de statuer à ce jour que le masque médical est moins efficace que le N95 pour prévenir l’infection à l’influenza et au SRAS-CoV-2. Ces différences entre la théorie et la pratique sont difficiles à expliquer, convient le Dr Perron. «Les mécanismes de transmission du virus sont complexes et les études épidémiologiques sur les masques comportent beaucoup d’hypothèses et d’incertitudes», explique-t-il. De quelle qualité étaient les masques portés? Étaient-ils bien portés? Quelles étaient les conditions de ventilation du lieu? Quelle était la charge virale des individus? Étaient-ils vaccinés? Etc. «On ne peut pas discuter de ce que l’on ne sait pas. Ce qui est clair en revanche, poursuit le médecin-conseil, c’est qu’on ne peut pas statuer à ce jour que le masque médical est moins efficace que le N95, mais on peut affirmer qu’il est adéquat pour éviter une exposition à des doses de virus pouvant provoquer une infection.» Parmi les pistes d’explication de la non-supériorité des masques N95, les auteurs de la revue mentionnent que «les études suggèrent que l’inconfort et l’anxiété générés par le port du N95 sont plus importants que pour le masque médical et que le port de ce dernier était toléré pendant de plus longues périodes. » Ils signalent également qu’«il est possible que l’ajustement optimal du N95 soit difficile à conserver en tout temps en situation de travail avec mouvements.» «Aucun masque n’est parfait. Il est important de choisir un masque adapté à chaque situation, et surtout, de le porter correctement», conclut ainsi le Dr Stéphane Perron. Des conclusions contestées Coordonnatrice scientifique du collectif COVID-STOP, Nancy Delagrave s’étonne des conclusions de la revue de littérature de l’INSPQ. Elle questionne notamment le choix des études considérées et cite plusieurs autres recherches scientifiques qui «démontrent que les N95 offrent de 6 à 50 fois plus de protection que les masques médicaux dépendamment du contexte. La plus grande experte des masques au Québec, Geneviève Marchand, de l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail, dit également que les masques médicaux ne sont pas suffisants pour se protéger des virus inhalables comme celui de la COVID-19», ajoute la physicienne de métier. Elle constate aussi que la revue «ne parle que des N95, qui ont une coque rigide. On passe à côté des masques KN95, qui sont souples et plus commodes à porter. J’en ai donné à mes proches, et ils les ont trouvés plus confortables que les masques médicaux», ajoute la coordonnatrice scientifique de COVID-STOP qui plaide pour que les masques KN95 soient généralisés au Québec, comme c’est le cas en Allemagne, en Autriche ou au Manitoba.» Les KN95 ne figurent pas dans la revue de l’INSPQ, car «ils présentent de grandes variations de qualité», indique le Dr Stéphane Perron qui souligne que les N95 et les masques médicaux doivent répondre à des normes précises «alors que les KN95 ne sont pas normés en Amérique du Nord». Le médecin-conseil en santé au travail de l’INSPQ rappelle enfin que le port du masque est d’autant plus efficace lorsqu’il est associé à d’autres mesures, telles que la vaccination et l’optimisation de la ventilation. «L’exclusion des cas et des personnes symptomatiques, l’isolement des contacts à risque, la réduction de la fréquence et la durée des contacts, la distanciation physique, la présence de barrières physiques appropriées et l’hygiène des mains sont des mesures qui vont diminuer la transmission du SRAS-CoV-2 chez les travailleurs», ajoutent les auteurs de la revue.

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