Les femmes noires plus à risque de développer un lymphœdème lié au cancer du sein

Les femmes noires sont nettement plus susceptibles de développer un lymphœdème lié au cancer du sein que les femmes blanches. Celles d’origine hispanique peuvent également présenter un risque accru. Ces données proviennent d’une étude prospective menée auprès de patientes atteintes d’un cancer du sein et ayant subi un curage des ganglions lymphatiques axillaires (CGLA). Le lymphœdème est une complication connue après une chirurgie axillaire pour un cancer du sein, mais le rôle des origines raciales ou ethniques dans ces complications n’avait pas été clairement établi. Les chercheurs ont cherché à savoir si les taux de lymphœdème déclenché par le CGLA différaient selon la race et l’ethnie. Les résultats ont été présentés au San Antonio Breast Cancer Symposium par le médecin-référent du Memorial Sloan Kettering Cancer Center, à New York, la Dre Andrea Barrio. «Le lymphœdème du cancer du sein est une complication fréquente et grave après une chirurgie axillaire. Le curage des ganglions axillaires reste le principal facteur de risque de développement d’un lymphœdème. D’autres facteurs de risque importants, tels que l’âge avancé, l’augmentation de l’indice de masse corporelle, la chimiothérapie systémique ou les régimes contenant des taxanes et la radiothérapie, ne sont pas cohérents dans les études», a ajouté la Dre Barrio. Pour cette étude, des femmes âgées de 18 ans et plus atteintes d’un cancer du sein et qui ont subi un CGLA unilatéral entre novembre 2016 et mars 2020 — soit dans le cadre d’un traitement primaire, soit après une biopsie du ganglion lymphatique sentinelle — ont été recrutées. Les mesures du volume du bras (effectuées avec un peromètre doté d'un cadre coulissant et d'un capteur de lumière infrarouge pour mesurer le volume du bras) et l’indice de masse corporelle (IMC) ont été évalués au début de l’étude, après l’opération et à des intervalles de six mois. Une augmentation du volume du bras de 10% ou plus par rapport au début de l’étude constituait un diagnostic de lymphœdème. Un total de 276 femmes qui avaient au moins une mesure longitudinale supérieure à la mesure de référence ont été incluses dans les analyses finales. Soixante pour cent (166) des patientes étaient de race blanche, 20% (55) étaient noires, 11% (29) étaient asiatiques et 6% (16) étaient hispaniques. Au départ, l’IMC était plus élevé chez les femmes noires et hispaniques (IMC médian de 30,3 kg/m2 et 28,1 kg/m2, respectivement) que chez les femmes caucasiennes et asiatiques (qui avaient un IMC médian de 25,2 kg/m2 et 22,2 kg/m2, respectivement). Les femmes noires et hispaniques étaient plus susceptibles d’être cliniquement positives aux ganglions que les femmes blanches et asiatiques. L’incidence du lymphœdème varie aussi en fonction du traitement Au départ, l’IMC était plus élevé chez les femmes noires et hispaniques (IMC médian de 30,3 kg/m2 et 28,1 kg/m2, respectivement) que chez les femmes blanches et asiatiques (qui avaient un IMC médian de 25,2 kg/m2 et 22,2 kg/m2, respectivement). Les femmes noires étaient plus susceptibles d’avoir un cancer de stade 1 (cancer qui s’est propagé dans un à trois ganglions lymphatiques axillaires) et les femmes hispaniques plus susceptibles d’avoir un cancer de grade 2 ou 3 (qui s’est propagé à quatre ganglions lymphatiques ou plus) par rapport aux femmes caucasiennes et asiatiques. Au total, 70% de la population étudiée a reçu une chimiothérapie néoadjuvante et 26% une chimiothérapie adjuvante. Globalement, 95% des patientes ont reçu une radiothérapie et 93% ont subi une radiothérapie ganglionnaire. Dans l’ensemble, 94% des patientes ayant reçu une chimiothérapie ont eu un traitement comprenant des taxanes. Les femmes noires et hispaniques étaient plus susceptibles de subir une chirurgie mammaire conservatrice et toutes (100%) ont reçu une radiothérapie nodale, contre 92% des femmes blanches et 86% des femmes asiatiques. Après un suivi médian de 22,6 mois, 56 femmes ont développé un lymphœdème lié au cancer du sein, avec des différences notables selon la race et l’ethnie. L’incidence du lymphœdème était la plus élevée chez les femmes noires, avec un taux à deux ans de 39,4%, contre 27,7% chez les femmes hispaniques, 23,4% chez les femmes asiatiques et 20,5% chez les femmes caucasiennes. L’incidence du lymphœdème variait également selon le groupe de traitement, celle-ci étant deux fois plus élevée chez les femmes traitées par chimiothérapie néoadjuvante que chez celles ayant subi une chirurgie d’emblée (30,9% et 11,1% respectivement), a déclaré la Dre Barrio. «La chimiothérapie néoadjuvante augmente significativement le lymphœdème par rapport au traitement adjuvant chez les femmes subissant un CGLA et une radiothérapie», a précisé la médecin. D’autres facteurs étaient également associés, de manière indépendante, à un risque accru de développer un lymphœdème, notamment un âge plus avancé, des intervalles de suivi plus longs. Mais dans l’ensemble, le fait d’être noire était le facteur prédictif le plus fort du développement d’un lymphœdème. «Nous devons reconnaître ce phénomène» Dans l’ensemble, les femmes noires étaient 3,5 fois plus susceptibles d’avoir un lymphœdème que les femmes caucasiennes, a affirmé la Dre Barrio. Les femmes hispaniques avaient quant à elles trois fois plus de risque d’en développer un que leurs homologues blanches. En raison de leur faible nombre dans l’étude, toutefois, d’autres recherches doivent être menées pour le confirmer. Les études futures devraient chercher à expliquer pourquoi les femmes noires sont plus susceptibles de développer un lymphœdème associé au cancer du sein. La Dre Barrio a noté qu’il pourrait y avoir une différence fondée sur la race dans les réactions inflammatoires, la fibrose tissulaire et la fonction lymphatique. Selon la Dre Virginia Kaklamani, professeure de médecine à l’Université du Texas à San Antonio, il s’agit d’une étude importante «qui examine le rôle de l’ethnicité dans les effets indésirables potentiels de nos traitements». La médecin n’a pas été impliquée dans cette recherche, mais elle a pris la parole lors de la conférence. «Nous savons déjà que les femmes afro-américaines ont un taux plus élevé de cancer du sein triple négatif, qui est l’un des cancers du sein les plus agressifs à traiter. Nous constatons maintenant, dans le cadre d’un essai bien mené, que les femmes afro-américaines présentent un risque plus élevé de lymphœdème. Je pense qu’il est important pour nous d’être en mesure de reconnaître ce phénomène, de reconnaître les symptômes à un stade précoce et de traiter nos patientes de manière préventive afin de les empêcher de se retrouver dans la même situation que ces patientes», a-t-elle déclaré.

Les femmes noires plus à risque de développer un lymphœdème lié au cancer du sein

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes