Les cellules immunitaires qui luttent contre le cancer s'épuisent dans les heures suivant leur première rencontre avec les tumeurs

L'une des principales fonctions de notre système immunitaire est de détecter et d'éliminer les agents pathogènes étrangers tels que les bactéries et les virus. Les cellules immunitaires comme les lymphocytes T y parviennent en faisant la distinction entre les différents types de protéines présentes dans les cellules, ce qui leur permet de détecter la présence d'une infection ou d'une maladie. Un type de cellule T appelé cellule T cytotoxique peut reconnaître les protéines mutantes des cellules cancéreuses et devrait donc être en mesure de les tuer. Cependant, chez la plupart des patients, les cellules cancéreuses se développent de manière incontrôlée malgré cette présence. Les scientifiques expliquent actuellement que les cellules T ne parviennent pas à éliminer les cellules cancéreuses par le fait qu'elles sont «épuisées». L'idée est que les lymphocytes T fonctionnent bien lorsqu'ils sont confrontés pour la première fois à des cellules cancéreuses, mais qu'ils perdent progressivement leur capacité à les tuer après des rencontres répétées. Les immunothérapies anticancéreuses telles que les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire et la thérapie cellulaire CAR-T se sont révélées remarquablement prometteuses en induisant une rémission durable chez certains patients atteints de cancers autrement incurables. Cependant, ces thérapies ne parviennent souvent pas à produire des réponses à long terme chez la plupart des patients, et l'épuisement des lymphocytes T en est l'un des principales causes. Nous sommes des chercheurs qui étudient les moyens d'exploiter le système immunitaire pour traiter le cancer. Des scientifiques comme nous se sont efforcés de déterminer les mécanismes qui contrôlent l'efficacité des cellules T contre les tumeurs. Dans notre recherche récemment publiée, nous avons découvert que les cellules T s'épuisent quelques heures après avoir rencontré des cellules cancéreuses. Le début de l'épuisement des lymphocytes T Lorsque la plupart des patients reçoivent un diagnostic de cancer, leur système immunitaire a interagi avec les cellules cancéreuses en développement pendant des mois, voire des années. Nous avons voulu remonter plus loin dans le temps pour comprendre ce qui se passe lorsque les lymphocytes T rencontrent pour la première fois des cellules tumorales. Pour ce faire, nous avons utilisé des souris génétiquement modifiées pour développer des cancers du foie au fur et à mesure qu'elles vieillissent, de la même manière qu'ils se développent chez l'homme. Nous avons introduit des cellules T cytotoxiques traçables qui reconnaissent spécifiquement les cellules cancéreuses du foie afin d'analyser la fonction des cellules T et de surveiller quels gènes sont activés ou désactivés au fil du temps. Nous avons également utilisé ces mêmes cellules T traçables pour étudier leur réponse chez des souris infectées par la bactérie Listeria. Chez ces dernières, nous avons constaté que les cellules T étaient très fonctionnelles et qu'elles éliminaient les cellules infectées. En comparant les différences entre les cellules T dysfonctionnelles des tumeurs et les cellules T hautement fonctionnelles des souris infectées, nous pouvons identifier les gènes codant les protéines essentielles que les cellules T utilisent pour réguler leur fonction. Dans nos travaux précédents, nous avions constaté chez la souris que les cellules T devenaient dysfonctionnelles et que leur structure génétique était radicalement modifiée dans les cinq jours qui suivaient leur rencontre avec des cellules cancéreuses. À l'origine, nous avions décidé de nous concentrer sur les tout premiers moments après la rencontre des cellules T avec des cellules cancéreuses chez des souris atteintes d'un cancer du foie ou d'un mélanome métastatique, parce que nous pensions qu'il y aurait moins de changements génétiques. Cela nous aurait permis d'identifier les régulateurs les plus précoces et les plus critiques du dysfonctionnement des cellules T. Au lieu de cela, nous avons découvert de multiples signes surprenants de dysfonctionnement des cellules T dans les six à douze heures suivant leur rencontre avec des cellules cancéreuses, y compris des milliers de changements dans la structure génétique et l'expression des gènes. Nous avons analysé les différents gènes et voies de régulation des cellules T rencontrant des cellules cancéreuses par rapport à ceux des cellules T rencontrant des cellules infectées. Nous avons constaté que les gènes associés à l'inflammation étaient fortement activés dans les cellules T interagissant avec les cellules infectées, mais pas dans celles interagissant avec les cellules cancéreuses. Lire aussi: L’ADN circulant, une nouvelle arme simple et rapide dans le diagnostic et le suivi des cancers Ensuite, nous avons étudié l'évolution dans le temps des premiers changements apportés à la structure génétique des cellules T. Nous avons constaté que les changements très précoces de l'ADN étaient plus marqués dans les cellules T que dans les cellules infectées. Nous avons observé que les premières modifications de l'ADN étaient stabilisées et renforcées par une exposition continue aux cellules cancéreuses, ce qui avait pour effet d'«imprimer» des modèles d'expression génique dysfonctionnels dans les cellules T. Cela signifie que lorsque les cellules T ont été retirées des tumeurs après cinq jours et transférées à des souris exemptes de tumeurs, elles sont restées dysfonctionnelles. Renforcer l'élimination des lymphocytes T Dans l'ensemble, nos recherches suggèrent que les cellules T dans les tumeurs ne travaillent pas nécessairement très fort et s'épuisent par la suite. Au contraire, elles sont bloquées dès le départ. En effet, les signaux négatifs que les cellules cancéreuses envoient à leur environnement induisent un dysfonctionnement des cellules T, et l'absence de signaux positifs tels que l'inflammation empêche les cellules T de passer à la vitesse supérieure. Notre équipe explore actuellement des stratégies visant à stimuler les voies inflammatoires dans les cellules T qui rencontrent des cellules cancéreuses, afin qu'elles fonctionnent comme si elles étaient confrontées à une infection. Nous espérons que cela aidera les cellules T à tuer plus efficacement leurs cibles cancéreuses. Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.

Les cellules immunitaires qui luttent contre le cancer s'épuisent dans les heures suivant leur première rencontre avec les tumeurs

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes