L'après PL 20: la balle est dans le camp des médecins de famille

«L’étude du projet de loi 20 continue. La loi peut même être adoptée, mais elle ne s’appliquera pas aux médecins de famille», a affirmé Gaétan Barrette. Même si la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec a signé, le 25 mai, une entente de principe avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, la Commission de la santé et des services sociaux commencera l’étude détaillée du projet de loi 20 comme prévu le 26 mai.Les omnipraticiens devront toutefois relever leurs manches pour inscrire de nouveaux patients. Ils ont jusqu’au 31 décembre 2017 pour que 85 % des Québécois aient un médecin de famille. La première cible à atteindre est une augmentation de 3 % dans les sept premiers mois, soit à peu près 240 000 nouveaux patients. Les médecins de famille doivent aussi trouver les moyens d’assurer la prise en charge des patients inscrits, avec un taux national d'assiduité de 80 %.Et tout cela avec «une méthode de suivi périodique conjointe de l'évolution et de la progression de l'accès», a insisté le ministre de la Santé. Si nécessaire, ce sera à la FMOQ de trouver les moyens d’obtenir ces résultats par une «intervention interne».Le Dr Louis Godin, président de la FMOQ, dit avoir obtenu l’aval de 142 des 143 délégués du Conseil général avant de signer l’entente. Un engagement suffisant, selon lui, pour ne pas avoir besoin d’aller chercher le vote de tous les médecins de famille.«Les résultats seront là», assure-t-il d’ailleurs, car deux éléments vont considérablement changer les choses: «La révision des AMP, ainsi que la révision de la façon dont on établit les PEM. Et notamment cette nouvelle façon qui va permettre de garantir des effectifs médicaux aux GMF.» Selon le président de la FMOQ, plusieurs GMF se sont retrouvés en difficulté parce qu’on n’a jamais été capable de prioriser ces endroits-là pour que les médecins aillent s’y installer.L’accès passe par l’abolition des AMP et la révision des PEMLe Dr Godin persiste et signe, la première ligne est en difficulté car les médecins de famille sont principalement à l’hôpital. Il s’agit donc de faire en sorte que le pourcentage de l’activité des médecins de famille en établissement soit moins important qu’aujourd’hui. En bref, ceux qui voudront continuer de travailler à l’hôpital pourront le faire, mais ceux qui veulent faire plus de bureau le pourront aussi, pourvu que globalement ils répondent aux besoins de la population où ils pratiquent.«Ce que l’on veut faire surtout, c’est empêcher que continue à augmenter la présence de médecins de famille dans les hôpitaux, pour que l'ajout net de médecins au cours des prochaines années soit vraiment concentré dans les cabinets et les CLSC où l’on suit de la clientèle», a précisé le Dr Godin.Et pour ce faire, on fait évoluer les plans d’effectifs médicaux. Le Québec va être quadrillé, non plus en fonction de régions administratives, mais en fonction «des besoins de la population», a expliqué Gaétan Barrette.Changer l’environnement de pratiqueLes médecins ont pris des engagements «solides». De son côté, le ministre ne met pas d’argent «neuf» sur la table, mais il est très conscient qu’il y a des corrections à apporter. «Nous, on s’engage comme gouvernement à faire, à la hauteur de nos moyens, une mise à niveau nécessaire pour faire en sorte que le médecin de famille, qui est en CLSC par exemple, ait accès à des outils qui lui permettent de livrer la marchandise», assure le ministre.Parmi ces outils, Gaétan Barrette et le Dr Godin ont mis de l’avant l'informatisation de la première ligne, un accès «raisonnable en temps» aux plateaux techniques et aux consultations spécialisées, et des mesures pour favoriser le travail interprofessionnel.Entre autres solutions de la FMOQ pour améliorer l’accès à un médecin, l’accès avancé a aussi été mis de l’avant par le ministre et le Dr Godin. Ce dernier est sûr que l’on va bientôt voir des progrès, même si seulement 400 médecins ont suivi la formation de la FMOQ dans ce domaine. «Le médecin en question vient avec le personnel de la clinique, donc il y a un effet de groupe, car il transmet cela à ses collègues», affirme le président qui n’envisage pas cependant d’incitatif pour accélérer son adoption.Il dit aussi avoir reçu des engagements très clairs du gouvernement pour l’amélioration de l’accès au plateau technique. Le ministre ira avec le Dr Godin dans les CLSC et les UMF pour constater les conditions de pratique des médecins de famille: «Il y a des choses carrément inacceptables. Le médecin est encore obligé d’envoyer lui-même ses fax, de sortir ses dossiers ou de classer ses papiers», assure ce dernier.Côté informatique aussi, on devrait voir des améliorations dans les mois à venir. Le Dr Godin reconnaît qu’il y a beaucoup de retard, notamment dans les CLSC et les UMF, mais, selon lui, cela va quand même de mieux en mieux. «En cabinet, on a fait de grands pas, on est déjà très avancé», a-t-il déclaré.La FMOQ mise aussi beaucoup sur l’interdisciplinarité. Selon le Dr Godin, le nouveau cadre de gestion prévoit l’ajout d’infirmières et d’autres professionnels. «C’est sûr qu’on va donc améliorer l’environnement du médecin dans le GMF avec d’autres professionnels pour qu’ils puissent davantage travailler avec eux et éclaircir toute la "question du lui-même"», a-t-il expliqué à ProfessionSanté.ca après la conférence de presse.Même si l’entente est signée, il y a encore beaucoup à faire, souligne le Dr Godin, «des choses plus urgentes, comme les AMP, car cela a des effets immédiats – il faut rapidement faire la preuve qu’on n'en a plus besoin –, mais aussi des choses qui concernent l’environnement favorable et qu’il faut également faire immédiatement».La question des modes de rémunération devrait être discutée plus tard, au début de 2016, en raison de la nouvelle nomenclature qui s’appliquera en cabinet «et qui devrait beaucoup simplifier les choses pour le médecin. Des discussions que la FMOQ avait déjà prévu avoir de toute façon et qui ne concerneront pas de nouvelles sommes d’argent».Le président de la FMOQ n’est pas inquiet non plus de savoir que le ministère et son association devront évaluer les progrès réalisés, même s’ils ont eu quelques démêlés, l’hiver dernier, en matière de chiffres. Un comité paritaire sera chargé de le faire et la FMOQ a obtenu l’engagement du ministère qu’on lui donnera accès aux données dont elle pourrait avoir besoin. Chaque mois, grâce à la facturation, le Dr Godin sait déjà à 95 % combien de nouveaux patients sont pris.Le Dr Godin estime aussi que la plupart des propositions amenées par d’autres groupes de médecins, notamment le Regroupement des omnipraticiens pour une médecine engagée (ROME), étaient déjà sur la table de travail. «Le seul élément nouveau était de travailler plus sur l’organisation locale, mais il faut comprendre qu'il existe déjà, à l’intérieur des départements régionaux de médecine générale, des tables locales où il y a cette capacité de travailler sur le plan de l’organisation», a-t-il expliqué. À LIRE AUSSI:PL 20: les médecins de famille ont deux ans et demi pour faire leurs preuves

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