L'adversité vous rend-elle plus fort? Pas toujours, disent les scientifiques

Après des événements traumatisants et des crises comme la maltraitance des enfants, la violence armée ou une pandémie, qu'est-ce qui explique que certaines personnes rebondissent alors que d'autres ont du mal à s'en sortir? Est-ce la nature - les gènes et autres traits de caractère inhérents? Ou de l'acquis – des expériences de vie et des interactions sociales? Des décennies de recherche suggèrent que les deux jouent un rôle, mais qu'aucun ne scelle le destin d'une personne. Bien que les scientifiques utilisent différentes définitions, la résilience fait généralement référence à la capacité de gérer un stress important. «Elle implique des comportements, des pensées et des actions qui peuvent être appris et développés chez n'importe qui», selon l'American Psychological Association. Selon les données disponibles, cet effort serait plus difficile pour certaines personnes en raison de la génétique, de la biologie et des circonstances de la vie. Des recherches américaines menées au milieu des années 1990 ont établi un lien entre les expériences négatives vécues durant l'enfance et une mauvaise santé mentale et physique à l'âge adulte. Il s'est avéré que toute adversité supplémentaire augmentait les risques par la suite. Les scientifiques ont mené de nombreuses études pour tenter de comprendre pourquoi certains enfants sont plus vulnérables que d'autres à ces expériences. Des recherches éclairantes Le Dr Thomas Boyce, pédiatre et chercheur californien, a décidé de creuser cette question en raison de sa propre histoire familiale. Sa sœur et lui, étaient extrêmement proches malgré des circonstances familiales parfois turbulentes et bien qu'elle soit de deux ans sa cadette. Alors qu'ils atteignaient l'âge adulte, la vie du jeune homme semblait être bénie par la chance, tandis que sa sœur sombrait dans les difficultés et la maladie mentale. Lors de tests en laboratoire, le Dr Boyce a découvert qu'environ un enfant sur cinq avait des réponses biologiques élevées au stress. Il a trouvé des signes d'hyperactivité dans la réaction de combat ou de fuite de leur cerveau et dans leurs hormones de stress. Dans le monde réel, il a été démontré que les enfants de ce type présentent des taux plus élevés de troubles physiques et mentaux lorsqu'ils sont élevés dans des situations familiales stressantes. Mais il a également été prouvé que ces enfants hypersensibles peuvent s'épanouir avec des parents qui les entourent et les soutiennent, affirme Dr Boyce. Selon les recherches d’Ananda Amstadter, qui étudie le stress traumatique et la génétique à l'Université Virginia Commonwealth en Virginie, la résilience au stress est influencée à moitié par les gènes et à moitié par des facteurs environnementaux. Elle a toutefois souligné que de nombreux gènes sont probablement impliqués; il n'existe pas de «gène unique de la résilience». Dans d'autres études, les chercheurs de l'Université Duke, Terrie Moffitt et Avshalom Caspi, ont établi un lien entre les variations des gènes qui aident à réguler l'humeur et les risques accrus de dépression ou de comportement antisocial chez les enfants qui ont été victimes de maltraitance ou de négligence. Mais «les gènes ne sont pas le destin», affirme le Dr Dennis Charney, président des affaires académiques du Mount Sinai Health System à New York, qui a étudié les moyens de surmonter l'adversité. Les traumatismes peuvent affecter le développement de systèmes cérébraux clés qui régulent l'anxiété et la peur. La psychothérapie et les médicaments psychiatriques peuvent parfois aider les personnes qui ont subi un traumatisme grave et des épreuves. Selon le Dr Charney, une famille aimante, un solide réseau d'amis et des expériences positives à l'école peuvent contribuer à contrebalancer les effets néfastes. De l’orphelinat à l’université Avec une petite enfance en Haïti marquée par la pauvreté et d'autres traumatismes, Steeve Biondolillo, 19 ans, semble avoir battu tous les records. Ses parents, désespérés, l'ont envoyé à l'âge de 4 ans dans un orphelinat, où il a vécu pendant trois ans. «Je ne comprenais pas vraiment ce qui se passait, se souvient-il. On m'a juste jeté dans une grande maison pleine d'enfants». Il se souvient s'être senti effrayé et abandonné, convaincu qu'il vivrait là pour toujours. Un couple d'Américains a visité l'orphelinat et a fait des projets d'adoption pour son jeune frère et lui. Puis est survenu le tremblement de terre dévastateur de 2010, qui a fait plus de 100 000 morts et décimé la capitale d'Haïti et les villes voisines. «Tout l'espoir que j'avais s'est soudainement envolé», a partagé Steeve Biondolillo. Finalement, l'adoption a eu lieu et la famille s'est installée dans l'Idaho, aux États-Unis. La nouvelle vie du jeune homme lui a offert des opportunités dont il n'avait jamais rêvé, mais il dit qu'il était toujours hanté par «le bagage et le traumatisme que j'avais en Haïti». Ses parents adoptifs l'ont fait participer à un club de garçons et de filles, un endroit où lui et son frère pouvaient aller après l'école pour être des enfants et s'amuser. Steeve Biondolillo dit que les adultes qui l'ont soutenu lui ont donné l'occasion de parler de sa vie, si différente de celle des autres enfants, et l'ont aidé à se sentir accueilli et aimé. Aujourd'hui, étudiant en deuxième année à l’université et se spécialisant dans le travail social, il envisage de faire carrière en travaillant avec les nécessiteux, en aidant à redonner et à nourrir les autres. Ce fut un voyage, dit-il, de «petit enfant effrayé à moi, jeune homme fier avec de grands objectifs et un grand avenir».

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