La Traversée de la Gaspésie en ski de fond : un secret bien gardé

Si vous cherchiez un médecin, du 19 au 25 février dernier, il y a de bonnes chances pour que vous en ayez trouvé un quelque part en Gaspésie, dans les parages des Chics-Chocs.En effet, ils étaient là, près d’une cinquantaine, médecins de famille, pédiatres, pneumologues, chirurgiens, anesthésistes, urgentologues et autres, à participer à la Traversée de la Gaspésie (TDLG)1 en ski de fond. Ils constituaient le plus important contingent parmi les 200 personnes inscrites à l’événement. Que faisaient-ils là ? Je me le demande bien ! Jugez-en par vous-même.Jour 1 - Mont Ernest Laforce et le lac aux AméricainsLa neige qui tombe drue camoufle, étouffe le paysage. Le chemin qui monte en montagne est exigeant. Plusieurs ressentent déjà de la fatigue. La plupart sont transis. Certains ont déjà des ampoules aux pieds. Puis arrive le sentier qui va du lac aux Américains aux mines Madeleine : une succession de montées abruptes et de descentes vertigineuses. Comment peut-on monter en « canard » quand les skis s’accrochent dans la broussaille qui longe le sentier et que les bâtons s’enfoncent jusqu’aux coudes dans la neige non damée ? Comment ralentir quand l’espace pour faire du chasse-neige manque ? Les chutes sont nombreuses. Voilà la longue descente des mines Madeleine vers le Gite du Mont Albert : 12 kilomètres en ligne droite, le capuchon rabattu, les doigts gelés et la « guédille » au nez.Jour 2 - Mont AlbertLe soleil est au rendez-vous, mais le froid et le vent aussi ! La vue sur les montagnes environnantes est majestueuse. Les sommets sont couverts d’une neige immaculée. D’en bas, on voit la poudrerie coiffer les sommets d’un blanc toupet. Arrivés à la cuve du Mont Albert, les vents sont impressionnants. Vaut mieux être bien habillé, sinon, gare aux engelures. Plusieurs se mettent à l’abri dans un refuge de fortune, taillé à même la neige. Ce jour-là, bon nombre retournent sans avoir réussi à atteindre le sommet.Jour 3 - Traversée du Barachois et ascension de la Canne-de-RocheJamais vu une telle montée. On est loin de Saint-Bruno et d’Oka. Plusieurs enlèvent leurs skis. Les plus chanceux ont des peaux de phoque. Et que dire de la descente vers Percé. Une déclinaison pentue de 17˚. Terrifiante !Jours 4, 5 et 6La température est plus douce, mais les conditions de fartage sont difficiles, presqu’insolubles. Aucune cire ne tient : ni la rouge, ni la violette, ni la bleue, pas davantage que la « Jack Rabbit – neige mouillée ». En désespoir de cause, certains appliquent du Klister… Mauvaise idée ! Essayez de faire 45 kilomètres de ski de fond en talons hauts avec des blocs de neige sous la semelle !Que faisaient donc cette cinquantaine de médecins, perdus en Gaspésie ?Les apparences sont souvent trompeuses ! Derrière chaque grande souffrance se cache souvent un grand réconfort. Sous le désespoir pointe souvent la lumière, la joie et la félicité.Arrivés au refuge du lac aux Américains, ils sont accueillis par des encadreurs qui leur offrent boissons chaudes et victuailles. Jamais tant apprécié un bouillon de poulet ! Le poêle dégage une chaleur bienfaisante. Des musiciens : accordéoniste, violoneux, guitariste et joueur de banjo vous apaisent de leurs couplets, vous enivrent de leurs mélodies. Troubadours de l’amour; magiciens de l’harmonie; jamais entendu un « Il était une fois dans l’ouest » si émouvant.La traverse du Barachois est impressionnante. Inondée de soleil. Que dire du passage sur les îlots de glace qui flottent sur les eaux en bordure de la baie ? Insolite ! Hallucinant ! À Val d’Espoir, tout le village s’est mobilisé pour les accueillir dans l’église du village; un p’tit verre de caribou; tartes au sucre et le sucre à la crème préparés par les fermières.Et cette descente à 17˚ : pas si pire une fois maîtrisée la technique dite « Bono » de son vrai nom Charbonneau, les bâtons entre les jambes en guise de freins. Et que dire du souper dans l’église de Percé et de l’arrivée à Gaspé sous le vol des Flexs et des Kites, et sous les applaudissements de la foule, venue les féliciter. Et pour couronner le tout, une petite bouchée, voire deux ou trois (!), de tire d’érable.La TDLG, c’est aussi un parcours où s’installent la complicité, les encouragements et la satisfaction d’avoir réussi.Alors, ne me demandez pas ce que je ferai du 17 au 23 février 2013. Comme plusieurs autres collègues, je succomberai à l’appel du défi. Je succomberai aux charmes du plaisir.Surtout, ne le dites à personne. C’est un secret bien gardé.P.S. : Avis à ceux qui, entre-temps, voudraient se faire la main… ou plutôt le mollet : la première édition de la TDLG en vélo cette fois aura lieu du 7 au 14 juillet prochain. www.tdlg.qc.ca/?page_id=29451. www.tdlg.qc.ca/?page_id=689

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