La première clinique du pied diabétique en centre hospitalier

Autrefois, la prise en charge des personnes souffrant de neuropathie diabétique et de plaies aux pieds s’apparentait à un parcours du combattant dans la région de Lanaudière, comme ailleurs au Québec. Ces patients devaient prendre des rendez-vous avec un chirurgien vasculaire, puis un podiatre et enfin avec une infirmière stomothérapeute. Rendez-vous qui pouvaient être espacés de plusieurs semaines et il n’était pas rare que ces patients, souvent défavorisés socioéconomiquement, ratent l’une ou l’autre de leurs consultations. Résultat, leur plaie s’infectait lentement mais sûrement, les mettant à risque de subir une amputation. Depuis octobre, la donne a changé. Grâce à un partenariat entre l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), le Centre intégré de santé et de services sociaux de Lanaudière et l’Université Laval, une clinique du pied diabétique a ouvert ses portes au centre hospitalier de Lanaudière. Elle est entièrement dédiée à l’évaluation et aux soins des plaies au pied des patients diabétiques. Sur place, ils sont accueillis par une équipe multidisciplinaire composée d’un chirurgien vasculaire, de podiatres et d’infirmières stomothérapeutes. Si besoin, pour les cas plus complexes, un infectiologue et un interniste sont également de garde, sur appel. «On optimise leur prise en charge. Ils voient tous les professionnels de la santé en un seul rendez-vous. Ainsi, on peut s’entendre de suite sur le plan de match et entreprendre des soins plus rapidement. Tout est canné à la première rencontre», indique Luce Martineau, une des infirmières stomothérapeutes de la clinique. Ce gain de temps et d’efficacité est souvent déterminant. «Ces patients n’ont pas conscience de leur pied. Ils peuvent marcher sur un clou sans avoir de signal d’alarme. Habituellement, ils viennent nous voir en catastrophe, quand ils risquent de perdre leur pied.» «En mettant en commun nos expertises au bénéfice du patient, on adresse un problème de santé publique émergent et exponentiel», explique Sébastien Hains. Podiatre et professeur clinicien au doctorat en médecine podiatrique de l’UQTR, il est l’une des chevilles ouvrières de la clinique. «Le pied diabétique est une épidémie sournoise», explique-t-il en estimant qu’environ 10% des 1,2 million de personnes diabétiques au Québec développent des ulcères plantaires. «Leur plaie se chronicise, s’infecte et comme ils ne la sentent pas, elle gagne les tissus profonds et les os, ce qui conduit à la gangrène. Avec la clinique, on cherche à intervenir en amont pour éviter les infections ou les traiter avant complications.» Par la même, «nous libérons des places dans le reste du réseau de la santé, en réduisant les visites à l’urgence, les hospitalisations et les amputations», ajoute le professeur Hains. À lire aussi: DT2: traitez-vous vos patients féminins et masculins différemment? Un modèle appelé à se multiplier Si cette clinique du pied diabétique est une première au Québec, elle n’est pas non plus révolutionnaire. Le chirurgien vasculaire Michel Legault en avait visité une du côté de Washington en 2011 et l’idée lui trottait dans la tête depuis ce temps-là. «C’était merveilleux. En moins d’une demi-journée, le patient voyait tous les intervenants concernés et ressortait avec toutes ses prescriptions. La prise en charge était centrée sur ses besoins, pas sur ceux des médecins», souligne le clinicien qui considère que ces cliniques multidisciplinaires «tout-en-un», dédiées à une condition (oncologie, cardiologie, grossesse, etc.), sont appelées à se multiplier. «C’est une manière pragmatique et très efficace de prendre en charge et de suivre les patients dans leur globalité.» En l’occurrence, le Dr Legault signale que «l’observance est améliorée, car on fait régulièrement des réunions multidisciplinaires pour suivre les patients de façon plus pointue». Depuis octobre, une quarantaine de personnes diabétiques en ont profité. «On a réussi à sauver 80 à 85% de leurs pieds et on a accru leur retour à la maison», mentionne le chirurgien vasculaire spécialisé dans le pied diabétique. À lire aussi: Soulager la première ligne en accompagnant des patients diabétiques La clinique a également une vocation académique grâce à la participation d’étudiants en podiatrie de l’UQTR, d’étudiants en médecine de l’Université Laval et de résidents en médecine familiale. «On veut devenir un centre d’excellence pour la prise en charge du pied diabétique en diffusant des informations probantes et en formant les médecins, les podiatres et les infirmières cliniciennes», indique Sébastien Hains qui entend «prendre le leadership sur la principale complication du diabète, qui est l’épidémie du 21e siècle».

La première clinique du pied diabétique en centre hospitalier

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