La metformine est-elle supérieure au clomiphène pour l'obtention d'une naissance vivante malgré l'infertilité liée au syndrome des ovaires polykystiques ?

Article de référenceLegro RS, Barnhart HX, Schlaff WD, Carr BR, Diamond MP, Carson SA et coll. Clomiphene, metformin, or both for infertility in the polycystic ovary syndrome. N-Engl J Med 2007. 8 février 2007; 356-: 551-66. RÉSUMÉ ObjectifChez des femmes infertiles atteintes d’un syndrome des ovaires polykystiques(SOPK), comparer l’efficacité de la metformine, du clomiphène et de la combinaison de ces deux médicaments à mener à une naissance vivante. ConceptionEssai clinique randomisé à double insu sans groupe placebo. ContexteÉtude multicentrique réalisée dans différents États américains entre novembre 2002 et février 2006. ParticipantesEn tout, 626 femmes infertiles âgées de 18 à 39 ans non diabétiques et en bonne santé. Les participantes devaient répondre aux critères du syndrome des ovaires polykystiques selon le National Institute of Health et selon les critères diagnostiques de Rotterdam révisés.Les femmes qui présentaient une autre cause d’infertilité(conjoint ayant moins de 20 millions de spermatozoïdes par millilitre, cavité utérine anormale ou absence d’une trompe perméable)ont été exclues, ainsi que celles qui étaient dans l’impossibilité d’avoir au moins une relation sexuelle aux deux à trois jours. InterventionsIl y a eu 208 participantes qui ont reçu la metformine à longue action, 209 le clomiphène et 209 la thérapie combinée(metformine plus clomiphène). Les participantes ont été traitées jusqu’à l’obtention d’un test de grossesse positif, ou pour un maximum de six cycles ou 30 semaines. Les femmes enceintes ont été suivies jusqu’à ce qu’une échographie prouve la viabilité fœtale. Les chercheurs ont ensuite révisé tous les dossiers obstétricaux. Principales mesures des résultatsLa mesure principale était le taux de naissances vivantes. Les mesures secondaires étaient les taux de fausses couches, de naissances uniques et d’ovulations. Résultats principauxPendant la durée de l’étude, 7,2 % des femmes sous metformine ont obtenu une naissance vivante, comparativement à 22,5 % des femmes sous clomiphène et à 26,8 % des femmes ayant reçu la thérapie combinée(p < 0,001 pour la metformine en comparaison avec les deux autres groupes et p = 0,31 pour le clomiphène en comparaison avec la thérapie combinée).Parmi les grossesses, 6 % étaient multiples dans le groupe clomiphène(dont une grossesse de triplés)et 3,1 % dans le groupe thérapie combinée. Aucune grossesse multiple n’a eu lieu chez les participantes recevant uniquement la metformine. Ces résultats sont cependant non significatifs. Les taux d’avortements du premier trimestre ne différaient pas entre les groupes. ConclusionLe clomiphène est plus efficace que la metformine pour l’obtention d’une naissance vivante chez les femmes infertiles atteintes d’un syndrome des ovaires polykystiques. COMMENTAIRE Pertinence de l’étude La metformine est de plus en plus utilisée dans les cas de SOPK en raison de ses effets bénéfiques sur le plan métabolique et de sa capacité à induire l’ovulation, alors que le clomiphène est associé à un taux élevé de grossesses multiples. Que peut-on dire à nos patientes infertiles atteintes d’un SOPK et qui désirent une grossesse au sujet des bénéfices et des risques de ces options thérapeutiques ? Importance des résultats Le clomiphène est plus efficace que la metformine pour aider les femmes infertiles atteintes d’un SOPK à avoir un bébé. La différence absolue entre les deux traitements a été de 15 %, soit un nombre de femmes à traiter de sept pour observer une naissance vivante de plus. Non seulement la metformine est moins efficace pour l’obtention d’une naissance vivante, mais le taux de naissances vivantes par cycle ovulatoire est significativement inférieur dans le groupe metformine que dans les deux autres groupes. Seulement 5,1 % des ovulations sous metformine se sont soldées par une naissance vivante, comparativement à 10,2 % et 9,6 % des ovulations dans les deux autres groupes. L’utilisation de la metformine pourrait donc ajouter un délai indu avant la naissance d’un enfant. Non seulement la metformine est moins efficace pour l’obtention d’une naissance vivante, mais le taux de naissances vivantes par cycle ovulatoire est significativement inférieur dans le groupe metformine que dans les deux autres groupes. Seulement 5,1 % des ovulations sous metformine se sont soldées par une naissance vivante, comparativement à 10,2 % et 9,6 % des ovulations dans les deux autres groupes. L’utilisation de la metformine pourrait donc ajouter un délai indu avant la naissance d’un enfant.Le taux de naissances vivantes obtenu avec la thérapie combinée n’est pas significativement supérieur à celui obtenu avec le clomiphène seul(p = 0,31), malgré un taux d’ovulations plus élevé(p = 0,003). Par ailleurs, l’utilisation de la metformine n’est pas associée à un risque plus élevé de complications de grossesse ou de fausses couches que le clomiphène, et certains effets positifs sur le plan métabolique ont encore été démontrés. Critique de la méthodologie Cette étude clinique randomisée à double insu présente une rigueur méthodologique qui nous semble adéquate. Les auteurs ont publié quatre autres articles détaillant chacune des étapes méthodologiques de cette vaste étude avant même la publication des résultats. À première vue, les groupes sont comparables. Il est intéressant que les chercheurs aient inclu des femmes ayant un IMC élevé(35,6 ± 8,5 pour la metformine, 36,0 ± 8,9 pour le clomiphène et 34,2 ± 8,4 pour la thérapie combinée)et qu’ils aient choisi une période de six mois ou six cycles pour la durée de l’étude, car ces éléments correspondent à la réalité de la pratique en première ligne. Des analyses post-hoc de sous-groupes stratifiés selon l’IMC ou l’exposition antérieure aux médicaments étudiés ont été faites ainsi que la recherche d’une relation temporelle entre le temps écoulé depuis le début de l’étude et les taux d’ovulations et de naissances vivantes. Surtout, la principale mesure de résultats est l’obtention d’une naissance vivante. Par contre, les critères d’inclusion n’étaient peut-être pas suffisamment rigoureux pour une étude sur l’infertilité. Par exemple, les participantes pouvaient n’avoir qu’une seule trompe perméable(la proportion de femmes n’ayant qu’une seule trompe perméable dans chaque groupe est inconnue)et il suffisait que le spermogramme du conjoint contienne au moins 20 millions de spermatozoïdes par millilitre, sans égard à leur morphologie et à leur motilité. Les taux d’abandons sont élevés(significativement plus élevés dans le groupe metformine). Mise en perspective selon l’état des connaissances Il est reconnu que la metformine utilisée seule dans le contexte d’un SOPK peut efficacement induire l’ovulation. Par contre, il n’existe pas de preuves suffisantes pour nous permettre de conclure que cette ovulation se traduit par une naissance vivante. En effet, les taux de naissances vivantes dans les petites études existantes ont engénéral été comparables à ceux obtenus avec le placebo ! D’autres études ont rapporté des taux d’ovulations et de grossesses sous metformine plus clomiphène supérieurs à ceux obtenus sous clomiphène seul. Cependant, la supériorité de la combinaison n’est maintenant reconnue que pour les femmes résistantes au clomiphène. L’ovulation et la grossesse ne sont pas directement liées à la naissance d’un enfant; d’autres facteurs entrent en jeu. L’unique mesure acceptable pour conclure à l’efficacité d’un traitement contre l’infertilité est donc la naissance d’un bébé en santé. L’impression générale que la metformine peut être un traitement efficace de l’infertilité liée au SOPK est donc présentement non fondée, et c’est ce que vient confirmer la présente étude. Références1. Guzick DS. Treating the polycystic ovary syndrome the old-fashioned way.N Engl J Med. 8 février 2007; 356-: 622-23.2. Johnson NP. No more surrogate end-points in randomised trials-: The PCOSMIC trial protocol for women with polycystic ovary syndrome using metformin for infertility with clomiphene. Australian and New Zealand Journal of Obstetrics and Gynaecology. 2006; 46-: 141-5.3. Neveu N, Granger L, St-Michel P, Lavoie HB. Comparison of clomiphene citrate, metformin, or the combinaison of both for first-line ovulation induction and achievement of pregnancy in 154 women with polycystic ovary syndrome.Fertil Steril. 2007; 87(1)-: 113-20.4. Siebert TI, Kruger TF, Steyn DW, Nosarka S. Is the addition of metformin efficacious in the treatment of clomiphene citrate-resistant patients with polycystic ovary syndrome ? A structured literature review. Fertil Steril. Novembre 2006; 86(5)-: 1432-7.5. Cheang KI, Sharma ST, Nestler JE.Is metformin a primary ovulatory agent in patients with polycystic ovary syndrome ? Gynecol Endocrinol. Novembre 2006; 22(11) : 595-604. 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