La FMOQ vent debout contre le projet de loi 11

L’étude du projet de loi 11 «visant à augmenter l’offre de services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la gestion de cette offre» a démarré ce mardi matin. Première concernée et première à prendre la parole, la FMOQ n’y est pas allée par quatre chemins lors des consultations particulières de la Commission de la santé et des services sociaux qui se tiennent jusqu’à jeudi. Ce projet de loi présenté par le ministre de la Santé, Christian Dubé, est «un choix politique irresponsable», une «gifle incompréhensible» aux omnipraticiens ainsi qu’«une attaque irréfléchie contre les intérêts des Québécois en matière de soins médicaux», a regretté la Fédération dans son mémoire déposé en amont des consultations. «Il ne règlera d’aucune manière la situation de la première ligne au Québec. Pire, il la dégradera encore plus» redoutait par écrit la FMOQ en demandant au gouvernement d’abandonner le PL11 et d’abroger «toutes les dispositions coercitives et pénalisantes de la loi 20.» Lors de son audition, le président de la Fédération, le Dr Marc-André Amyot, en a remis une couche. «Le ministre a parlé d’une main tendue, mais c’est une épée de Damoclès qu’il brandit. Ce projet de loi est une version actualisée de la loi 20. On ravive les pénalités et les sanctions», indique le Dr Amyot, ajoutant que ses pairs ne veulent pas être des boucs émissaires. «Les omnipraticiens ne sont pas la cause de tous les maux du réseau de la santé, et c’est odieux de le laisser croire. Ils font partie de la solution, mais ne sont pas la seule solution.» Première étape de la «refondation» du réseau de la santé souhaitée par le ministre Dubé, ce projet de loi prévoit d’obliger les omnipraticiens à «n’ajouter à leur clientèle que des personnes inscrites au Guichet d’accès à un médecin de famille». Ils seront aussi «tenus de se rendre disponibles auprès des personnes assurées par l’entremise du système de prise de rendez-vous» gouvernemental, l’objectif étant d’offrir aux patients orphelins une consultation en moins de 36 heures. Pour y arriver, le PL11 prévoit une série de dispositions pour mieux connaître l’emploi du temps et la charge de travail des omnipraticiens. «Ce n’est pas un projet de loi de punition, mais de gestion, dont le but n’est pas de contrôler [les omnipraticiens], mais de mieux répartir la ressource médicale», a indiqué Christian Dubé en introduction des consultations. Selon le ministre, le PL11 entend ajuster l’offre à la demande, «et on a besoin de données pour que les gestionnaires du réseau puissent mieux comprendre l’offre de soins afin d’adapter leur stratégie pour qu’on ait un réseau plus performant, qui réponde aux besoins de la population». Invité à un «dîner de cons» Ces données-là existent et elles sont déjà partagées, lui a répondu le vice-président de la FMOQ, le Dr Sylvain Dion. «Nos craintes portent sur l’utilisation de ces données. Le projet de loi reste vague et on s’inquiète de possibles abus.» Le ministre de la Santé a tenté de le rassurer en arguant que les médecins de famille «seraient les premiers à bénéficier de ces informations, sur une base régionale. Nous aurions tous les mêmes données», a ajouté Christian Dubé en appelant les omnipraticiens à faire preuve «d’ouverture d’esprit pour avancer ensemble». À propos du «power of data», le Dr Amyot a déclaré y souscrire avant de réaffirmer la volonté de collaboration de la FMOQ. «Mais encore faut-il collaborer de bonne foi», a-t-il poursuivi en déplorant avoir été «invité à un dîner de cons». «On a fait des propositions innovantes qui n’ont pas été écoutées et on ne nous a jamais interpellés sur le contenu du projet de loi 11.» Pour favoriser l’accès à la première ligne, la Fédération propose notamment de revoir les modalités de prise en charge des patients. «Les omnipraticiens ne peuvent pas assurer seuls tous les besoins de la population. C’est une responsabilité collective qui doit être partagée entre tous les professionnels de la santé. La prise en charge doit reposer sur une équipe de soins au sein de laquelle le médecin de famille est sollicité quand c’est nécessaire», détaille le Dr Amyot. Impossible de résoudre les problèmes en un clic S’agissant de la nouvelle interface de prise de rendez-vous que le ministère de la Santé veut déployer — le fameux «Trivago de la santé» —, le président de la FMOQ a souligné que «l’on ne réserve pas une chambre d’hôtel comme on prend un rendez-vous médical. C’est mal connaitre notre réalité. Les omnipraticiens traitent des humains, ils ne gèrent pas des marchandises», a-t-il martelé en concluant qu’il ne voyait «aucun point positif» dans ce projet de loi. «Il n’y a pas de mesures structurantes pour favoriser l’accès à la première ligne. C’est juste un projet de loi sur le contrôle étatique de la profession médicale.» Les consultations particulières de la Commission de la santé et des services sociaux sur le PL11 se déroulent jusqu’à jeudi, avec entre autres les contributions du Collège des médecins du Québec, de la Fédération des médecins spécialistes du Québec ou de l’Association des pharmaciens propriétaires du Québec. Les horaires des auditions se trouvent ici et elles peuvent être suivies en direct sur le site web de l’Assemblée nationale.

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