La fièvre chez l’enfant : pas de panique !

La fièvre chez l’enfant est un des motifs les plus fréquents de consultation à l’urgence et en clinique. Pourtant, bien des médecins ne savent pas comment intervenir et à quel moment ils doivent commencer à s’inquiéter.La majorité des enfants dans un bon état de santé général qui ont une infection virale bénigne à un moment donné n’auront pas nécessairement besoin d’investigation, souligne la Dre Nathalie Lucas, pédiatre au CHU Sainte-Justine. Le cas des nouveau-nés est cependant plus délicat.Chez les bébés de moins de 30 jours, on s’inquiète d’une température supérieure à 38 °C, prise par voie rectale, sachant que le pic de la variation nycthémérale se situe entre 16 et 18 heures. Pour les enfants de plus de 30 jours, on accepte une température légèrement supérieure de 0,5 à 0,6 °C. La température peut être prise par voie orale, mais on oublie les voies axillaire et auriculaire, non fiables.Chercher la causeContrairement à une idée largement répandue chez les parents, il est peu probable qu’une poussée dentaire provoque une fièvre. Il faut plutôt chercher une cause infectieuse, insiste le médecin, précisant que le degré de fièvre et la réponse aux antipyrétiques ne permettent pas de différencier une infection virale d’une infection bactérienne. Une hyperpyrexie supérieure à 41 °C indique toutefois plus souvent des infections bactériennes sérieuses qu’une fièvre légère ou modérée. Si la température est plus élevée que 42 °C, ce qui est très rare, on est plus certainement en présence d’une infection bactérienne grave ou de syndromes particuliers, souligne-t-elle.Les infections bactériennesLes infections bactériennes sérieuses qu’on rencontre chez les enfants de 3 à 36 mois sont la méningite, la pneumonie, l’infection urinaire, l’infection cutanée (cellulite) et l’épiglottite (avant vaccination).La majorité des enfants atteints d’une pneumonie auront des symptômes à l’examen, comme un syndrome respiratoire qui traîne depuis un moment. La pneumonie n’est pas toujours cliniquement évidente, mais on peut la prendre en considération si les globules blancs sont à plus de 20 000 et qu’il n’y a pas de foyer infectieux. La leucocytose est fréquemment associée à la pneumonie.Les enfants de 3 à 24 mois qui ont une température supérieure à 39 °C, sans foyer, pourraient avoir une infection urinaire. Les filles sont particulièrement vulnérables, avec une prévalence de 16 %. Les infections urinaires sont également plus fréquentes chez les garçons non circoncis, soit 10 à 25 %, comparativement à 2 à 4 % chez ceux qui le sont.Bactériémie et méningiteDepuis l’introduction de la vaccination, l’incidence de la bactériémie chez l’enfant en bon état de santégénéral et sans foyer infectieux est passée de 5 % (80 % pneumocoque et 20 % HIB) à moins de 1 %. Les germes infectieux sont également différents (E. coli. S. aureus, N. meningitidis, streptocoque du groupe A et Salmonella). L’incidence de la méningite a aussi beaucoup diminué après la vaccination. On la suspecte s’il y a des signes méningés et une altération de l’état général. Les signes et symptômes sont non spécifiques chez le nouveau-né ou le jeune enfant et les examens de laboratoire, pour vérifier entre autres le taux de globules blancs, sont de moins bons prédicteurs d’une bactériémie.La Dre Lucas souligne que l’approche de traitement sera moins « agressive » si l’enfant est vacciné.Investigation L’investigation dépendra de l’âge de l’enfant, de son état général, des symptômes spécifiques et des facteurs de risque. Mais la plupart du temps, il n’y aura pas d’investigation, souligne le médecin.Il faut retenir que l’enfant de moins de 30 jours est plus à risque de faire une infection invasive sévère. Il est aussi plus vulnérable en présence de certains germes plus virulents (streptocoque du groupe B, E. coli et Listeria monocytogènes) et n’a pas de protection vaccinale. Son état clinique est difficile à évaluer et peu fiable. L’intervention sera alors plus énergique : bilan septique complet et antibiotiques en intraveineuse. « Chez les moins de 30 jours, on intervient de façon très énergique. On fait un bilan dès qu’ils font 38 °C de fièvre, même si leur température a baissé lorsqu’ils se présentent à l’urgence. Ils sont très à risque », insiste la Dre Lucas.Chez l’enfant d’un à trois mois, le choix de la conduite est difficile, admet-elle. Il y a une baisse de susceptibilité, mais le risque demeure. Si on traite moins, on fait davantage d’investigation. Il y aura presque toujours une hémoculture, une ponction lombaire selon l’état général, ainsi qu’une hospitalisation avec antibiotiques en cas de détérioration de cet état. Un taux de globules blancs supérieur à 20 000 laisse suspecter une bactériémie ou une infection bactérienne grave.Pour les enfants de 3 à 36 mois qui ont un bon état général et dont la vaccination est à jour, il n’y aura pas d’investigation ou alors une investigation limitée. S’il y a altération de cet état légère à modérée, le médecin suggère de considérer un bilan septique, incluant une ponction lombaire et une période d’observation. En cas d’altération importante de l’état général, un bilan septique complet, une ponction lombaire et un traitement antibiotique en intraveineuse sont indiqués. Il faut de plus surveiller les signes méningés.La Dre Lucas rappelle que l’état général est un facteur important dans la conduite à tenir vis-à-vis de la fièvre. Dans le doute, on peut se donner du temps. Une période d’observation permet souvent de préciser un état général douteux chez un enfant.Lire la suite «Médecine d'urgence en région»

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