La Dre Bazile, installée au Québec pour fuir la violence et la mort en Haïti

Si l’on se fie aux statistiques, la majorité des DHCEU installés au Québec n’arriveront pas à se faire admettre en résidence ou à obtenir un permis de pratique régulier. Mais certains y parviennent et leur parcours du combattant mérite d’être raconté, comme celui de la Dre Marie Yolette Bazile.Cette gynécologue haïtienne est venue s’installer au Québec en 2003 pour fuir la violence urbaine dans son pays. Aujourd’hui, elle exerce en omnipratique dans l’Outaouais, après avoir terminé une résidence en médecine familiale en 2009, à l’Université Laval.Détentrice d’un « fellow » obtenu en France, la Dre Bazile exerçait la gynécologie en banlieue de Port-au-Prince. Elle craignait de plus en plus la violence endémique qui régnait à Haïti et vivait constamment avec la peur d’être agressée en pleine rue, dans son automobile ou dans sa demeure. Le vase a débordé quand l’un de ses confrères, spécialisé en orthopédie, a été assassiné dans la clinique où elle exerçait.Un jour, une femme s’y est présentée avec son mari victime d’une crise cardiaque. Elle a demandé à cet orthopédiste de se rendre à son chevet. Comme il n’était pas qualifié pour le faire, il lui a recommandé de prendre contact avec son médecin personnel. Devant l’insistance de la femme, l’orthopédiste est allé voir son époux, mais, à son arrivée, celui-ci était décédé. La veuve l’a alors accusé dans les tribunes radiophoniques d’être responsable de sa mort. À la suite de ses commentaires accusateurs, des tueurs ont débarqué à la clinique et ont froidement abattu l’orthopédiste. C’en était trop pour la Dre Bazile. Elle a pris la décision de quitter Haïti et de venir s’installer au Québec, quitte à devoir abandonner la médecine.Admise en résidenceUne fois installée au Québec, elle a réellement cru qu’elle devrait renoncer à la médecine et a entrepris un cours d’inhalothérapie. Parallèlement, elle a fait une demande d’obtention de permis régulier et passé avec succès les nombreux examens du Collège des médecins. Ce qui ne la qualifiait pas pour autant pour exercer. Elle a alors fait des demandes d’admission en résidence et a été admise en médecine familiale à l’Université Laval. Elle a accepté ce changement de cap, même si elle était médecin spécialiste en Haïti. Elle est entrée à Laval à 43 ans, soit au même âge que plusieurs de ses patrons. Elle a terminé cette résidence de deux ans et obtenu son nouveau diplôme l’an dernier. À 45 ans, elle a entrepris une toute nouvelle carrière en médecine de famille au CSSS de Pontiac, où elle peut occasionnellement exercer dans son ancien champ de compétence, l’obstétrique.Plusieurs DHCEU de sa connaissance n’ont pas, eux, été admis en résidence et sont incapables d’exercer leur ancienne profession au Québec. « Ça n’a pas été facile, mais je suis contente de l’avoir fait, témoigne-t-elle. Ici, je reçois le même salaire que tous les autres omnipraticiens, ce qui n’aurait pas été le cas si j’étais allée m’établir en France. »Sa décision lui a peut-être sauvé la vie, mais pour un facteur autre que la criminalité. Plusieurs de ses confrères d’Haïti sont en effet morts lors du tremblement de terre qui a ravagé le pays le 12 janvier dernier.LIRE LA SUITE DU DOSSIER

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