La dictée vocale pour gagner en efficacité

En attendant que des robots conversationnels, tels ChatGPT, remplissent la paperasse à la place des médecins, des solutions sont déjà à l’œuvre pour soulager les cliniciens de leurs tâches cléricales. Dans les départements de radiologie et de médecine nucléaire du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), cela fait bientôt sept ans que les rapports d’imagerie médicale sont produits à l’aide d’un logiciel de reconnaissance vocale. «J’ai connu l’ancien système et jamais je ne reviendrais en arrière», confie le chef du service de médecine nucléaire du CHUM, le Dr Daniel Juneau. L’ancien système, c’était celui qui avait cours depuis des décennies. Les médecins dictaient leur rapport à un enregistreur vocal. L’audio était ensuite transmis à une transcriptionniste qui tapait le texte avant de le soumettre au médecin pour relecture et signature. Le processus pouvait prendre de 6 à 48 heures et, en cas de doute au moment de parapher le document, «il fallait retourner dans le cas pour se rafraîchir la mémoire», se souvient le Dr Juneau. Désormais, le nucléiste dicte toujours son texte dans un micro, mais celui-ci est relié à son ordinateur. À l’écran, le texte s’affiche en temps réel. «Je peux corriger les erreurs tout de suite et j’ai aussitôt la version finale du rapport», indique le clinicien. Avant de «passer à autre chose», il ne lui reste plus qu’à peser sur le bouton «Envoyer» et le compte-rendu est automatiquement archivé puis versé au Dossier santé Québec (DSQ) où il peut être immédiatement consulté par les professionnels de la santé concernés. Finis les allers-retours avec les transcriptionnistes de même que l’étape du fax et de la numérisation des rapports papier à des fins d’archivage; «on a gagné en efficience, c’est évident», affirme le Dr Juneau. L’autre gain réalisé se mesure en termes de ressources humaines. «Avant, on avait sept transcriptionnistes pour les deux départements. Aujourd’hui, on n’en a plus qu’une seule pour les médecins qui n’ont pas adopté la reconnaissance vocale. Six personnes ont ainsi pu être réaffectées à d’autres tâches. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, c’est une avenue très intéressante», observe le coordonnateur administratif de la direction des services multidisciplinaires du CHUM, Pierre Prévost, qui a piloté l’implantation du logiciel en 2014-2015. À lire aussi: Les médecins souffraient-ils d’épuisement professionnel autrefois? La solution choisie, PSVox, une suite logicielle développée par l’entreprise chicoutimienne Imagem, nécessite un temps d’apprentissage de la part du médecin comme de la machine. «C’est un logiciel apprenant qui s’adapte à l’accent de l’utilisateur, à sa prononciation et à ses particularités de langage. Au début, il y a un processus de rétroaction pour que le logiciel personnalise le profil», explique le Dr Juneau. Il ajoute qu’après cette étape de familiarisation mutuelle, la soixantaine de radiologues et de nucléistes qui utilisent PSVox s’en disent «très satisfaits». À l’échelle de la province? À tel point que d’autres départements du CHUM envisagent de l’adopter. «On a des projets pilotes en cours. C’est une solution pertinente pour les services qui produisent de longs rapports, comme la neurologie», note Pierre Prévost en précisant que ces projets sont «regardés à la loupe par le MSSS [ministère de la Santé et des Services sociaux]. Ça rentre dans leur vision en matière d’imagerie médicale. Ils veulent unifier tous les départements de la province pour avoir des archives centralisées et permettre que les examens soient interprétés à distance en cas de besoin. Et pour avoir les mêmes standards, ça prend une plateforme unique, avec le même logiciel de dictée vocale». Du côté du MSSS, on indique qu’il est «prématuré de donner des entrevues ou des détails sur ce sujet. Les travaux et analyses sont en cours et nous en ferons part au moment opportun».

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