La dialyse conventionnelle n’est pas encore à reléguer aux oubliettes

Si tout le monde s’entend sur le fait que davantage de dialyses équivaut à de meilleurs résultats, on ne s’accorde pas encore sur la meilleure façon de fournir ce service à long terme, soit par des séances plus fréquentes ou par des séances nocturnes.Durant une séance plénière du World Congress of Nephrology, le Dr Robert Lindsay, professeur à l’Université Western Ontario, à London, et membre du groupe d’étude Frequent Hemodialysis Network (FHN), affirmait que la dialyse conventionnelle, trois fois par semaine, était obsolète.« Cette étude en particulier a marqué un jalon très important dans l’histoire de l’hémodialyse, a-t-il dit à propos de l’étude FHN à laquelle il a participé. Elle a établi de façon non équivoque le fait que la fréquence est importante. Elle a élevé le standard du traitement par dialyse. C’est un nouveau standard. Accroître la fréquence améliore les résultats.»Cependant, le Dr Vlado Perkovic, le chercheur principal d’une étude sur la dialyse de longue durée en Australie et professeur du George Institute for Global Health, à Sydney, a répondu qu’on ne sait toujours pas si la fréquence ou la durée représente ce qui améliore les résultats de la dialyse. « Des dialyses plus fréquentes n’ont aucuns bénéfices médicaux prouvés. La durée semble être plus importante que la fréquence. Il y a un ensemble d’autres facteurs en jeu que nous ne comprenons pas… et des traitements plus fréquents entraînent davantage de coûts », a-t-il expliqué, ajoutant que la dialyse conventionnelle n’est pas obsolète.L’étude FHN, publiée dans l’édition du 9 décembre 2010 du New England Journal of Medicine, impliquait 125 patients assignés à des hémodialyses fréquentes six fois par semaine, et 120 patients assignés à des hémodialyses conventionnelles trois fois par semaine, les deux groupes pour une période de 12 mois. Les chercheurs ont établi deux critères d’aboutissement composites : le décès ou des changements de la masse ventriculaire gauche, évalués par IRM cardiaque, et le décès ou des changements du score de la santé physique composite de l’enquête RAND.Une hémodialyse plus fréquente était associée à des bénéfices significatifs dans les deux critères d’aboutissement primaires. Les patients de ce groupe présentaient une réduction de 39 % du risque de décès ou augmentation de la masse ventriculaire gauche et un risque réduit de 30 % de décès ou diminution du score composite sur la santé physique RAND-36, comparativement aux patients du groupe dialyse conventionnelle.D’autres aspects de l’étude n’ont pas encore été révélés, par exemple les résultats des patients ayant reçu une hémodialyse plus fréquente pendant la nuit.Le facteur coût Des études observationnelles suggéraient déjà que la durée et la fréquence de l’hémodialyse amélioraient les résultats, mais il s’agit de la première étude randomisée contrôlée qui a testé cette hypothèse. Toutefois, des dialyses plus fréquentes ou plus longues accroîtraient les coûts de façon significative. Aux États-Unis, la dialyse est principalement aux mains d’entreprises à but lucratif, même lorsque le traitement est payé par Medicare, c’est pourquoi il s’agit également d’un problème d’ordre politique.« La thérapie standard ne devrait plus être trois fois par semaine. Ce devrait être une thérapie quotidienne et moins d’heures chaque jour, et je crois que tous les patients avec une maladie rénale chronique devraient le savoir, a dit le Dr Lindsay.Il croit que les groupes de défense devraient intercéder en faveur des nouveaux standards. « N’abusez pas les patients en leur disant qu’ils ont droit au meilleur traitement. »Il croit même qu’accorder plus de temps à la dialyse et plus fréquemment, sur une plus longue période la nuit serait plus efficace. « Je crois que sept nuits par semaine est mieux que le traitement standard. »Pour le Dr Perkovic, qui est également professeur agrégé de médecine à l’Université de Sydney, rien n’est prouvé.On a étudié pendant des années une plus grande fréquence des dialyses, et peu d’études ont vérifié ses bénéfices. « Méfiez-vous des petites études de faible puissance qui veulent vous convaincre que quelque chose est bénéfique lorsque cela ne l’est pas », a-t-il dit, faisant référence à l’étude FHN et à d’autres études semblables.Non seulement ne sont-elles pas assez puissantes pour trouver des bénéfices, mais les critères d’aboutissement sont souvent arbitraires. Même l’hypertrophie ventriculaire gauche, souvent utilisée comme marqueurs chez les diabétiques et les patients avec une maladie rénale, est mise en question comme preuve que la condition du patient s’aggrave.Dans l’étude FHN, les critères d’admissibilité n’étaient pas clairs. De plus, seul le groupe témoin avait entre deux et demie et quatre heures de dialyse trois fois par semaine – « ce qui est totalement inadéquat, et le fait de l’accepter en tant que groupe témoin mine gravement les conclusions que l’on peut en tirer », a expliqué le Dr Perkovic. « Ce n’est pas une étude qui examine la fréquence des dialyses, c’est une étude qui examine sa durée et ce n’est pas possible de démêler lequel de ces aspects a pu contribuer à certains effets. »Tandis que l’auditoire déclarait à mains levées que la dialyse conventionnelle n’est pas encore obsolète, les Drs Lindsay et Perkovic s’accordaient sur le fait qu’il y a de bonnes raisons de s’attendre à des changements dans l’avenir dans la façon dont la dialyse est effectuée.« Nous élèverons les standards, c’est sûr », a conclu le Dr Lindsay.Lire la suite du dossier «Quoi de neuf ?: Néphrologie»

La dialyse conventionnelle n’est pas encore à reléguer aux oubliettes

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