La COVID-19, cinq ans après

Il y a cinq ans jour pour jour, le dixième cas de COVID-19 était officiellement répertorié au Québec. Le lendemain, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) annonçait que l’épidémie de SARS-CoV-2 était devenue une pandémie mondiale. Quarante-huit heures après, soit le 13 mars 2020, le gouvernement de François Legault déclarait l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire québécois, une première dans l’histoire de la province. Cette semaine-là, Influence Communication avait calculé que 536 articles web et papier sur le nouveau coronavirus étaient publiés chaque jour au Québec.La COVID-19 refait les manchettes ces jours-ci à l’occasion de son cinquième anniversaire. Autrement, on en oublierait presque que son virus circule encore et que la maladie continue de sévir, notamment en première ligne. Si des zones tièdes subsistent dans certaines cliniques de médecine familiale, «les patients nous en parlent très peu. Quand ils ont des symptômes, c’est rare qu’ils se soient fait tester. De toute façon, il est souvent trop tard pour les traiter», remarque le Dr Kevin Girard. L’omnipraticien qui exerce à Roberval admet que lui aussi «y pense moins. On dirait qu’on est collectivement passé à autre chose».Son confrère le Dr Jean Rivest, médecin de famille à Laval, constate que ses patients lui parlent davantage de l’influenza, qui a particulièrement circulé en janvier et février, le nombre de cas ayant atteint un sommet inégalé depuis 10 ans avec presque 30% de tests positifs au virus de la grippe la semaine du 8 février. «La préoccupation pour la COVID est moindre. C’est rendu un virus comme les autres», observe le clinicien. Sa clientèle âgée continue de se faire vacciner, par précaution. Pour autant, «c’est comme si c’était un mauvais rêve qu’on voudrait tous oublier. Moi-même, ça me paraît lointain.»La situation épidémiologique actuelle n’a évidemment rien à voir avec celle connue au printemps 2020 durant lequel le cap des 10 000 cas a été franchi en quatre semaines. Toutefois, «la COVID-19 n’est pas une chose du passé. Des gens en souffrent encore», relativise le Dr Luc Boileau, données récentes à l’appui. En date du 3 mars, 674 personnes ayant reçu un test positif au SRAS-CoV-2 étaient ainsi hospitalisées au Québec, dont la moitié environ se retrouvaient à l’hôpital à cause de la COVID-19, précise le directeur national de la santé publique. «Une vingtaine en décèdent chaque semaine, essentiellement des personnes âgées présentant plusieurs comorbidités», ajoute-t-il.Cela dit, le sous-ministre adjoint à la Santé constate lui aussi une certaine banalisation au sein de la population. «Les gens vivent avec. Presque tout le monde l’a eue au moins une fois. Mais pour nous, ça reste une maladie sérieuse, plus grave que ne l’est l’influenza, et dont le taux de mortalité est plus élevé», rappelle-t-il. Lire aussi: SRAS-CoV-2, grippe ou VRS: quel virus est le plus létal?Surveillance étroiteAux premières loges de la pandémie il y a cinq ans – elle présidait alors le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) de l’Agence de santé publique du Canada –, la Dre Caroline Quach-Thanh pense pour sa part que l’«on n’a pas oublié la COVID-19. La plupart des gens évitent simplement d’en reparler. C’est devenu un virus respiratoire saisonnier comme les autres, avec une à deux vagues par année. Mais dans mon domaine, on en parle encore», signale la microbiologiste-infectiologue du CHU Sainte-Justine. La COVID-19 fait ainsi l’objet d’une vigie épidémiologique «digne d’une maladie évitable par la vaccination», estime la Dre Quach-Thanh. Grâce aux tests PCR réalisés à l’admission pour des symptômes respiratoires dans la plupart des hôpitaux canadiens, «on suit à la semaine les tendances de positivité», et grâce au suivi des eaux usées, «on a une image assez fidèle» de la situation, estime la clinicienne-chercheuse qui précise que le phénotypage régulier des souches en circulation permet également de surveiller les variants les plus dominants. «Si un nouveau variant apparaît, on le saura.»Après le pic atteint le 15 septembre 2024, le taux de positivité de COVID-19 au Québec est progressivement redescendu depuis, passant de 24% à la fin de l’été à 2,9% la semaine du 2 mars 2025.À l’échelle provinciale, cette veille est effectuée par la direction des risques biologiques de l’Institut de la santé publique du Québec (INSPQ) au sein de laquelle travaille la Dre Christine Lacroix. La médecin dit suivre «religieusement» l’évolution de la COVID-19, semaine après semaine. «C’est fascinant. Cinq ans après, sa circulation ne s’est jamais arrêtée. Avec l’influenza par exemple, on isole très, très peu de cas entre deux saisons. Avec la COVID-19, on n’a pas encore connu ça. Le virus circule encore à l’année, avec des hauts et des bas, sans saisonnalité précise.»Selon la spécialiste en santé publique, cette dynamique de vague aléatoire s’explique par les mutations fréquentes du SRAS-CoV-2 et par la perte d’immunité au fil du temps. «Tout d’un coup, il y a suffisamment de personnes susceptibles d’être réinfectées. Et là, le virus reprend de l’ampleur. Il circule beaucoup, ce qui accroît ses opportunités de mutations. C’est toute cette dynamique-là qui fait qu’on a des vagues qui ne sont pas encore stables», résume sommairement la Dre Lacroix.Dans ce contexte mouvant, «on maintient nos recommandations quant à la vaccination des profils à risque», indique le Dr Boileau qui se déclare satisfait de la couverture vaccinale présentement. «On a atteint nos objectifs: plus de 70% des personnes en CHSLD [centre d’hébergement de soins de longue durée] et en RPA [résidence pour aînés] se sont fait vacciner» depuis l’automne dernier, souligne le directeur de la santé publique qui encourage à nouveau l’adoption des gestes barrières. «Pendant la pandémie, l’attention à l’autre était plus grande. Il y a encore de rares gens qui portent le masque, mais on doit rester attentif aux autres. Quand on a une poussée du virus, c’est que l’attention est plus réduite.»

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