La blouse blanche, un symbole tenace

Dans le tumulte d’une salle d’urgence ou le calme d’un bureau de première ligne, la tenue d’un médecin n’est pas anodine. Une revue systématique regroupant 32 études menées dans 13 pays montre qu’elle influence la perception que les patients se font du clinicien qu’ils consultent. «Le port de la blouse blanche continue d’être perçu comme un symbole de professionnalisme et de confiance », rappellent les auteurs de cette étude publiée dans le BMJ Open. Mais, insistent-ils, ce symbole n’a pas partout la même résonance.Les chercheurs - deux Coréens du Sud et un Chinois - justifient leur démarche par l’évolution des attentes des patients et des pratiques médicales depuis la précédente revue, publiée en 2015. Ils notent que les normes sociales changent rapidement et que les codes vestimentaires doivent être réévalués à la lumière de ces transformations. Leur objectif était donc de dresser un portrait actualisé, plus large et mieux ancré dans la diversité des contextes cliniques.Pour y parvenir, ils ont fouillé PubMed, Embase, la Cochrane Library et Google Scholar, recensant toutes les études publiées entre janvier 2015 et juin 2025. Sur 724 publications, 32 répondaient aux critères, la moitié provenant des États-Unis. La taille des échantillons variait de 97 à plus de 6400 participants, presque tous adultes. La majorité des études étaient jugées à faible ou modéré risque de biais.À lire aussi: Les patients font moins confiance aux médecins qui utilisent l’IA dans leur pratique, et les jugent moins compétents selon une étudePartant de là, ils ont analysé la perception du professionnalisme, de la compétence et de la capacité de communication des médecins selon leur tenue vestimentaire: blouse blanche, habits formels, vêtements décontractés ou encore scrubs (habit chirurgical).En soins ambulatoires et en première ligne, la blouse blanche reste fréquemment associée à la compétence et au professionnalisme, mais elle n’est pas toujours jugée la plus accueillante. «Dans certains contextes, une tenue plus décontractée portée sous la blouse est perçue comme favorisant la communication et l’accessibilité», observent les auteurs.À l’urgence et en salle d’opération, la préférence est nette pour les scrubs. «Dans les environnements à forte intensité clinique, la tenue chirurgicale est spontanément associée à la compétence technique et à la sécurité», précise l’article.En spécialités, les perceptions sont partagées. La blouse blanche suscite une approbation marquée en dermatologie, en neurochirurgie, en ophtalmologie et en obstétrique-gynécologie. Les scrubs sont plutôt favorisés en anesthésiologie et en gastro-entérologie. Selon les auteurs, «ces variations traduisent des attentes implicites des patients sur la technicité ou le caractère relationnel de chaque spécialité.»À lire aussi: L’habit fait-il le moine?Influence du genreLes biais de perception liés au sexe du médecin ressortent clairement. Les médecins masculins sont jugés plus professionnels lorsqu’ils portent une tenue formelle avec blouse blanche. Les femmes, même vêtues de la même façon, sont plus souvent perçues comme des infirmières ou des assistantes. «Le biais de genre est constant et préoccupant, car il dépasse le seul choix vestimentaire», soulignent les chercheurs. Ces derniers ont également observé que la COVID-19 a modifié certains codes. L’utilisation massive des équipements de protection individuelle a contribué à renforcer l’image positive des scrubs et des habits hygiéniques. «La pandémie a mis en avant la valeur de la sécurité et de la propreté, ce qui a changé la perception des patients vis-à-vis des tenues médicales», peut-on lire dans l’article.La blouse blanche conserve donc sa valeur symbolique, mais son impact sur les patients varie selon le contexte clinique et la spécialité. «La tenue du médecin ne peut pas être uniforme. Elle doit être adaptée au lieu de pratique et aux attentes des patients», résument ainsi les chercheurs qui insistent sur la nécessité d’agir sur les biais de genre: «Les perceptions différenciées selon le sexe du médecin montrent qu’il est urgent de mettre en place des politiques institutionnelles pour corriger ces inégalités».Référence:Kim J, Ba Y, Kim J, et coll. Patient perception of physician attire: a systematic review update. BMJ Open 2025;15:e100824. doi: 10.1136/bmjopen-2025-100824

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