Isotrétinoïne: pas de risque accru de suicide ou de troubles psychiatriques chez les utilisateurs

Les monographies canadiennes des produits à base d’isotrétinoïne administrés par voie orale pour le traitement de l’acné sévère comportent une mise en garde sérieuse concernant de possibles effets indésirables psychiatriques, notamment la dépression et les tendances suicidaires. Bien qu’aucune relation de cause à effet n’ait été établie, les monographies (comme celle d’AccutaneMD) indiquent que tous les patients doivent faire l’objet d’un dépistage et d’un suivi des signes de dépression avant et pendant la thérapie.Il a été avancé que l’isotrétinoïne pourrait contribuer au développement de troubles psychiatriques en modifiant les niveaux de neurotransmetteurs, tels que la dopamine, la sérotonine et la norépinéphrine, qui sont impliqués dans la régulation de l’humeur. Le lien potentiel entre la substance active et les troubles psychiatriques a été débattu, avec des résultats contradictoires dans la littérature.En raison de l’utilisation répandue de l’isotrétinoïne, une nouvelle étude a tenté de clarifier son association avec les troubles psychiatriques. Les chercheurs ont sélectionné des essais randomisés et des études observationnelles ayant rapporté le risque absolu, le risque relatif et les facteurs de risque de suicide et de troubles psychiatriques chez les utilisateurs d’isotrétinoïne. Au total, 25 études (comprenant 1 625 891 participants) ont été incluses dans la revue, et 24, dans la méta-analyse. L’âge moyen des participants était compris entre 16 et 38 ans.Les résultats sont les suivants:Sur une période d’un an, 4,57% des utilisateurs d’isotrétinoïne ont développé un trouble psychiatrique.Le risque absolu groupé de suicide, de tentative de suicide, d’idées suicidaires et d’automutilation sur un an était pour chacun inférieur à 0,5%.Le risque absolu groupé de tentative de suicide sur un an était de 0,14 % (ce qui est inférieur au risque absolu sur un an de tentative de suicide chez les adolescents rapporté dans deux études longitudinales – 0,84% et 1,3% respectivement).Le risque absolu de dépression sur un an était de 3,83% (ce qui est comparable au risque absolu de dépression chez les adolescents rapporté dans deux études antérieures – 3,3% et 5,72%, respectivement).Les utilisateurs d’isotrétinoïne étaient moins susceptibles que les non-utilisateurs de tenter de se suicider à deux ans (RR, 0,92; IC à 95%, 0,84-1,00), trois ans (RR, 0,86; IC à 95%, 0,77-0,95) et quatre ans (RR, 0,85; IC à 95%, 0,72-1,00) suivant le traitement.La métarégression des études a révélé que celles dont les participants avaient un âge moyen plus élevé présentaient un risque absolu de dépression plus faible sur un an, tandis que celles comportant un pourcentage plus élevé de participants masculins présentaient un risque absolu de suicide avéré plus élevé sur un an (ce qui est cohérent avec la répartition des suicides selon le sexe présentée dans la littérature existante).En ce qui concerne les facteurs de risque de troubles psychiatriques chez les utilisateurs d’isotrétinoïne, les personnes avec des antécédents psychiatriques étaient plus susceptibles de développer des troubles psychiatriques incidents (rapport de taux d’incidence, 1,60; IC 95%, 1,34-1,92). La dose cumulative d’isotrétinoïne (par incréments de 1000 mg) était associée à un risque plus faible de tentative de suicide (OR, 0,77; IC 95%, 0,68-0,89). Les patients ayant des antécédents psychiatriques étaient plus susceptibles de faire une tentative de suicide (OR, 18,21; IC 95%, 9,96-33,30). Un diagnostic antérieur d’anxiété était associé à un risque plus élevé de tentative de suicide (OR, 4,78; IC 95%, 2,44-9,33).Les auteurs de l’étude publiée récemment dans le JAMA Dermatology soulignent que des recherches antérieures de type challenge-dechallenge-rechallenge (CDR) ont fourni des preuves solides d’une relation causale directe entre l’utilisation de l’isotrétinoïne et les changements d’humeur chez de rares individus. Il peut s’agir d’une réaction singulière difficile à prédire. Cependant, il pourrait y avoir un effet secondaire indirect de l’isotrétinoïne conduisant à une amélioration de l’humeur, qui serait liée à la résorbation de l’acné et à une amélioration de l'image de soi, ce qui est cohérent avec les résultats de cette étude.À lire aussi: Quiz éclair sur l'acnéLes auteurs concluent que l’isotrétinoïne semble être sûre pour la population, avec un risque absolu faible et aucun risque relatif accru de suicide et de troubles psychiatriques. Au contraire, les utilisateurs d’isotrétinoïne pourraient présenter un risque plus faible de tentative de suicide deux à quatre ans suivant le traitement. Bien que ces résultats soient rassurants, les chercheurs conseillent néanmoins aux cliniciens de continuer à surveiller chez les patients des signes de détresse mentale durant le traitement, afin de déceler de rares changements d’humeur idiosyncrasiques qui pourraient augmenter le risque de suicide.

Isotrétinoïne: pas de risque accru de suicide ou de troubles psychiatriques chez les utilisateurs

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