Exploiter la science derrière les bouffées de chaleur

Lorsque les neurones kisspeptine-neurokinine B-dynorphine (KNDy) ont été découvertes en 2008, une certaine explication des bouffées de chaleur s’est dessinée, et cela n’a pas laissé de glace la communauté scientifique. La découverte des neurones KNDy et de leur rôle essentiel dans la thermorégulation a fait naître l’espoir que de nouveaux traitements ciblés visant à modifier la physiologie des symptômes vasomoteurs (SVM) pourraient être découverts et mis au point afin de réduire l’immense fardeau que causent les bouffées de chaleur. Jusqu’à 80 % des femmes subissent des SVM au cours de la ménopause1, lesquels ont une incidence sur leurs activités quotidiennes et leur qualité de vie1. On estime que les SVM non pris en charge coûtent 3,5 milliards de dollars par année2. Comme quoi le fardeau des symptômes vasomoteurs va au-delà des conséquences physiques, psychosociales et économiques. Des études ont démontré un lien entre la persistance de SVM non traités et l’augmentation des risques de maladies cardiovasculaires, de cancer du sein et d’altération des facultés cognitives3-6. Ces observations fournissent des raisons supplémentaires de prendre en charge les bouffées de chaleur d’une façon qui va au-delà d’un simple soulagement symptomatique.La science derrière les bouffées de chaleurNous savons maintenant que les bouffées de chaleur sont un phénomène thermorégulateur associé à des changements dans la façon dont les systèmes reproducteur et thermorégulateur interagissent dans le système nerveux7. Les neurones KNDy de l’hypothalamus expriment divers récepteurs, dont le récepteur alpha des estrogènes (ERa), qui exerce une rétroaction négative sur les neurones KNDy afin de contrôler leur activité7. Lorsque les taux d’estradiol en circulation diminuent au cours de la ménopause, une perte de rétroaction négative entre le cerveau et le système reproducteur se produit et, ainsi, la liaison de la neurokinine B (NKB) s’accroît par l’intermédiaire des récepteurs NK37. Par conséquent, les neurones KNDy s’hypertrophient et deviennent hyperactifs, causant l’augmentation de l’envoi de signaux aux neurones du centre de thermorégulation, auxquelles se lie également la NKB7. Les mécanismes de dissipation de la chaleur du centre de thermorégulation deviennent alors hypersensibles et hyper réactifs, ce qui est ressenti par la femme comme une bouffée de chaleur7.Viser les neurones KNDy pour rétablir l’équilibre du centre thermorégulateurLe fezolinetant et l’élinzanétant sont des nouveaux traitements conçus pour cibler la source de l’augmentation de l’envoi de signaux au centre de thermorégulation par les neurones KNDy8. Le fezolinetant est un antagoniste sélectif du récepteur NK3 qui bloque la liaison de la NKB sur les neurones KNDy9, prévenant ainsi l’augmentation de l’envoi de signaux vers le centre de thermorégulation7. L’élinzanétant agit de la même manière, mais, en plus de bloquer le récepteur NK3, il bloque également le récepteur NK110, ce qui peut améliorer la qualité du sommeil. Bref, le fezolinetant et l’élinzanétant modulent sélectivement l’activité neuronale du centre de thermorégulation en se liant au récepteur NK3 pour bloquer la NKB, ce qui aide à rétablir l’équilibre et à réduire la fréquence et la sévérité des bouffées de chaleur.Faire passer la science à la pratiqueNous disposons maintenant de trois options fondées sur des données probantes et approuvées par Santé Canada qui sont spécialement indiquées (c.-à-d. à usage conforme) pour réduire la fréquence et la sévérité des bouffées de chaleur modérées à sévères : hormonothérapie ménopausique (HTM), fezolinetant et élinzanétant9,10,11. Les lignes directrices sur la prise en charge de la ménopause continuent de reconnaître le rôle de l’HTM (c.-à-d. le traitement par estrogène et progestatif ou par estrogène seulement pour les femmes dont l’utérus n’est pas intact) comme étant le traitement le plus efficace contre les SVM11. L’estrogène rétablit la rétroaction négative sur les neurones KNDy dans l’hypothalamus et prévient leur hypertrophie et l’augmentation de l’envoi de signaux vers le centre de thermorégulation7,12. Cependant, certaines femmes ne sont pas de bonnes candidates à l’HTM en raison de la présence de contre-indications (environ 10 % des femmes), de comorbidités qui peuvent faire pencher le rapport risques-avantages en défaveur de l’HTM (jusqu’à 70 % des femmes) ou d’une préférence personnelle d’éviter l’hormonothérapie (jusqu’à 56 % des femmes en Europe et aux États-Unis)1. Chez les femmes qui ne sont pas de bonnes candidates à l’HTM, les lignes directrices de prise en charge recommandent de proposer des traitements non hormonaux étayés par des preuves13. Le fezolinetant et l’élinzanétant sont des options non hormonales à usage conforme indiquées pour le traitement des SVM modérés à sévères9,10,13. Le fait de disposer de plus d’options améliorera la vie des Canadiennes atteintes de SVM débilitants liés à la ménopause.La gestion des bouffées de chaleur en 2025La découverte des neurones KNDy a fait progresser notre compréhension de la science derrière les bouffées de chaleur et des liens importants entre le centre thermorégulateur du cerveau et le système reproducteur. Les cliniciens disposent maintenant d’options supplémentaires à offrir aux femmes atteintes de bouffées de chaleur modérées à sévères incommodantes, y compris l’HTM et de nouvelles thérapies non hormonales ciblées et fondées sur des données probantes. Disposer de plus d’outils permet de prendre des décisions de gestion plus personnalisées qui tiennent compte des objectifs thérapeutiques et des préférences de chaque femme. Comprendre la science derrière les bouffées de chaleur permettra aux cliniciens de discuter en toute confiance des thérapies offertes avec les femmes qui cherchent un traitement pour les bouffées de chaleur, favorisant ainsi la prise de décision partagée, qui demeure une partie intégrante de la promotion de la santé des femmes au cours de la ménopause. Nous espérons qu’un meilleur traitement des SVM se traduira par des trajectoires de santé positives en aval en réduisant les incidences à court et à long terme pour les femmes d’âge moyen et au-delà.

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