Euthanasie et mort assistée « Il faut que les médecins entrent dans le débat » - Le Dr Yves Robert

Les baby-boomers forment une génération qui a redéfinila jeunesse, qui a déjà commencé à redéfinir la vieillesse et qui s’active déjà à redéfinir la manière de mourir. La mort digne, comme ses défenseurs l’appellent, la mort médicalement assistée, la mort discrétionnaire, l’euthanasie et, à la limite, le suicide assisté.Par crainte de la souffrance, d’une agonie interminable, par refus des soins palliatifs ou tout simplement au nom du contrôle qu’ils auront sur leur mort comme ils l’ont eu sur leur vie, de plus en plus de gens réclament un droit de regard sur leur mort. Ils veulent déterminer à quel moment ils mettront fin à leurs jours quand ils se sauront condamnés, qu’ils estimeront qu’ils sont un fardeau pour leurs proches ou qu’ils ne seront plus que l’ombre de la personne qu’ils étaient. Paradoxalement, ils se tournent vers la médecine pour y parvenir.Des groupes de pression se forment au Québec, les colloques abondent sur le sujet. Le mouvement est en marche à travers le monde, dans l’Union européenne, aux États-Unis, au Canada anglais, en Asie. Aujourd’hui ministre de la Santé, le Dr Yves Bolduc écrivait il y a deux ans qu’il faudra laisser la porte ouverte pour certains cas particuliers. Avec la montée des associations pour le droit de mourir dans la dignité, la pression s’exercera de plus en plus sur les élus et sur la profession médicale. Le mouvement pro euthanasie remet en question certains pouvoirs médicaux et l’emprise des médecins sur la mort. Le Collège des médecins est très conscient de cette évolution et a décidé de produire un énoncé de position dès maintenant afin que les médecins, qui sont au cœur de cette question, aient voix au chapitre dans les discussions.« On ne voulait pas que les médecins soient exclus du débat », explique le secrétaire du Collège, le Dr Yves Robert.L’euthanasie rêvet des dimensions médicales, légales, éthiques, philosophiques et religieuses, mais ultimement, se dit le Collège, l’acte reposera toujours sur les épaules des médecins : « Docteur, aidez-moi à mourir. » Les médecins sont des acteurs obligés.« Nous voulions traduire la sensibilité des médecins québécois par rapport à cette question, souligne le Dr Robert. Nous savons qu’ils se sentent interpellés, mais quelle réponse seraient-ils prêts à apporter ? Comment les médecins reçoivent-ils cette demande de la population ? C’est ce que nous avons essayé d’analyser. Nous avons l’impression que le débat se fait un peu en dehors de ce que pensent les médecins, mais nous voulons y participer. Ce n’est pas que les médecins veuillent imposer leur point de vue, mais ils ne veulent pas non plus qu’on leur dicte ce qu’ils feront personnellement », ajoute le Dr Robert.Le CMQ a donc décidé d’agir parce que le questionnement est devenu inévitable même s’il sait très bien que le sujet, très délicat, ne fera jamais l’unanimité parmi ses membres. Le Collège, souligne son secrétaire, a rarement été militant et il croit que le sujet de l’euthanasie se prête mal au militantisme un peu comme on l’a vu avec l’avortement. Le Collège l’aborde sous son angle professionnel et celui de la protection du public.« Il ne s’agit pas de donner suite sans discernement à toute demande pour écourter la vie, résume le Dr Robert. Pour nous, la réponse à ces demandes se trouve d’abord dans des soins appropriés. »Euthanasie et suicide assisté De quoi parle-t-on ?Le Collège des médecins du Québec et plusieurs pays établissent une distinction très nette entre « euthanasie » et « suicide assisté ». Si le Collège endosse les recommandations de son Groupe en éthique clinique, l’euthanasie pourrait faire partie ultimement du processus de soins. Il s’agirait d’un acte de nature médicale posé par un médecin.Aux Pays-Bas, le médecin doit rester aux côtés du malade jusqu’à son décès au cas où surviendraient des complications. Avec le suicide assisté, on sort du champ de la médecine, dit le Collège, qui a évincé cette question de sa réflexion sur l’euthanasie. Divers pays partagent cette vision et acceptent l’euthanasie, mais pas le suicide assisté.L’Oregon et une partie de la Suisse autorisent le suicide assisté, un geste par lequel le patient se donne lui-même la mort. Dans l’Oregon, le médecin émet une ordonnance pour un médicament qui, à forte dose, provoquera le décès. Le patient absorbe ce médicament sans assistance médicale et peut mourir entouré des siens ou dans la solitude complète. En Suisse, on rapporte que des « clients » au suicide du groupe Dignitas qui ont pris des doses mortelles de pentobarbital, un barbiturique utilisé pour l’euthanasie vétérinaire et humaine, sont morts dans des chambres d’hôtel et même dans des voitures.Les opposants au suicide assisté soulignent que les erreurs de dosage sont possibles. Ils rapportent le cas d’un Allemand qui aurait mis 72 heures à mourir.Lire la suite du Dossier Euthanasie : bientôt l’heure des choix

Euthanasie et mort assistée « Il faut que les médecins entrent dans le débat » - Le Dr Yves Robert

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